Nouveaux médias web et mobile : comme un air de déjà vu

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Par Thierry Le Gueut Modifié le 24 octobre 2012 à 4h30

La crise de la presse écrite s’accélère. Désormais tous les segments sont atteints, de la presse quotidienne nationale à la régionale, des magazines d’informations générale à la presse « people », en passant bien sûr, par la presse spécialisée. Pas l’once d’une éclaircie dans une industrie qui voit par ailleurs s’effondrer son système de diffusion, via les affres de Presstalis.

Dans une tribune publiée par Libération, ce Lundi 22 octobre, Adeline Hazan, Maire de Reims, en fait le cruel constat, lucide et documenté. Son plaidoyer pour la PQR ne souffre aucune critique. A ceci près…

A ceci prés que le diagnostic formulé est toujours le même depuis dix ans et qu’on peine à comprendre l’inertie des acteurs tant publics que privés. A ceci près qu’on ne saurait se satisfaire d’une aide directe ou indirecte de l’Etat d’un milliard d’euros sans que celle-ci ne soit conditionnée par une politique d’innovation dans un secteur qui n’aura même pas l’excuse de ne pas avoir vu venir les choses. Les politiques court termistes du début des années 2000 qui sacrifiaient la diversification à la rentabilité immédiate portent aujourd’hui leurs fruits avariés avec les conséquences économiques et sociales que l’on connait. Ou pas.. Tant cela se passe dans une relative indifférence générale et pour reprendre le dernier titre du défunt « Combat » : Silence, on coule.

Si je fais référence aujourd’hui à la crise de la « Vieille » presse, c’est que des signaux d’alerte commencent à arriver pour des entreprises qui ont fait fortune de leurs présences sur nos estimables PC. A commencer par la plus glorieuse d’entre elles, Google. Oh, bien sur, la chute de 6, 36 % du cours de l’action sur le mois écoulé n’a rien d’alarmant pour ce mastodonte du NASDAQ dont les trésors d’innovation ne sont plus à démontrer. Y compris, évidemment dans le mobile.


Mais on retiendra avec attention, l’analyse de Christian Parisot, analyste d’Aurel BGC. « Les annonceurs suivent l’audience qui se déplace de plus en plus vers le mobile et donc le prix de la publicité est moins cher que sur un PC. La pression sur les tarifs publicitaires est forte. Comme Facebook, l’audience des smartphones est difficile à monétiser pour Google ». Alors que les courbes de consultation commencent, ici ou là, à se croiser, dans les medias internet d’information comme de services. Sans que, bien sur, il n’en soit fait particulièrement mention, puisque le modèle de base est inscrit sur le WEB « classique », et non comme le souligne monsieur Parisot sur la téléphonie .

L’histoire se répèterait donc t-elle ?

A court terme, ce fichu court terme, non, bien sur. Dans l’offre medias, le Web/PC a non seulement encore de beaux jours devant lui, mais a des étapes de construction à encore réaliser. Il peine encore à trouver au bout de 15 ans un modèle économique stable dans le domaine de l’information par exemple. Aux deux bouts de la réflexion, Mediapart et Rue89, par exemple, assument des choix qui les amènent vers une stabilité de bon aloi, mais on peine à sentir ou va se construire le nécessaire 2° souffle. Les places éditoriales se forgent, mais le « canal historique » deviendra t il demain le « canal habituel » ? Ou, pour faire plus simple, sont-ce les bons tuyaux qui sont investis pour demain ?

A moyen terme, car évoquer le long terme devient dans ce pays une incongruité, on ne comprend pas l’inertie des acteurs de la communication (protagonistes, investisseurs, observateurs etc.)Tout le monde sait bien, non pas de façon fantasmée, mais dans les chiffres actuels, que la communication de demain passe par la téléphonie mobile. Faut- il rappeler les taux d’équipement ? Faut- il rappeler les consultations ? Faut- il rappeler les chiffres des applis ?


On a ce sentiment, lourd, une fois de plus, que l’on se contente de regarder passer les trains du progrès, alors que, comble du comble, l’ingénierie française en la matière, sur l’ensemble des données techniques et de créativité, dispose d’une avance évidente. Et que de toute évidence encore, l’investissement d’aujourd’hui sera la composante principale des postes de demain. Et on ne saurait que trop conseiller à Madame Fleur Pellerin de s’atteler à cette tache, avant que brevets, hommes, et tutti quanti ne choisissent d’autres voies pour réaliser ce qui se passera inévitablement dans les toutes prochaines années.

L’Histoire va plus vite. On peut le regretter, s’en lamenter, mais c’est ainsi. Le règne du Papier a duré, dans sa forme moderne, 170 ans. Avec des douleurs, des soubresauts, mais globalement en mètre étalon des chemins de communication d’époques successives. Avec une publicité globalement répartie équitablement avec les autres medias, et une aide des pouvoirs politiques et économiques pour qu’il en soit ainsi. (Il faudra bien un jour raconter l’histoire du Budget Renault dans la Presse quotidienne régionale…).

Le Papier, s’éteint, face, et là aussi on peu le regretter face à la pression de l’immédiateté, à la fausse gratuité, et aussi, à l’inconséquence de décideurs qui n’ont pas vu venir l’iirruption d’une nouvelle donne technologique, empêtrés qu’ils étaient dans des négociations avec le Livre CGT et/ou la rédaction de tarifs publicitaires abscons, basés sur des audiences en déclin qui devenaient soudain mirifiques. Dans cette brèche, il ne fut pas compliqué à des acteurs libres de toute contrainte de s’engouffrer. Ce fut le rôle des acteurs du Web de casser les codes d’autant plus facilement que les codes de production, soit n’existaient pas, soit étaient tellement differents de leur concurrence qu’ils ne posaient pas l’once d’un problème. D’où ces niveaux de tarifs publicitaires constamment revus à la baisse, dans un premier temps, puis, mécaniquement revus à la hausse dans une deuxième phase, histoire de maximiser les profits. Et peut etre de passer à autre chose.

Sauf que l’on ne voit pas cet autre chose se profiler de ces auteurs-là, contents d’avoir éreinté la concurrence historique à force de dumping, mais incapables de se remettre en cause, eux , par rapport à l’adversité qui vient. Et qui vient vite.

Car le règne du web/PC n’aura, somme toute, si tout va bien, duré que dix ans, auquel il convient d’ajouter les dix premières années de maturation. Alors, viendra, l’inéluctable phase du Mobile, outil autonome, individuel, et personnel, ciblé, aux couts de fonctionnement publicitaires construit sur un qualitatif précis et adapté, et non sur une masse d’individus agrégés quantitativement. Un marketing à la carte, au lieu d’un marketing de masse.

Ce sont les temps qui viennent, bien sur, mais ce sont des temps qui sont aussi déjà notre actualité. Avant que demain, et plus rapidement que l’on ne pense un autre substitut ne vienne s’interposer. Après le téléphone portable.

Mais en attendant, on n’en est pas encore là. Commençons par ce qui devrait etre le commencement.

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Thierry Le Gueut, vieux routier des médias (20 ans notamment au journal Le Monde) a été dans le civil dirigeant d'un club amateur pendant 17 ans, et est supporter de l'AS Saint Etienne et du Football Club de Rouen.

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