Une pétition de principe est un raisonnement qui revient à tenir pour admis ce qu’il s’agit de démontrer. Une théorie des prix construite sur une pétition de principe est irrecevable en science économique.
Beaucoup se demandent au moins une fois dans leur vie d’où viennent les niveaux de prix, et la plupart cèdent durablement à la tentation d’attribuer à l’offre et la demande une omnipotence qui, si elle existe, est à démontrer. Du côté de la littérature spécialisée court encore et encore le présupposé d’une cause unique des valeurs d’échange économique, c’est-à-dire des prix.
Malgré Ricardo qui a cherché du côté de la « valeur-travail », en corrigeant la version esquissée par Smith, et semble-t-il pour une bonne part à cause de l’interprétation artificieusement rationnelle que Marx a forgé de cette approche, le pendule est revenu vers son point de départ. Ce serait du côté de l’utilité et de la rareté que se trouveraient les réalités maîtresses de la détermination des valeurs d’échange marchand, autrement dit la bonne réponse à la question de la cherté. Des tonnes et des tonnes de thèses de doctorat n’y ont rien changé : l’omnipotence de l’offre et de la demande serait démontrée. Le tropisme vers l’explication moniste de la formation des prix continue à être académiquement actif.
De nombreuses formulations de la question de la cherté sont logiquement redoutables par ce qu’elles supposent. Postuler que les prix ont davantage en commun que d’être des valeurs d’échange économique expose à commettre une pétition de principe. On ne le répétera jamais trop tant que la spéculation intellectuelle s’y laissera prendre. Rien ne permet d’éliminer d’emblée que tous les prix n’aient en commun que d’être des valeurs d’échange économique, autrement dit des rapports de quantités de marchandises et de créances le plus commodément et usuellement exprimés dans une unité monétaire. Pour éviter d’exposer la théorie des prix à la faute de la pétition de principe, l’éventualité qu’en définitive il en aille ainsi doit rester ouverte tout au long de la l’élaboration théorique par collecte et croisement d’observations. Sauf, bien sûr, à mettre la main chemin faisant sur l’existence démontrable d’un déterminant unique de toutes les valeurs d’échange économique.
Admettre que la vie économique tende à être réglée par un principe moniste n’est recevable en science économique qu’après l’avoir démontré. En bonne méthode, l’existence ou non d’un déterminant commun à toutes les valeurs d'échange économique doit se déduire de l’étude de la formation normale des prix par catégorie de marchandise.