Caterpillar supprime 1400 emplois : la Belgique est sous le choc

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Par Jean-Yves Archer Publié le 4 mars 2013 à 5h00

La Belgique, et particulièrement la Wallonie sont sous le choc : le groupe Caterpillar vient d'annoncer une restructuration de son usine de Gosselies (Charleroi) : au total, 1400 licenciements ont été annoncés sur un effectif de 3700 personnes.

Chaque décision de restructuration est unique mais celle-ci semble emblématique à plus d'un titre.

Tout d'abord, le groupe Caterpillar est loin de traverser une mauvaise passe comme l'écrivait dès le 26 juillet 2012 Amaury Brelet : "Le groupe américain d’engins de construction Caterpillar a annoncé mercredi des profits record. Son chiffre d’affaires a progressé de 22 % par rapport au deuxième trimestre 2011 pour atteindre 17,374 milliards de dollars, tandis que le bénéfice net s’est envolé de 67 % à 1,699 milliard, un record historique. Les ventes du premier fabricant mondial ont augmenté en Amérique du Nord et dans la zone Asie-Pacifique, mais se sont contractées en Chine."

Cette prospérité est confirmée par d'autres sources plus récentes.

Dès lors, trois affirmations méritent d'être énoncées et une interrogation posée :

1) La situation de l'exploitation du Groupe ne justifie pas ces licenciements que certains qualifieraient de boursiers. En fait, ils ont pour origine une mise en concurrence assez aveugle entre les sites du Groupe et dans une telle perspective, l'Europe est souvent perdante.

2) Le total de bilan de Caterpillar a été augmenté de 6 milliards d'euros en un an, soit exactement la moitié de la masse salariale (charges comprises) de toute l'usine de Gosselies. Quant aux capitaux propres, ils ont cru de 3 milliards.

3) Si l'on analyse la situation, il convient de noter que le Groupe réalise près de 50 milliards de chiffre d'affaires pour près de 36 milliards de coûts des ventes, personnel inclus. Autrement dit, en croisant différentes sources, on relève que le poste salaires et charges représente environ 28 % du C.A. Si vous effectuez ce calcul chez LVMH en 2011, vous observerez que les frais de personnel représentent (4 milliards) là où les coûts des ventes est de 8,1 et les charges commerciales de 8,4. Autrement dit, ces deux derniers postes de charges sont dans un rapport de 1 à 4 avec les salaires "chargés".

Même remarque pour L'Air Liquide, les charges de personnel s'élevaient à 2,5 milliards à rapprocher des 8 milliards d'achats et assimilés. La même analyse peut être généralisée : quand les achats et autres représentent 50 % du montant H-T du C.A, les salaires et cotisations dépassent rarement 22 à 26 % dudit C.A.

Question : En 1987, l'ancien président de L'Oréal – le talentueux François Dalle et Jean Bounine – ont écrit un rapport intitulé "Pour développer l'emploi" dans lequel ils expliquaient nettement qu'une entreprise ce n'est pas seulement du capital et du travail mais aussi ce que l'on nomme le facteur résiduel, c'est à dire la qualité de l'organisation et l'efficience collective.

En Belgique, Caterpillar n'a-t-il pas uniquement scruté des états financiers basiques et omis d'intégrer des paramètres plus qualitatifs ?

Quand on voit le circuit des sous-traitants et intermédiaires de tous styles qui peuplent notre économie moderne (voir le chemin du cheval roumain dans le cas de Findus, etc), je prends le risque de penser qu'une remise à plat de ces circuits serait plus profitable que de passer le hachoir sur des bulletins de paye et des tranches de vie.

Il n'y a probablement pas d'autre solution que de fermer Aulnay pour PSA. Pour Caterpillar, la fermeture de Gosselies en dit long sur l'éthique des affaires et les conséquences de la financiarisation de l'économie.

L'ampleur limitée, en proportion des achats, du poste salaires doit inciter à une réflexion plus sincère et plus pertinente au plan sociétal.

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Jean-Yves Archer est énarque ( promotion Léonard de Vinci ), économiste et fondateur de Archer 58 Research : société de recherches économiques et sociales. Depuis octobre 2011, il est membre de l’Institut Français des Administrateurs (IFA).  

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