Le nouveau diagnostic de performance énergétique (DPE) devra s’appuyer sur la loi Climat et Résilience et la Taxonomie européenne pour faire émerger la valeur verte sur l’ensemble du territoire. Pourtant, elle apparaît déjà sur certains marchés immobiliers très localisés, avec des écarts de prix très élevés entre les logements les mieux classés et ceux désormais considérés comme des passoires énergétiques.
Il nous a paru important de mettre en lumière ces marchés immobiliers sur lesquels la valeur verte émarge déjà, alors que nous constatons globalement une augmentation des mises en vente de +3% au niveau national de logement classés E, F et G sur SeLoger (entre les périodes de Septembre 2019 -> Octobre 2020 et Septembre 2020 -> Octobre 2021).
Nouveau DPE et caractéristique physique du logement
Et si la nouvelle version du diagnostic de performance énergétique (DPE), faisait enfin émerger la valeur verte des logements ? Rappelons que cette nouvelle version, qui a été mise à jour ce 1er novembre, s’appuie désormais « sur les caractéristiques physiques du logement comme le bâti, la qualité de l'isolation, le type de fenêtres ou le système de chauffage », explique une note publiée par l’Union des syndicats immobiliers (Unis) et la Fédération interprofessionnelle du diagnostic immobilier (Fidi).
Les investisseurs professionnels, moteurs du changement
Faire émerger la valeur verte, « est évidemment l’un des objectifs de l’ensemble de la stratégie gouvernementale en matière de rénovation énergétique », croit savoir Denis Morra, président d’AC Environnement, entreprise de diagnostic immobilier qui maille l’Hexagone avec ses 50 agences. Mais le processus sera long et surtout, « le DPE ne fera pas les choses seul », juge le professionnel.
Un avis partagé par Sabine Brunel, responsable du programme « Bâtiment décarboné » de l’Observatoire de l’immobilier durable (OID). « La loi Climat et Résilience fera bouger les choses en rendant indécent les logements étiquetés « G » en 2025, « F » en 2028 et « E » en 2034. » Mais selon elle, ce sont les investisseurs professionnels, c’est-à-dire les banques ou encore les assurances, qui achètent des logements en bloc, qui feront bouger les choses. Ces derniers devraient se montrer plus « regardants sur les étiquettes des habitations qu’ils acquièrent. Les établissements bancaires, qui financent les portefeuilles de logements, porteront une attention particulière à la performance des actifs à financer, puisqu’ils ne souhaiteront pas accompagner l’acquisition d’un produit à risque. »
La taxonomie européenne pour renforcer l'impact du DPE
Autre outil qui aidera le DPE à faire émerger la valeur verte : la taxonomie européenne. Il s’agit d’un système de classification unifié des activités économiques « qui doit permettre de déterminer si ces activités peuvent être considérées comme durables sur le plan environnemental », explique la Banque de France dans une note publiée en octobre 2021. Ce règlement européen, qui s’appliquera au 1er janvier 2022, demande aux principaux acteurs économiques – financiers et non financiers – de rendre compte de la proportion de leurs activités vertes.
L’objectif est de réorienter les investissements vers les activités favorables à la transition écologique. En 2020, entre 1 et 2% du chiffre d’affaires des entreprises cotées provenait d’activités vertes au sens de la taxonomie… De fait, la taxonomie « incitera les investisseurs professionnels à se positionner sur des logements étiquetés « A ». Le marché devrait accorder une prime aux logements les plus performants », assure Sabine Brunel. Par effet de ricochet, les particuliers investisseurs sanctionneront également les logements les moins bien notés, « parce qu’ils seront contraints par les mêmes procédures mises en œuvre par les établissements bancaires », poursuit-elle.
La valeur verte émerge déjà sur certains marchés immobiliers
Selon les données SeLoger, dans certain territoires, le marché immobilier sanctionne déjà les logements les moins bien notés ! Entre janvier 2021 et septembre 2021, le prix des biens classés « F » ont un prix moins élevés de 57 % que ceux classés « A » à Brest. À Nîmes, il faut compter 55 % de moins, -49 % pour un logement à Limoges et -41 % au Havre.
À Rouen, les logements les moins performants accusent une décote de -40 %. Dans le 13e arrondissement de Marseille, elle oscille autour de -38 %, de -37 % à Grenoble et de -36 % à Montpellier. Le marché immobilier toulonnais sanctionne les biens les moins performants à hauteur de -34 %, celui de Clermont-Ferrand de -33 % et celui du Mans de -32 %. Dans le 6e marseillais, les logements étiquetés F se vendent -22 % de moins que ceux étiquetés « A ». À Montreuil, l’écart de prix est de -20 % tout comme à Perpignan.
Concernant les logements étiquetés « G », les décotes peuvent être encore plus importantes par rapport à ceux classés « A ». C’est le cas par exemple au Havre, où l’écart de prix est de -54 %, ou encore, au 13e arrondissement de la Cité Phocéenne, avec - 43 %.