La France doit baisser de 5 points de PIB ses dépenses publiques

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Par Jean-Luc Ginder Publié le 6 juillet 2013 à 3h30

Nous savons que les ministères doivent économiser 5 milliards sur leurs dépenses structurelles. Et qu'il va falloir trouver aussi 6 milliards de ressources supplémentaires en matière fiscale pour compenser des revenus qui existaient en 2013 mais qui ont disparu en 2014. Malheureusement, je dirai que cela n'est que l'écume des choses. Au moment où j'écris, on ne sait pas, si pour boucler le budget de 2014, on aura besoin de 5, de 10, de 15 ou de 20 milliards d'euros. Je vais tenter de vous décrire les raisons de cette situation.

Une croissance plus faible que prévue

Premièrement, l'hypothèse gouvernementale de croissance française pour 2013 était de 0.8% et l'hypothèse de croissance pour 2014 était de 2%. On sait déjà que pour 2013, la croissance ne sera pas de 0.8% mais sera probablement proche de 0%. On sait déjà aussi que, en 2014, la croissance n'atteindra pas les 2% attendus (selon la commission européenne) mais 1.2%. C'est-à-dire qu'on a déjà perdu près de la moitié de la croissance espérée. Et, en perdant 1.5% de croissance, on perd 0.75% de recette fiscale soit environ 15 milliards. On ne sait pas quelle sera la croissance 2014 mais l'hypothèse la plus probable est autour de 1% et là, on est très loin de la prévision initiale du gouvernement.

Un déficit qui se creuse

Deuxièmement, quel est le niveau de déficit français négocié avec Bruxelles pour 2014 ? La France avait prévu un déficit de 3% en 2013 et 2.2% en 2014. On sait déjà qu'à la fin de cette année, il ne sera pas à 3% mais à 3.7% (selon la commission européenne) et la même commission indique que si rien n'est fait la France, en 2 014 , sera à 3.9%. Notons l'écart qu'il y a entre le 3.9% projeté par là CE et le 2.2% prévu par la France. Cela prouve qu'en termes budgétaires, l'Etat français est très loin du compte et en conséquence, ce ne sont plus 5 milliards qu'il faut prévoir mais beaucoup plus. En ne touchant à rien et en ne prenant pas, dès à présent, les mesures nécessaires, on démontre que l'on a pas pris, ni conscience, ni mesure, de la situation économique. Nous devons savoir que la France est en récession économique. Nous sommes depuis 6 ans à une croissance égale à 0. Le niveau de la richesse nationale est égal ou même inférieur au niveau de 2 008. Nous sommes dans une stagnation économique complète.

Donc si la richesse nationale est clairement au même niveau qu'il y a 5 ans et demi et que pendant ce même temps la population a augmenté, la richesse par habitant a diminué, nous nous trouvons dans une situation où nous nous appauvrissons globalement et où les dépenses continuent de croître.

Je prends ici la plume en toute simplicité pour lancer une motion d'alarme qui indique que dans le cadre du budget de 2014, la France doit réduire en urgence et sans détour ses dépenses en s'attaquant au caractère structurel du déficit, et qu'il va falloir trouver rapidement de nouvelles recettes fiscales. Mais tout ceci est et restera malheureusement trop insuffisant car ô combien trop tard.

Portons néanmoins notre regard vers l'avenir et posons-nous les bonnes questions

Quand faut-il prendre ces décisions douloureuses pour nous tous ? Et dans quelles limites ?

La zone euro est en récession. On apprend à l'école que lorsqu' une zone économique de l'importance de l'Europe est en récession et quand en plus, le moteur de la consommation et de l'investissement est en panne, la dernière chose à faire est de couper la dépense publique. Donc, a priori, la politique qui est menée en ce moment en Europe est une folie. Et pourtant, la France la suit. Pourquoi ? Comment la France pourra-t-elle sortir de ce piège ? Parce que la France a peur de la pression des marchés, parce qu'elle a pris des engagements vis-à-vis des partenaires européens, parce que, nous, Français avons perdu toute crédibilité au cours des 10 dernières années. En effet, nous avons pris régulièrement des engagements de baisse des dépenses, engagements que nous nous n'avons jamais tenus.

Alors la vraie question est de savoir comment restaurer la crédibilité de la France sans détruire ce qui reste de croissance et sans plonger l'ensemble de l'Europe dans une récession qui risque de durer 10 ans.

A mon avis, les termes de l'accord sont assez simples. Il faut que la France dise clairement haut et fort : voici les réformes structurelles que je vais entreprendre, voilà ce que cela va me rapporter par année, voilà comment je vais crédibiliser ma tendance à la décroissance, car il faut accepter de diminuer de 1 point de PIB par an le déficit que nous avons actuellement. L'effort de 2012-2013 a été trop violent car il a été réalisé essentiellement avec des hausses d'impôts et non pas avec des baisses de dépenses. Donc, ce qu'il faut à France aujourd'hui c'est de réussir à crédibiliser sa démarche et, si elle est encore capable de convaincre, en mettant en place des réformes structurelles qui vont permettre la décrue sur la moyenne durée de ses dépenses publiques. Alors, elle pourra négocier avec Bruxelles une moindre contrainte en matière de coupure dans les dépenses et là, une plus grande stimulation de la croissance.

On sait très bien ce qu' il faut faire, il n'est plus l'heure de débattre à l'infini. Si je prends l'exemple des régimes de retraite, il est évident qu'il n y a aucune raison pour qu'un régime de retraite soit en déficit. Cet exemple est simple à comprendre. Ou bien on adopte un système qui est un système de type suédois de comptes notionnels (plus simplement de compte à points) qui interdit le déficit, et qui oblige à l'équilibre par ajustement instantané, ou bien on affine le modèle français en ajoutant des trimestres de cotisations, on recule l'âge de départ à la retraite, on dégrade le mode d'indexation des pensions et on créé une clause d'équilibre automatique. Mais il n y a aucune raison qui justifie que le système soit en déficit.

Il est grand temps maintenant d'être sérieux et responsable : dire ce que l'on va faire, annoncer les effets produits année par année, indiquer la trajectoire de notre réduction des dépenses avec l'objectif simple de réduire la dépense de 5 points de PIB . C'est exactement ce que les Allemands ont instauré au début des années 2000 et leur dépense publique a été réduite de 5 points de PIB. Cela prouverait que la démarche est possible.

Pourtant, 10 ans de vache maigre nous attendent. On ne pourra que réduire les surcoûts et les déficits accumulés mais malheureusement en aucun cas on ne saura réduire la dette globale française qui elle, continuera d'augmenter.

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Jean-Luc Ginder est économiste et essayiste spécialiste de la macro économie ainsi que de l'économie de l'Energie. Il est l'auteur du livre « Phobiamanagement » mettant en avant les effets de la peur en économie et du livre « Réflexions Economiques » (Éditions Corps et Ame, février 2018).

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