Alors que l’arrêt de cinq réacteurs nucléaires supplémentaires suscite l'inquiétude (un tiers des réacteurs français sont, ou seront déconnectés du réseau pendant les prochaines semaines), l'électricien public a annoncé mi-octobre son intention de réaliser l'ensemble des vérifications demandées par l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) avant mi-janvier.
Le groupe EDF poursuit le passage en revue de ses installations nucléaires. Et lui donne à présent un calendrier. Dans un communiqué de presse en date du vendredi 21 octobre l’électricien tricolore a annoncé qu’il allait faire courir jusqu’à la mi-janvier la fermeture temporaire de cinq de ses réacteurs nucléaires. Conformément à la demande de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN), l’électricien français procède en effet à des essais complémentaires sur 18 réacteurs nucléaires, dont les fonds de générateurs de vapeur seraient défectueux. En cause : une « ségrégation de carbone » trop importante qui pourrait fragiliser l’acier dont ils sont composés et les rendre inaptes à supporter un choc thermique. L’anomalie avait été détectée l’an dernier, lors d’un contrôle de la cuve du futur réacteur EPR de Flamanville (Manche).
Pas de baisse de production nucléaire
En accord avec l'ASN, EDF a pris mi-octobre la décision d'effectuer les contrôles restants dans les plus brefs délais. L’idée étant de permettre la reprise d'activité des réacteurs concernés avant la période hivernale. Sur les 18 réacteurs pointés du doigt par le rapport de l'ASN, treize ont d'ores et déjà été analysés. L’électricien a d’ailleurs communiqué un dossier au gendarme du nucléaire le 7 octobre dernier, justifiant des bonnes conditions de sécurité et de sûreté des installations équipées de fonds JCFC – les pièces défectueuses ont été construites par l’usine française Creusot Forge et son partenaire japonais JCFC. Six d'entre elles ont été redémarrées et sept sont toujours en attente de validation auprès de l'autorité.
Quant aux « cinq derniers réacteurs actuellement en fonctionnement (Fessenheim 1, Gravelines 4, Tricastin 2 et 4 et Civaux 1) ils seront arrêtés pour vérifications dans un délai de trois mois », précise l'énergéticien dans un communiqué. Dans la nuit du 21 au 22 octobre, c’est l'unité de production numéro 4 de la centrale de Tricastin (Drôme) qui a été, comme prévue, mise à l'arrêt pour maintenance programmée. Le but : effectuer les analyses des générateurs de vapeur. Les périodes d'arrêts pour les quatre autres réacteurs, rendues publiques vendredi 21 octobre, s'étaleront entre le 10 décembre 2016 et le 15 janvier 2017.
Le fait qu’EDF ait informé très rapidement les marchés de l’électricité des périodes choisies n’est pas anodin. Le groupe souhaite avant tout rassurer sur la capacité du réseau électrique français à gérer ce genre de situation. Et, surtout, sur sa propre capacité à abreuver ledit réseau en électricité. Depuis l'annonce de ces nouveaux arrêts, beaucoup s’interrogent en effet sur un possible manque d'électricité dans les mois à venir. Or, l'énergéticien n'envisage pas pour l'instant de baisse de la production nucléaire et vient même de confirmer ses objectifs pour l'année 2016 (entre 380-390 TWh), ainsi que la fourchette de production pour l'année 2017 qui devrait s'établir à 390-400 TWh.
Marge de manœuvre confortable ?
D'autre part, si la baisse de production devait effectivement se prolonger, l'indisponibilité temporaire des réacteurs nucléaires, qui n'auront fourni en septembre « que » 72 % de la production électrique nationale, ne devrait menacer en rien la sécurité d'approvisionnement du pays. La diversité des moyens de production en France permet au groupe de combler une baisse de production éventuelle et d'assurer, en partenariat avec Réseau de Transport d'Électricité (RTE), la continuité du service. Dans son communiqué de presse du 21 octobre, EDF affirme être en contact régulier ce sur point avec RTE, qui est en charge d'assurer l'équilibre offre-demande d'électricité et la sécurité d'approvisionnement. Il lui fournit notamment de manière quotidienne les éléments de visibilité sur la production à venir.
« Si des tranches supplémentaires devaient être indisponibles, en prenant des hypothèses pénalisantes – vague de froid notamment –, on a encore des marges avant d'arriver à des situations potentielles de baisse de tension par exemple », explique dans les Echos le groupe EDF. En effet, si l'énergie nucléaire représente en moyenne les trois quarts de la production d'électricité nationale, le mix électrique français n'est pas figé et dispose d'une marge de manœuvre relativement confortable en cas d'indisponibilité de telle ou telle énergie. Les centrales hydroélectriques, les parcs solaire et éolien, ou en dernier recours les centrales thermiques, pourraient prendre le relais de manière temporaire en attendant la fin des contrôles et le rétablissement d'une production nucléaire régulière. Quoi qu’il arrive, les Français chauffés à l'électricité devraient donc passer l’hiver au chaud.