Parler de l’emploi au futur a-t-il un sens ?

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Par Jacques Martineau Publié le 15 avril 2017 à 5h00
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10 %Le taux de chômage en France est de 10 %.

On ne peut pas parler de « l’emploi au futur », sans prendre en compte une évolution profonde des mentalités. La mutation socio-économique des pays industrialisés au niveau européen et mondial est présente partout.

Elle influe et influencera nos comportements et nos habitudes (anticipées ou contraintes). Cette mutation touche l'ensemble des secteurs technologiques, scientifiques, sociaux et culturels, comme les domaines politiques, économiques et financiers. Dans le contexte actuel, les progrès sont d’autant plus importants que le numérique et la communication en changent la « donne » en permanence. C’est le besoin d’adaptation et d’anticipation qui prédomine.

Conséquences des changements à venir sur fond de crise

La crise de l'emploi et l'aggravation du chômage, mises en exergue par une conjoncture économique jusqu'ici défavorable et un manque de perspectives crédibles mobilisatrices, contribuent à détériorer le climat social, accentuant à terme le caractère dual de notre société. La morosité ambiante persistante, amplifiée par une perte progressive de confiance et d'espoir, masque de fait la désadaptation, voire les risques réels de rupture de notre société, face aux multiples changements en cours dont il est difficile de dire s'ils en sont la cause ou l'effet.

Les conséquences de tous ces changements, d'origine, de nature et d'amplitude différentes, ne sont pas toujours perçues à leur juste mesure quand on les analyse séparément. Leur nombre, leur fréquence, leur interactivité et leur complexité correspondent à l'amorce de profondes mutations de nos sociétés commerciales et industrielles. La France va devoir continuer à l'appréhender à sa façon, avec ses atouts et ses contraintes.

L'accélération relative de cette mutation, prévue par tous les économistes, est difficile à contrôler. Elle est autant liée aux progrès technologiques et numériques qu'à l'évolution des rapports de force dans une mondialisation des échanges et une interdépendance politique, sociale, économique et financière, croissante. Cette accélération surprend autant qu'elle dérange. Elle prend de cours l'ensemble des sociétés industrialisées au moment où, déjà en crise, celles-ci traversent une période de récession, à la recherche d'un nouvel équilibre planétaire.

L'élément nouveau, à n'en pas douter, c'est que l'ordre de grandeur de l'unité de temps qui caractérisait les périodes de transition d'un cycle de civilisation à un autre ne cesse de diminuer. Des origines de la civilisation égyptienne à nos jours, il a été réduit par un facteur 1000 ! Ce qui pouvait s'apprécier sur des périodes de plusieurs milliers d'années, l'est maintenant sur une échelle de temps de plus en plus courte, souvent bien inférieure à la dizaine d'années ! Cette tendance à l'accélération du raccourcissement des cycles de vie concerne tout autant les biens et les produits de grande consommation que les applications industrielles issues des progrès scientifiques et techniques. De la même façon, sur un plan sociologique, on constate une nouvelle forme de réactivité cyclique. Celle-ci se traduit, presqu'en temps réel, par des mouvements forts d'opinion et d'humeur, souvent associés à des nouveaux comportements qu'ils s'agissent des salariés, des consommateurs et des citoyens. De plus, ces comportements sont eux-mêmes très différenciés, suivant les générations, les genres et les catégories sociales.

Le travail et l’emploi : de nouveaux concepts…

C'est pourquoi le travail et l'emploi vont continuer à se modifier profondément dans leur forme, leur contenu et sur le fond, aussi dans leur concept, et ce, quels que soient le niveau et la durée d'un retour de la croissance. La référence au passé, à la croissance facile et au statuquo social, ne tient plus. La dimension sociale du travail est elle-même en pleine métamorphose. Elle est en train de prendre le pas sur le reste des priorités. Les modèles de développement et leurs formules toutes faites sont caduques. On ne réinvente pas la société, elle se bâtit elle-même, en s'adaptant, avec plus ou moins de fortune, à partir de ses atouts et de ses aspirations, en tirant partie au mieux de ses échecs. Cela ne se fait pas sans à-coups et sans heurts.

Au niveau de l'Hexagone, comme de nos autres partenaires des pays industrialisés, il n'y a pas forcément identité d'appréciation sur la perception et l'interprétation de ces changements multi facettes et disparates, encore moins sur les solutions. Lesquels constitueront à terme une rupture franche avec le passé ? Lesquels ne seront que des effets de mode ? Il n'est pas facile de le dire. Gérer en priorité leurs intérêts à court terme et les préserver à long terme aux conditions actuelles préoccupent davantage les Etats et les gouvernements que de se livrer à une hypothétique élucubration sur le futur. Et pourtant, ne serait-il pas urgent de penser et de réagir autrement, avec audace et détermination ? Ne faudrait-il pas tenter d'identifier, de quantifier et de qualifier la réalité, la durabilité, l'importance et les conséquences de ces changements ?

Anticiper pour gérer l’évolution continue d’une société de progrès

Cette évolution ne sera pas non plus sans conséquence sur les décisions et les réponses à apporter aux problèmes sensibles non résolus concernant la construction européenne et sa défense, le terrorisme, la situation au Proche-Orient et en Afrique, l'aide globale aux pays du tiers-monde, sans oublier aussi l'appréhension, au bon niveau, des risques écologiques liés à la protection permanente et indispensable de l'environnement.

En relation avec nos partenaires et concurrents, partout des interventions, des gestes et des engagements concrets doivent sceller ce qui peut n'apparaître encore aux yeux du grand public que comme une traduction politico-médiatique de l'évolution de notre société dans la mouvance d'un environnement complexe interdépendant. En résumé, qu’on le veuille ou non, il faudra savoir anticiper en permanence pour gérer l’évolution continue d’une société de progrès.

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Après un long parcours scientifique, en France et outre-Atlantique, Jacques Martineau occupe de multiples responsabilités opérationnelles au CEA/DAM. Il devient DRH dans un grand groupe informatique pendant 3 ans, avant de prendre ensuite la tête d'un organisme important de rapprochement recherche-entreprise en liaison avec le CNRS, le CEA et des grands groupes du secteur privé. Fondateur du Club Espace 21, il s'est intéressé aux problèmes de l'emploi avec différents entrepreneurs, industriels, syndicalistes et hommes politiques au plus haut niveau sur la libération de l'accès à l'activité pour tous. Il reçoit les insignes de chevalier de l'Ordre National du Mérite et pour l'ensemble de sa carrière, le ministère de la recherche le fera chevalier de la Légion d'Honneur.

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