Q1 : Ce dimanche 23 avril 2017 a lieu le premier tour de l’élection présidentielle, sur une échelle de 1 à 10, quelle est la probabilité que vous alliez voter ?
Donnez une note de 1 à 10, 1 signifiant que vous êtes ‘tout à fait certain(e) de ne pas aller voter » et 10 que vous êtes « tout à fait certain(e) d’aller voter ». Les notes intermédiaires servant à nuancer votre jugement.
- Est sûr d’aller voter : 68 % (+8 points par rapport au 23 mars 2017)
- Hésite à aller voter : 13 % (- 4 points par rapport au 23 mars 2017)
- N’ira pas voter : 18 % (- 4 points par rapport au 23 mars 2017)
- NSP : 1 %
68% des Français interrogés déclarent qu’ils sont sûrs d’aller voter (+8 points par rapport à la même question posée le 23 mars 2017), 13% hésitent encore, 18% affirment qu’ils n’iront pas voter.
Voici un résultat, qui à première vue, serait à même de rassurer celles et ceux qui aiment les habitudes et les récurrences dans la vie politique. En effet, 18% des Français affirment être certains de ne pas aller voter, cela nous place dans un étiage sensiblement équivalent aux chiffres de l’abstention des présidentielles de 2007 et 2012. Toutefois, derrière ce chiffre « classique » se cache le chiffre des indécis : 13% des personnes interrogées hésitent encore à aller voter. Si on additionne ces deux chiffres, nous nous trouvons mathématiquement (avec 31 points) au-delà du record d’abstention dans une élection présidentielle en France, qui s’établissait à 28,2% en 2002.
Tout l’enjeu du premier tour de l’élection présidentielle de 2017 est contenu dans ce chiffre de 13% d’indécis. Il correspond à celles et ceux qui, parmi les 68% de personnes interrogées, affirmant être sûres d’aller voter, hésitent encore sur la couleur du bulletin qu’ils placeront dans l’urne dimanche. Ils sont la clef du premier tour. En communication, ce sont eux qui occuperont le centre des commentaires politiques dans la journée de dimanche, avant et après la révélation des résultats.
Ce sont les indécis, les hésitants, les perplexes, les incertains et les irrésolus qui décident et qui vont arbitrer dans l’isoloir (ou sur le chemin du bureau de vote) , ce qui est une première dans l’histoire de la 5ème République : le match se dispute à 4. Vers qui se tourneront les indécis ? Le gaullisme, la rupture brutale d’extrême droite ou la rupture brutale d’extrême gauche ou encore la nouveauté politique ? Personne ne peut répondre. La seule réponse certaine est, si on en croit les enquêtes d’opinion, que le match se jouera entre Marine le Pen, Emmanuel Macron, François Fillon et Jean-Luc Mélenchon. Cette situation permet d’envisager 6 combinaisons possibles qui pourraient s’afficher sur les téléviseurs dimanche soir à 20h00 et désigner les deux finalistes de l’élection.
Des années 60 à 2012, la « cristallisation » des choix se faisait entre Noël et février. Ce fut le cas dans toutes les élections à deux exceptions près : en 1974, la campagne n’ayant duré que 6 semaines du fait de la mort de Pompidou et en 2002 où la cristallisation annoncée avait été battue en brèche par les électeurs.
Cette situation inédite dans notre République amènera nécessairement à se poser la question du déroulement de la campagne et des actions de communication qui l’ont rythmée. En effet, comme l’écrivait Michel Bongrand, l’un des pionniers de la communication politique en France au milieu des années 70 : « Pour parvenir au pouvoir, pour l’exercer, pour en rendre compte au citoyen, la politique est communication ».
Ainsi, dans les 24 heures de communication politique avant la clôture de la campagne officielle du premier tour, les enjeux entre les candidats sont différents. Pour les 4 leaders, il s’agit de consolider leur position et de faire la différence dans la dernière ligne droite avec un propos, une image marquante, une prise de position qui permettra de délivrer une émotion positive inédite à l’opinion publique. La dynamique de ces 10 derniers jours semble être derrière François Fillon et Jean-Luc Mélenchon alors que le Pen et Macron semblent marquer le pas. Les deux premiers doivent profiter des dernières 24 heures pour porter une estocade décisive. Les deux autres, doivent gérer leur avance… Ce qui est toujours périlleux. Pour les 7 autres, les objectifs sont différents. Benoît Hamon semble avoir acté le fait de ne pas figurer au 2ème tour de l’élection, il doit consolider sa 5ème place et ne pas faire un score trop bas. Pour les autres, l’objectif est de dépasser les 5% de suffrages qui permettent de recevoir le remboursement des frais de campagne par l’Etat ou encore de réaliser un score honorable à même de peser dans les débats d’entre deux tours.
Q2 : Au premier tour, vous pensez voter… ?
(Question posée uniquement aux personnes qui expriment une intention de vote.)
- Pour le candidat que vous préférez : 88 %
- Pour un autre candidat (par exemple pour faire barrage à un autre candidat ou en fonction des sondages) : 12 %
88% des Français interrogés déclarent voter pour leur candidat préféré plutôt que pour un autre par choix stratégique
Depuis une semaine, la notion de « vote utile » occupe les propos des commentateurs et experts de la vie politique. De quoi s’agit-il ? D’un choix tactique des électeurs qui pourraient opter pour un candidat différent de celui dont les idées seraient les plus proches pour répondre à une nécessité considérée comme supérieure. Cette « nécessité » exprimée fait généralement barrage à un autre candidat (souvent un candidat issu des deux extrêmes de l’échiquier politique) ou bien en fonction des sondages eux-mêmes : soit pour se placer du côté des favoris (effet « bandwagon »), soit pour « sauver » un candidat jugé en difficulté (effet «underdog »).
Les Français, dans une large majorité (88%) réfutent le vote utile et indiquent qu’ils voteront pour leur candidat préféré. Ils confirment ainsi l’adage selon lequel « au premier tour, on choisit, au deuxième tour, on élimine ».
Ce résultat indique que les Français ne font pas de calculs pour ce premier tour. Emmanuel Macron et, dans une moindre mesure, François Fillon ont fait appel à ce vote utile pour préserver les chances d’un débat classique d’entre deux tours faisant s’affronter la droite et la gauche. Cette manœuvre vise alors à éviter un débat entre un candidat de centre droit ou de centre gauche face aux candidats des deux extrêmes de l’échiquier politique.
En communication, ce résultat montre que les Français ne sont pas nécessairement sensibles aux sirènes des sondages diffusés par les médias de masse. Ils affirment ne pas se laisser influencer par un risque ou par un autre, marquant ainsi une indépendance d’esprit, mais également une forme de résistance aux influences médiatiques.
Si le résultat du sondage avait été différent, avec une majorité pour le « vote utile », nous aurions alors obtenu la preuve que les sondages influencent les électeurs et déclenchent des effets « bandwagon » ou « underdog », à savoir l’influence de messages à caractère politique délivrés par les médias de masse à l’opinion publique.
Toute la question est désormais de savoir quelle sera la combinaison gagnante de ce choix librement consenti par les électeurs.
- Un duel Macron / Le Pen confirmerait la position des sondages de ces dernières semaines.
- Un duel Macron/Fillon consacrerait un recentrage de dernière minute et un retour à un schéma gauche/droite classique.
- Un duel Fillon/Le Pen serait synonyme d’une « campagne pour rien » puisque ce duo était déjà annoncé en janvier dernier.
- Un duel Mélenchon/Fillon marquerait un tournant dans la vie politique à gauche.
- Un duel Mélenchon/Le Pen serait l’éclosion d’une France doublement extrémiste.
- Un duel Macron/Mélenchon serait une curiosité sociologique dans une France qui aura rarement été aussi proche des idées de droite.
Réponse dimanche soir.
Sondage exclusif TILDER/LCI/OpinionWay du 20 avril 2017