Malgré les innombrables désordres ambiants (hier, le gouvernement s’est encore écharpé sur l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes), la loi Travail poursuit son petit bonhomme de chemin et rien n’exclut que son destin soit celui d’une « bonne loi ». C’est le miracle de notre époque, où le sens parait s’effilocher, mais où une sorte de pilotage automatique permet de maintenir encore debout, de-ci de-là, des îlots d’entendement.
Le paquet Badinter retiré
La commission des Affaires Sociales, qui examinait le texte, a pris une mesure radicale: elle a décidé de remplacer le « paquet Badinter » posant une longue liste de principes de base autour desquels le Code du travail devait être réécrit, par une commission de réécriture intégrant des experts. Faire et défaire… L’intérêt de la mesure est évidemment de supprimer la mention du droit à l’affirmation des convictions religieuses prévu par Badinter, et qui faisait polémique.
Décidément, la refonte du Code du Travail n’est pas pour demain.
La coupure des 11 heures stabilisée
Autre point acté en commission: la pause de 11 heures consécutives est rétablie par les députés. Il ne sera donc pas possible de fractionner ce temps, comme le projet de loi en ouvrait la possibilité. Cette évolution devrait donc largement couper l’herbe sous le pied des oppositions les plus fortes à la loi, qui mettaient notamment à cette mesure pour en dénoncer la félonie.
La mobilisation s’essouffle
Parallèlement, la journée de mardi a apporté une confirmation: la mobilisation contre la loi est en plein essoufflement. L’annonce par Jean-Claude Mailly d’un recours judiciaire contre la loi le laissait pressentir: les syndicats ne croient pas pouvoir obtenir le retrait du texte par des manifestations de rues. L’effort fourni jeudi dernier relevait donc plus du baroud d’honneur. Les « contestataires » ne peuvent donc plus compter que sur les amendements parlementaires pour combattre le projet du gouvernement, après avoir montré leur niveau de faiblesse.
De ce point de vue, Manuel Valls a remporté une victoire importante.
Les tractations ouvertes avec l’UNEF ce matin devraient finir de vider la contestation de sa substance, moyennant quelques amendements.
La Nuit Debout ne s’intéresse plus à la loi El-Khomri
Enfin, les « révolutionnaires » de la Nuit Debout ont constaté hier que la répression policière faisait régner la terreur et qu’il valait bien organiser des sit-in sans battre le pavé. Une grande partie des adeptes du mouvement propose de ne plus s’arrêter à la loi El-Khomri et de jeter les bases d’une nouvelle société. Plus rien ne devrait donc menacer la réforme de Valls.
Article écrit par Eric Verhaeghe pour son blog