Q1 : Les explications de François Fillon concernant l’emploi de sa femme vous ont-elles convaincu ?
- Sous total « oui » : 20 %
- Sous total « non » : 78 %
- NSP : 2 %
20% des Français interrogés se déclarent convaincus par les explications de François Fillon.
Voici 15 jours que l’attention médiatique autour de la campagne présidentielle est concentrée sur le feuilleton des « emplois Fillon ». Tous les experts judiciaires, politologues, éditorialistes ont été convoqués à la barre du tribunal médiatique pour témoigner des conséquences de l’affaire en matière politique et électorale. Il était donc normal à moins de 100 jours de l’élection présidentielle de demander aux Français s’ils ont été convaincus par les explications du candidat lors de la conférence de presse de lundi dernier à 16 heures.
Seules 20% des personnes interrogées se déclarent convaincues. On peut affirmer que ce chiffre de 20% est équivalent au socle électoral de la droite en France depuis plusieurs années. Il montre donc que François Fillon est à un niveau critique. Les optimistes diront qu’il se trouve au niveau minimal et qu’il ne pourra désormais que remonter. Les pessimistes affirmeront qu’il a eu raison d’affirmer lundi dernier que « c’est une nouvelle campagne électorale qui commence », car le favori incontesté et incontestable qu’il était est désormais relégué au simple rang de challenger. Sa dynamique de campagne a été brisée nette par les révélations du Canard Enchaîné et le traitement médiatique qui en a été fait.
Comment en est-il arrivé là ? Laissons le droit à la justice, la politique aux politologues et le traitement des informations aux journalistes et concentrons-nous sur les explications liées à la communication.
Ce mauvais résultat pour François Fillon s’explique sans doute par une double et grave erreur de communication de sa part.
- D’abord, la trop grande diète médiatique, observée entre le moment où il a été triomphalement désigné par les électeurs de la primaire de droite, ne lui a pas permis de mobiliser son électorat, ni même son camp autour de quelques idées fortes qui avaient été exprimées au moment de la primaire et qui auraient pu lancer sa campagne présidentielle. En réajustant sa position sur la réforme de la santé et en n’occupant pas l’espace médiatique sur les thèmes qui ont fait sa force pendant la primaire, il est apparu immédiatement affaibli et surtout peu entouré au moment du lancement de la polémique.
- Ensuite, en minimisant l’ampleur de la crise de communication induite par les révélations du Canard Enchaîné et en ne construisant pas un discours immédiatement homogène pour ses porte-paroles, il a lui-même contribué à alimenter et à faire durer la crise médiatique. De plus, les affirmations du Canard contredisent fortement l’image de probité et d’honnêteté que François Fillon a voulu incarner pendant la campagne des primaires. Cette rupture d’image a généré une émotion négative autour du candidat. En se référant, lors du JT de 20 heures de TF1, à un argumentaire juridique et donc technique, François Fillon s’est trompé de registre.
En effet, il existe une règle intangible en communication : il faut toujours répondre à l’émotion par de l’émotion. Le discours tenu lundi dernier en conférence de presse était plus enclin à répondre aux interrogations naturelles suscitées par les révélations du Canard. Après 10 jours de pilonnage médiatique intense, ce discours, certes adapté et réussi, est arrivé un peu tard pour permettre à Fillon d’espérer un meilleur score dans le sondage d’aujourd’hui.
La question qui se pose est désormais de savoir si François Fillon va sortir de la crise médiatique. La charge contre les médias, qui ne l’ont pas particulièrement épargné depuis 15 jours, a permis de remobiliser son camp derrière lui. Le sondage le montre. Pourra t-il faire campagne ? Pourra t-il aller sur le terrain en France sans être chahuté ?
Une bonne sortie de crise pour le candidat dans l'oeil du cyclone serait d’annoncer très vite des réformes structurelles sur la moralisation de la vie politique, ce qui permettrait de renouer avec la confiance de l’opinion publique. Cela passe bien entendu par la fin de la possibilité d'employer des proches pour les parlementaires, la fin du "verrou de Bercy" pour lever le contrôle politique sur la fraude fiscale, imaginer une politique de lutte contre la fraude aux finances publiques qui permette d'assurer la justice entre ceux qui payent leur contribution à la solidarité nationale et ceux qui trichent... Ce faisant, il proposerait de vrais thèmes de campagne, des thèmes de fond à même d’élever le débat et de lancer réellement la campagne présidentielle. La presse et les médias unanimes le laisseront ils faire ?
Q2 : Souhaitez-vous que Benoît Hamon, Jean-Luc Mélanchon et Yannick Jadot se rassemblent dans une candidature unique ?
- Sous total « oui » : 41 %
- Sous total « non » : 57 %
- NSP : 2 %
57% des Français interrogés sont défavorables au rassemblement de Hamon, Mélenchon et Jadot dans une candidature unique.
Si la campagne du candidat de la droite et du centre sorti vainqueur de la primaire est stoppée par les révélations médiatiques, la campagne du candidat de gauche se joue pour l’instant dans les arrière-cours des équipes de campagne des partis de gauche.
En effet, certains sondages ont montré que Benoît Hamon pouvait accéder au second tour de l’élection présidentielle sous certaines conditions.
Au moment où l’on écrit, seule une candidature unique de la gauche, qui n’a pas existé dans une élection présidentielle de la Vème République depuis la candidature de François Mitterrand en 1965, pourrait permettre à Hamon d’atteindre le second tour de l’élection. Les militants et sympathisants de gauche semblent l’avoir compris et sont 41% à souhaiter un tel attelage, 57% à le rejeter ce qui n’est pas un delta insurmontable sachant que ces courants idéologiques étaient irréconciliables il y a quelques semaines. La proximité programmatique et idéologique entre les trois représentants de la gauche explique probablement cette nécessité de rapprochement.
En communication, alors que nous sommes à seulement 75 jours du premier tour, la campagne présidentielle n’a pas réellement débuté. Les primaires de la droite et du centre, puis de la gauche ont obligé les deux principaux partis à choisir leur champion et à débattre de programmes et d’idées.
Il apparaît aujourd’hui, pour des motifs différents à droite et à gauche, que le temps du débat, pourtant indispensable à une élection présidentielle peine à redémarrer. Les deux candidats des partis traditionnels de gouvernement sont arrêtés. L’un pour cause judiciaire, l’autre pour cause de tractation interne.
Les autres candidats, Marine le Pen et Emmanuel Macron ne profitent pas encore de ce silence pour imposer leurs idées. Emmanuel Macron n’a pas encore révélé son programme et Marine le Pen n’a pas besoin de faire davantage pour caracoler en tête des intentions de vote au premier tour.
Cette situation appelle deux commentaires :
- Le premier porte sur l’organisation des primaires qui bouleversent finalement l’organisation des élections présidentielles en obligeant les candidats à se déclarer très tôt et à risquer de « brûler leurs vaisseaux » avant la campagne présidentielle. Dans un univers politique bi-partiste, les primaires pourraient être une solution satisfaisante de choix des candidats. Dans un univers où les candidatures se multiplient, elles sont plutôt un handicap pour les partis traditionnels.
- Le second porte sur l’absence de sujet de fond irriguant le débat public. Si on ne gagne pas une campagne avec un programme, celui qui impose le thème principal du débat est généralement vainqueur. De la « fracture sociale » au « travailler plus pour gagner plus », les exemples sont légions. Bien malin celui ou celle qui saura dire quel sera le thème de 2017. Cette absence manifeste d’idée directrice dans le débat politique nuit gravement à la bonne santé démocratique du pays.
Sondage exclusif TILDER/LCI/OpinionWay du 9 février 2017