Davantage centré sur les fondamentaux microéconomiques, le cycle de marché qui s'ouvre est une occasion bienvenue pour les authentiques gestions flexibles de faire valoir leurs dispositions.
Il est fort à parier que les douze à vingt-quatre prochains mois vont faire figure de challenge pour les gestionnaires d'actifs « flexibles », dont l'exposition aux différentes classes d'actifs varie librement en fonction des conditions de marchés et des convictions de l'équipe de gestion. Après un millésime boursier 2013 favorable à l'essentiel des classes d'actifs, qui ont surfé sur un marché de tendance pour progresser de concert (avec un haut niveau de corrélation), l'environnement est en train d'évoluer. Sensiblement. À la différence des trimestres précédents, la politique des banques centrales ne pourra plus constituer le seul et unique catalyseur des marchés. L'orientation désormais divergente des stratégies monétaires de part et d'autre de l'Atlantique – entre une Réserve Fédérale américaine qui a acté le retrait progressif de son dispositif d'assouplissement quantitatif, et une Banque Centrale Européenne qui opte pour plus d'expansionnisme monétaire – impose le retour à une lecture plus classique des fondamentaux de marché.
Premièrement, les conditions microéconomiques et la capacité des entreprises à générer des marges bénéficiaires robustes, c'est-à-dire en ligne avec les anticipations haussières, vont revenir au premier plan des facteurs déterminants pour l'appréciation des indices boursiers. Le rallye de l'année dernière s'est réalisé via un net rattrapage des niveaux de valorisation (hausse soutenue des PER), mais pas vraiment via une progression notable des résultats des entreprises. C'est ce deuxième aspect de l'équation qui est aujourd'hui vivement attendu par les investisseurs.
Deuxièmement, la classe d'actifs obligataire ne réitérera pas les performances qu'elle a délivrées ces derniers mois. Il existe de grandes chances pour que le resserrement monétaire américain impacte son profil rendement/risque, avec une hausse anticipée des taux longs. Amortir ces secousses va requérir une certaine habileté de la part des détenteurs d'obligations : ils devront adapter leur portefeuille à ces circonstances.
Troisièmement, la volatilité des marchés, relativement basse jusqu'à présent, devrait se réveiller. La nouvelle donne des politiques monétaires est de nature à stimuler les flux de capitaux et les arbitrages entre les classes d'actifs et entre les zones géographiques, des mouvements propices à un regain de volatilité. Qui plus est, plusieurs facteurs d'incertitude ont ressurgi : tensions géopolitiques en Ukraine, incertitudes sur la cohésion politique au sein de l'Union Européenne après les résultats des élections européennes, faible niveau d'inflation en zone euro. Assez étonnamment, ces risques ont, pour l'instant, relativement peu influencé les marchés. De tels « newsflows » pourraient logiquement susciter davantage de phases correctives et de réactions d'aversion au risque.
Le cycle qui s'ouvre est une occasion bienvenue pour les gérants d'actifs flexibles de faire valoir leurs dispositions et leur force de discernement. L'enjeu ? Performer dans un environnement de marché bien moins « unidirectionnel » et bien plus sensible aux variations, affranchi du confortable coussin que représentait le dopage monétaire assouvi par la FED. Les gestions flexibles vont devoir exploiter toute la latitude qui leur est possible de s'octroyer, pour positionner le curseur de leur exposition en proportion adéquate sur les quelques thèmes d'investissement « gagnants » (les nouvelles technologies, la distribution, la santé ou l'équipement automobile, recèlent de valeurs à la croissance intrinsèque prometteuse, mais dont les cours sont encore sous-évalués par les marchés), sans pour autant dégrader le risque de pertes en capital du portefeuille. La gestion active des positions, des couvertures et la sélection des titres vont redevenir les ingrédients déterminants pour générer de l'alpha, là où une simple gestion indicielle en actions complétée par des positions obligataires suffisait à procurer des plus-values conséquentes entre 2012 et 2013. En somme, il s'agit ni plus ni moins d'un « retour aux basiques » qui permettra aux investisseurs de différencier les authentiques stratégies flexibles, capables de générer un rendement positif en toutes circonstances, des stratégies qui n'en portent que le nom.