Standard Or contre Théorie Quantitative de la Monnaie

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Par Antal Fekete Modifié le 25 septembre 2014 à 13h43

L'erreur principale est la théorie quantitative de la monnaie (TQM). Elle n'est plus qu'une simple métaphore intelligente. Ce n'est pas une théorie valide, sauf, peut-être, dans le monde linéaire d'une économie de subsistance, sans surplus, où tout produit est immédiatement consommé. Mais notre monde est fortement non-linéaire, bien au delà de la portée d'un modèle linéaire.

Un examen plus détaillé de la nature non-linéaire du comportement de l'argent, et une réfutation décisive de la TQM devrait introduire le concept de la vitesse de circulation de l'argent. Le fait est que l'argent n'est pas unidimensionnel. C'est une entité à deux dimensions : en plus de sa quantité, il a aussi sa vitesse. Et souvent, sa vitesse est bien plus importante que sa quantité.

Un bon exemple est l'hyperinflation dans laquelle la vitesse de l'argent est extrêmement élevée et croissante, peu importe la quantité. Une erreur très commune est la croyance que l'hyperinflation est la même que l'augmentation exorbitante de la masse monétaire en circulation, ce qui provoque une hausse des prix, parfois violemment.

Mais le fait est que dans beaucoup de situations hyperinflationnistes on observe une pénurie d'argent. Le niveau des prix monte si vite que la planche à billets ne peut suivre le rythme. Il y a une limite physique à leur capacité de produire des billets de banque, alors qu'il n'y a pas de limite théorique à la vitesse de circulation que l'argent peut atteindre.

Un autre exemple où la vitesse est plus importante que la quantité est l'autre extrême, la déflation, dans laquelle la vitesse de circulation est très lente, et baisse progressivement. Là aussi, c'est une erreur commune que de croire que la déflation est la même que l'effondrement indésirable de la masse monétaire, provoquant une chute des prix, parfois brutale. Mais le fait est que dans beaucoup de scénarios déflationnistes, on observe une surabondance de l'argent grâce aux efforts conjoints de la banque centrale et du gouvernement de gonfler les prix. En dépit de cela, les prix continuent à baisser.

La Théorie Quantitative est assez impuissante face à ce phénomène, mais c'est précisément ça qui doit être compris si on veut contrôler la baisse des prix ou la hausse du chômage. Cet aperçu montre qu'il pourrait être inutile, voire ruineux pour le gouvernement et sa banque centrale d'injecter des billets pour gonfler la masse monétaire.

L'argent nouvellement créé ne cesse de s'accumuler dans les banques comme des réserves excédentaires ne servant pas à grand chose.
Les hommes d'affaires sont léthargiques et ne voient pas de possibilités de réaliser des profits grâce avec une extension de leur production ou en lançant de nouvelles entreprises. La faible vitesse de circulation de l'argent trahit également un manque de confiance des consommateurs qui rechignent à dépenser leur argent. C'est un symptôme de la stagnation économique.

Le problème est que les effets d'une augmentation du volume monétaire peut être plus que compensée par la baisse de la vitesse de son utilisation. Ce fut le cas aux États-Unis pendant la Grande Dépression des années 1930, lorsque le gouvernement, avec un programme de dépenses sans précédent, avait considérablement élargi le volume des billets, alors que leur vitesse de circulation ne cessait de baisser, et cela de plus en plus vite.

Ce sera probablement à nouveau le cas dans la Grande Crise financière actuelle. Il est fort possible, même probable, qu'en dépit de cette expansion sans précédent de la masse monétaire, la vitesse de circulation diminue, invalidant non seulement le stimulus, mais aggravant la déflation.


Dans un article récent intitulé Où Krugman s'est trompé, j'avais critiqué Paul Krugman pour avoir préconisé dans le New York Times ( article 1938 en 2010 ) une croissance explosive des dépenses gouvernementales, avec une enveloppe de 30.000 millions de dollars, et de monétiser les titres du Trésor par la Fed d'une même enveloppe, suggérant en plus que seuls de tels stimulus pourront sortir l'économie de sa léthargie.

Une perspective correcte sur l'Histoire nous montrera cependant qu'une telle « relance » pourrait être contre-productive : l'argent nouvellement créé n'irait que là où se trouve le plaisir des traders, à savoir le marché obligataire.
Les spéculateurs sont prêts à acheter tout papier, et en quantité, car ils ont la garantie qu'ils ne courent aucun risque de perdre de l'argent : ils peuvent vendre leurs obligations à la Fed et réaliser leurs bénéfices. La Fed n'a pas le choix : elle devra les acheter car c'est sa garantie pour soutenir les nouveaux billets qui sortiront de la Fed. Tout cela s'additionne pour une baisse des taux d'intérêts, aggravant la déflation.

L'erreur est Krugman est sa foi inébranlable dans la Théorie Quantitative de la Monnaie. Il assimile toute augmentation du volume monétaire à un stimulus positif pour l'économie : plus le volume a été gonflé, plus les effets sont bénéfiques. Mais il oublie complètement la vitesse de circulation, dont la baisse peut dépasser toute augmentation de la masse monétaire.

Cet aveuglement particulier pourrait causer beaucoup de tort à l'économie en plongeant le pays tout entier dans une profonde dépression. Un manque de compréhension de la vélocité de l'argent, et une insensibilité au danger d'une mauvaise réaction aux injections de doses massives de papier, caractérise l'approche des décideurs d'aujourd'hui. Il est révélateur que la phrase « Amorçage de la pompe » utilisée dans les années 1930 a été discrètement remplacée aujourd'hui par le « Assouplissement quantitatif », vide de sens, les deux désignant la planche à billets pour un stimulus illimité.

Ce qui suit est un extrait de l'article paru sur Gonzalo Lira du 7 septembre, intitulé Pourquoi Paul Krugman est un imbécile, ou une fraude, publié sur son site.

"Je ne tomberai pas dans le piège qui consiste à dire que Krugman plaide en faveur de la guerre mondiale totale afin de sauver l'économie américaine. En revanche, j'affirme catégoriquement que Krugman a fait une déclaration vraiment ignoble : ''Le déficit budgétaire a créé un boom économique [ dans les années d'après-guerre ] et l'expansion a jeté les bases d'une prospérité à long terme''.

Krugman est un imbécile, ou alors il déforme volontairement l'Histoire afin de vendre son bromure du – Dépensez ! – Dépensez ! – Dépensez ! comme un vendeur de foire essayant de convaincre un client de mauvaise humeur. Même avec une connaissance très limitée de l'Après-guerre, tout le monde sait qu'en 1945 le monde n'était qu'un tas de décombres et que seuls les États-Unis n'ont pas été touchés par les bombes et les mortiers. La prospérité que les US ont connue au cours des deux décennies après la Seconde Guerre mondiale n'avait rien à voir avec le déficit budgétaire, mais tout à voir avec le fait que c'était la seule nation industrialisée encore debout après 1945. Le reste du monde a été obligé d'acheter des produits américains parce qu'il n'y avait personne d'autre à qui acheter. Les déficits n'avaient rien à voir avec ça. Après avoir lu l'article de Krugman ''1938 en 2010'' je l'ai rayé de la carte avec mépris : dans son désir de vendre sa prescription politique, il a vendu son intégrité »

La vélocité de la monnaie en circulation n'est pas un concept facile, et il n'existe pas de moyen direct pour la mesurer. Les estimations pourraient être notoirement imprécises. Heureusement, on a un bon substitut : les débits sur les comptes bancaires, à savoir le montant total des chèques tirés sur les dépôts bancaires en un an. Là, la vitesse de l'argent peut être calculée en divisant les débits par les dépôts ; autre méthode, le nombre de fois où un billet de 1 $ est remis par an, ce qui revient au même.

Extrait du livre "Le retour au standard Or" traduit de l'anglais par Pierre Jovanovic

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Antal E. Fekete, né à Budapest en 1932, professeur de mathématiques et de statistiques à la Memorial University of Newfoundland (Canada) de 1958 à 1993, est un économiste partisan de l'étalon-or et critique de l'actuel système monétaire.

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