L’or nous envoie un message sur la suite de la crise financière et tranche la question "déflation ou inflation".
Vous connaissez notre rengaine, cher lecteur : "quand tout le monde pense la même chose, personne ne pense". En ce moment, aux Publications Agora, nous réfléchissons encore plus que d’habitude car nous ne pensons pas la même chose. Allons-nous vers la déflation ou non, vers l’inflation ou non et quid de l’hyperinflation ? Beaucoup de nos décisions d’investissement dépendent de la réponse à ces questions.
Pour vous éviter un suspense insoutenable, je vous dirai que nous sommes en général d’accord sur l’issue probable et funeste de l’hyperinflation, même si l’instauration de la société sans cash peut éventuellement en retarder l’avènement. Nous divergeons donc surtout sur les chemins (pavés de bonnes intentions) menant à cet enfer. La route risque d’être longue et comme nous sommes incapables de prédire la date d’arrivée, nous devons nous organiser pour le voyage.
Attention, par "déflation", ne comprenez pas la baisse du prix du panier de la ménagère mais plutôt la baisse de la quantité de monnaie disponible. Or la monnaie d’aujourd’hui n’est que du crédit. Elle n’est adossée à aucune marchandise, rien de concret. Toute contraction du crédit équivaut donc à une réduction de la quantité de monnaie avec laquelle s’organise l’économie. Le crédit disponible diminue si les banques prêtent moins ou si des emprunteurs sont en défaut puisque dans ce cas des créances sont détruites. Votre épargne peut être détruite dans ce processus.
Les arguments du camp de la déflation?
De mauvais crédits ont été accordés en raison de la création monétaire et des prêteurs vont faire faillite, le vieillissement de la population des pays développés qui sont aussi très endettés conduit aussi à réduire la masse d’emprunts. Moins de crédit, donc moins de monnaie pour une même quantité de biens et de services, conduit à la déflation. Nous constatons à l’heure actuelle une telle déflation dans les matières premières, pétrole en tête. Mais tous ceux qui ont parié sur la déflation des actifs financiers depuis 2009 ont perdu des plumes. Récemment encore, le mois d’octobre et les promesses de Draghi ont vite fait oublier la terreur de la fin de l’été.
Les arguments du camp de l’inflation
?Les banques centrales et le FMI vont contrer la déflation par de l’inflation. La déflation s’accompagnerait d’une hausse des rendements et des taux des obligations car les prêteurs deviendraient méfiants. Or le niveau de surendettement ne le permet pas. Jim Rickards, par exemple, pense que le FMI va émettre sa super-monnaie-dette — les DTS — dès que le yuan sera adoubé "monnaie de réserve" aux côtés du dollar, du yen, de l’euro et de la livre sterling. La création de crédit augmentera le prix des actifs financiers (actions et obligations).
Les arguments du camp de l’hyperflation
?Les Etats trichent sur la hausse du coût de la vie. Ils tondent les épargnants par leur politique de taux zéro. Les citoyens vont le réaliser et vont vouloir fuir la monnaie et les actifs financiers dont la valeur a été soufflée par l’augmentation de la masse monétaire. Mais jusqu’à présent, les épargnants floués conservent leur épargne à taux zéro dans le système financier et on ne constate aucune fuite vers les actifs tangibles (or, matières premières, foncier).
Ce qui se voit et ce qui ne se voit pas…
?Nous ne prétendons pas, contrairement aux grands fonctionnaires planificateurs et omniscients, détenir la vérité. Comme dit l’économiste Bastiat, il y a ce qu’on voit et ce qui nous échappe encore. Nous voyons que le crédit émis par les banques centrales n’irrigue plus les investissements productifs capables de créer la richesse de demain. Bill Gross, ancienne star de la gestion obligataire, a une explication concernant ce point.
Les taux sont à presque zéro et la différence entre le crédit à court terme et le crédit à long terme n’est pas suffisante. Comme le temps ne vaut rien, le crédit se porte sur les actifs qui existent déjà, en fait monter les prix, mais oublie les investissements de long terme. Les gens épargnent plus pour compenser le moindre rendement mais cette épargne va dans de la dette d’Etat stérile. Ce que Bill Gross résume par : "le mauvais crédit chasse le bon", paraphrasant Oresme et Gresham selon lesquels "la mauvaise monnaie chasse la bonne".
L’or nous indique "déflation possible"…?
Autrefois, la monnaie était adossée à l’or. Le flic de la monnaie n’était pas les banques centrales mais la relique barbare. Le dollar était une devise de réserve et tout pays qui avait des dollars pouvait le convertir en or. Ce système dit de Bretton Woods a pris fin en 1971 lorsqu’il s’est avéré que les Etats-Unis ne pouvaient payer en or comme promis ceux qui leur renvoyaient leurs dollars.
Depuis cette date, la monnaie n’est donc que crédit… mais où est la police et que fait-elle ? Nous ne parlons évidemment pas des clowns corrompus à la tête des banques centrales mais d’une police honnête, au service de la propriété du peuple. Que dit l’or ?
Il y a trois façons d’évaluer l’or :
?– comme une obligation longue (à trente ans) à zéro coupon et indexée sur l’inflation?
– comme une matière première (or contre pétrole ou cuivre ou argent)
?– en termes de pouvoir d’achat (à la longue, une once d’or achète plus ou moins toujours la même chose : bien manufacturé, ration alimentaire, mètre carré d’immobilier ou d’hectare de terre)
Selon que vous preniez ces trois méthodes, l’or apparaît aujourd’hui comme surévalué de respectivement 33%, 62% ou 19%. Pourquoi diable des gens acceptent-ils donc de surpayer l’or ? Sont-ils fous ? Je ne pense pas que les millions de gens qui chaque jour négocient de l’or soient stupides, incapables de calculer, en état d’ébriété ou sous l’emprise d’une drogue. Je pense qu’ils s’achètent une assurance contre un effondrement du système financier par la déflation et non pas une assurance contre l’inflation. L’or n’est la dette de personne, voilà son charme discret : 0 risque de contrepartie.
Déflation avant hyperinflation par rejet de la monnaie-crédit manipulée par les banquiers centraux irresponsables. Ce que Bill Bonner résume par "Tokyo avant Buenos Aires".
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