Le premier tour de l'élection présidentielle a constitué une réelle surprise qui a souligné le rôle contesté des instituts de sondage accusés d'être inféodés aux partis politiques.
Le succès inattendu de Neves n'a pas entraîné un fort rallye haussier du Bovespa car le résultat du second tour reste très incertain à ce stade. Le marché se méfie désormais des études d'opinion. Le fait que Silva ait apporté son soutien au candidat de centre-droit rend crédible le scénario d'une alternance politique salutaire au Brésil après plus de douze ans d'hégémonie du Parti des Travailleurs.
Le programme de Neves pourrait se résumer en trois mots d'ordre : lisibilité de la politique monétaire, retour de l'investissement et développement des infrastructures. Neves souhaite s'attaquer aux maux qui ont pénalisé lourdement la croissance brésilienne ces dernières années, en particulier le sous-investissement chronique qui remonte aux années 70.
La réussite d'une présidence Neves dépendra surtout de sa capacité à atteindre son objectif de ratio investissement / PIB à 24%, soit un niveau comparable aux autres pays de la région, contre seulement 16.5% actuellement, et à travailler main dans la main avec le secteur privé dans le domaine des infrastructures. Il sera indispensable, au préalable, de rétablir la confiance avec les agents économiques qui a été ébranlée depuis 2011.
Sur le papier, le programme prometteur de Neves a tout pour plaire aux marchés financiers mais il devra passer l'épreuve de la réalité. Sur le plan intérieur, on peut craindre qu'il se heurte au jeitinho brasileiro, cette façon de faire les affaires mêlant corruption et lenteurs administratives, à une croissance faible attendue seulement à 1.2% selon nos prévisions en 2015, et surtout à la hausse inquiétante des prêts non performants dans le système bancaire national.
Sur le plan extérieur, les deux principaux risquent que nous identifions sont la vulnérabilité du Brésil à la politique monétaire américaine et les remous de l'activité mondiale. La semaine dernière nous a montré sur les places boursières à quel point la reprise sera compliquée et fragile.
Nous maintenons toutefois notre vision optimiste à court terme en cas de victoire de Neves. Le Bovespa pourrait connaître une hausse de 10% d'ici la fin de l'année, suivant l'exemple du marché boursier indien dans la foulée de l'élection du candidat pro-business Narendra Modi. Les gains les plus importants seraient à attendre du côté des entreprises ayant été les plus pénalisées par la gestion Rousseff, à savoir Vale, Petrobras, CEMIG et également Banco do Brasil.
A moyen et à long terme, le potentiel du Brésil reste indéniable mais dans un monde globalisé où l'incertitude domine, il faudra juger sur pièces les premières mesures économiques du nouveau président afin de savoir si le pays se dirige vers un rebond ou ne s'engouffre dans une période prolongée de faible croissance susceptible de nourrir les tensions sociales.