La République Tchèque s’apprête à élire son président les 12 et 13 janvier. Un scrutin test pour le pays, la région et l’Europe, où s’opposent la peur et la confiance en l’avenir.
Un succès économique inédit
« La République Tchèque a toutes les raisons d'être une nation fière et sûre d'elle-même ». Lors de ses traditionnels vœux prononcés depuis la résidence de Lány, le chef de l’Etat Miloš Zeman a rappelé que son pays de 10 millions d’habitants, situé au cœur de l’Europe centrale, a le taux de chômage le plus bas de l’Union Européenne (4 %), a réduit sa dette et augmenté nettement les salaires. Il aurait même pu ajouter que la croissance est forte, la couronne tchèque stable et les carnets de commande pleins.
Agé de 73 ans, en mauvaise santé, il est candidat à sa propre réélection au Château de Prague. Il caracole d’ailleurs en tête des sondages, à plus de 30 % des voix. Face à lui, huit candidats, pour la plupart indépendants, novices en politique. Celui qui a le plus de chances de se hisser au deuxième tour est Ji?í Drahoš (il est crédité de 17 % des voix). Personnalité respectée dans les milieux scientifique et intellectuel, il se présente comme un libéral pro-européen, soucieux de combattre le populisme, l’extrémisme et ce qu’il appelle « l’apathie civique vis-à-vis des valeurs démocratiques fondamentales ». A l'opposé donc de la rhétorique euroscpetique, anti-migrants et anti-islam volontiers utilisée par le président Zeman. Sera-t-il capable, en cas de victoire, d’apporter la stabilité dont le pays a besoin ?
Une instabilité politique notoire
Car malgré le succès économique, sur le plan politique, les choses se gâtent. Le pays souffre d’une instabilité chronique : six gouvernements se sont succédés en dix ans. Et le nouveau Premier ministre élu cet automne, Andrej Babiš, un milliardaire surnommé le « Trump tchèque » qui a fondé le mouvement ANO, peine à former une coalition, sur fond de déclin des partis traditionnels de gauche et de droite. « On s’inquiète beaucoup du virage populiste et eurosceptique de la République Tchèque, mais les risques immédiats liés aux élections sont la fragmentation, le blocage législatif et l’instabilité » écrit l’analyste Filip Rambousek dans Globak Risk Insights.
Ce pays, qui a rejoint l’Union Européenne en 2004, soit quinze ans seulement après la Révolution de Velours et la chute du communisme, se trouve en outre à un carrefour de son histoire : va-t-il se transformer en une « démocratie illibérale », à l’image de la Hongrie et la Pologne, ses partenaires du groupe de Visegrad, ou au contraire revenir dans le giron de Bruxelles, comme son voisin slovaque ? Verdict le 13 janvier au soir.