Pourquoi une hausse du taux directeur serait mortelle pour certains

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Par Simone Wapler Publié le 18 octobre 2016 à 5h00
Dette Mondiale Taux Directeur Hausse
@shutter - © Economie Matin
152 000 milliards $La dette mondiale pèse plus de 152 000 milliards de dollars.

Les emprunteurs en mal de refinancement ne peuvent supporter la moindre hausse de taux directeur. Le créditisme va-t-il mourir asphyxié sous la dette ou les banques centrales vont-elles trouver autre chose pour prolonger l’agonie ?

Que serait +0,25% sur les taux directeurs de la Fed en décembre ? Une évolution du taux directeur signifie simplement que pour créer de l’argent à partir de rien, pour accorder un nouveau prêt, les banques commerciales paieraient un tout petit peu plus cher.

Souvenons-nous que le créditisme, qui a remplacé le capitalisme en 1971, prétend que le crédit adossé à rien a la même valeur que le crédit adossé à l’épargne existante. Une telle chimère ne pouvait que plaire à tous les amateurs d’argent gratuit… et ils sont nombreux.

Sans surprise, quarante-cinq ans plus tard, le monde croule sous la dette — à tel point que même le FMI s’en est aperçu et s’en inquiète. La dette mondiale pèse maintenant 152 000 milliards de dollars, 2,25 fois la taille de l’économie mondiale. Une majeure partie de cette dette est libellée en dollar : la dette privée et publique des Etats-Unis en premier lieu et les emprunts de nombreux pays qui n’ont pas le privilège d’appartenir au très select club des émetteurs de devises de réserves, en deuxième lieu.

Si les prêts nouveaux se paient plus chers, qu’importe puisque finalement il y a déjà trop d’emprunts et de moins en moins d’amateurs, en dehors des Etats ? Le problème est en réalité celui du refinancement. Le monde est surendetté. Les consommateurs achètent des choses avec de l’argent qu’ils n’ont pas encore et des entrepreneurs ont investi dans des outils pour produire ces choses qui ne s’achètent qu’à crédit avec l’argent du futur. Pensez à l’automobile, à l’immobilier, aux téléphones subventionnés par les opérateurs…

Lorsque, en tant que chef d’entreprise, vous avez contracté un mauvais prêt, le retour sur investissement sur lequel vous comptiez tarde à se matérialiser, et vous avez du mal à rembourser intérêts et principal. Vous avez alors deux solutions : faire défaut ou vous refinancer. Le refinancement est un terme élégant pour dire que vous allez rembourser votre mauvais prêt en contractant un autre mauvais prêt. Lorsque les taux d’intérêt baissent, le refinancement est très facile. Vos intérêts vont diminuer, le retour sur investissement sera plus facile.

Mais lorsque les intérêts augmentent, votre enfumage se complique. Les charges de vos intérêts vont au contraire augmenter tandis que le retour sur investissement escompté s’éloigne toujours à cause de cette “croissance molle” dont parlent les journaux… Comment faire ? Voici un graphe qui présente (en bleu) la dette nette de 1 500 entreprises américaines au regard de leurs résultats (en rouge).

Vous pouvez constater qu’au fur et à mesure que la dette gonflait, les résultats diminuaient. Avec des taux en baisse, le refinancement n’était pas un problème, mais avec des taux en hausse ? Lorsque le refinancement n’est plus possible, il reste la faillite, cette horrible sanction du capitalisme que le créditisme prétend pouvoir ignorer.

A moins qu’il n’y ait de nouveaux QE, que les banques centrales rachètent encore plus de mauvaises créances. Lorsque les banques centrales auront 152 000 milliards de dollars de bilan, les gens se rueront-ils pour acheter de l’immobilier, des voitures, des téléphones et des gadgets à crédit ?

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Simone Wapler est directrice éditoriale des publications Agora, spécialisées dans les analyses et conseils financiers. Ingénieur de formation, elle a quitté les laboratoires pour les marchés financiers et vécu l'éclatement de la bulle internet. Grâce à son expertise, elle sert aujourd'hui, non pas la cause des multinationales ou des banquiers, mais celle des particuliers. Elle a publié "Pourquoi la France va faire faillite" (2012), "Comment l'État va faire main basse sur votre argent" (2013), "Pouvez-vous faire confiance à votre banque ?" (2014) et “La fabrique de pauvres” (2015) aux Éditions Ixelles.

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