Jan Lachner, ingénieur aéronautique de 26 ans, s'est lancé dans un voyage à travers l’Europe pas comme les autres. Dans le cadre de son projet « Euro-jobs Project », ce franco-allemand a décidé de parcourir 33 pays afin d'y exercer 33 métiers en l'espace de 33 semaines. Pêcheur à Malte, employé dans un aquarium de requins au Royaume-Uni, gardien de zoo en Estonie, professeur de flamenco à Séville: ce périple de huit mois s'est achevé la semaine dernière en Italie. De retour en France, Jan Lachner revient sur cette expérience hors du commun.
JOL Press : Pourquoi vous êtes-vous lancé dans cette aventure ?
Jan Lachner: Je suis ingénieur aéronautique. C’est assez cloisonné comme métier. Une fois qu’on est dedans, on reste en général toute sa vie dans une même entreprise. J’en connais beaucoup dont c'est le cas. J’avais juste envie de voir ce qu’il y avait ailleurs, pas forcément pour changer de travail, mais pour avoir une ouverture et voir d’autres choses. Je suis curieux.
JOL Press : Quel est l’objectif ? Se mettre en danger et apprendre sur soi ?
Jan Lachner: La mise en danger finalement, c’est simplement de se trouver dans un milieu étranger - pas avec des gens que l'on ne connaît pas - et une langue qu’on ne comprend pas. Pour certaines personnes, cela peut représenter un danger, mais moi j’y suis allé avec joie. La mise en danger réside également dans le fait d’aller dans une entreprise, de ne pas connaître le métier et de vouloir quand même l'exercer. On m’accueilli et j'ai voulu donner quelque chose en retour même si je n'avais qu’une semaine pour le faire.
JOL Press : Peut-on vraiment apprendre un métier en une semaine ?
Jan Lachner: Oui. Il faut bien observer, apprendre vite et essayer de reproduire le mieux possible. C'est vrai pour les métiers manuels, mais pas seulement. J’ai, par exemple, été agent immobilier au Luxembourg, mais aussi business Development Assistant à Bratislava, en Slovaquie. Finalement, c’est beaucoup de bon sens, beaucoup d’adaptabilité et une aptitude à rentrer dans ses nouvelles fonctions rapidement. A travers cette expérience, je me suis rendu compte que l’on pouvait être très bon dans des domaines qui nous étaient jusque-là étrangers. Ce projet permet, d’ailleurs, d'envoyer un message à ceux qui ont passé leur vie dans la même entreprise - qui sont persuadés qu’ils ne peuvent exercer qu’un seul type de métier - et qui perdent leur emploi. Apprendre un nouveau métier c’est possible, même sans formation ! Mais c’est évidemment infiniment plus simple lorsque c’est un choix – comme dans mon cas – et non une contrainte imposée par l’extérieur.
JOL Press : Combien de temps de préparation nécessite un tel projet ?
Jan Lachner: Enormément de temps ! J’ai mis plus d’un an à organiser ce voyage. Mais, le plus difficile a été de trouver des sponsors…Trouver des entreprises a également été une tâche difficile pendant la phase de préparation. Une question difficle s'est imposée pour chaque pays : qu’est-ce que je veux faire comme métier ? Pendant mon périple, je savais quel travail j’allais effecteur trois jours avant d’arriver dans la ville. Parfois, j’arrivais dans un pays et je n’avais pas d’hébergement, mais j’avais un emploi. Heureusement, sur 33 semaines de voyage, je n’ai dormi que deux semaines à l’hôtel. Le reste du temps, je dormais chez l’habitant.
JOL Press : Comment avez-vous financé le projet si la recherche de sponsors n’a pas très bien marché ?
Jan Lachner: C’est bien là toute la difficulté du voyage. Si l'on a une équipe de 10 personnes qui se chargent de l'organisation ou si l'on a le budget, ou encore...du temps et bien, on peut faire pratiquement tout ce qu’on veut. Mais lorsqu' on a ni budget, ni temps, ni équipe de soutien, cela devient horriblement compliqué. J’ai essayé de faire au mieux.
JOL Press : Votre meilleur et pire souvenir ?
Jan Lachner: Je n’ai pas vraiment de mauvais souvenirs… A part peut-être mon expérience à Monaco que je n’ai pas trop appréciée. C’est une ambiance très « m’as-tu-vu » avec un étalement démesuré de richesses à coups de voitures de luxes et yacht de 50 mètres. Je trouve ça d’assez mauvais goût. J’étais commis de cuisine dans un restaurant et je ne partageais pas la philosophie des propriétaires, qui exploitaient leur stagiaires.
En ce qui concerne le meilleur souvenir, c’est très difficile…Comment comparer un travail d’employé plongeur dans un aquarium rempli de requins au Royaume-Uni avec les magnifiques paysages d’Islande où j’ai travaillé comme assistant dans un laboratoire de photographie ? J'ai rencontré des personnes toutes plus accueillantes les unes que les autres, que ce soit en Croatie, en Italie, en Lettonie ou au nord de la Finlande... En fait, on peut dire que j’ai 99,9% de bons souvenirs.
JOL Press : Allez-vous garder contact avec tous les gens que vous avez croisés pendant votre voyage ?
Jan Lachner: J’essaie. Je leur donne des nouvelles, dès que je peux, par email. Mais le nombre de personnes rencontrées pendant ce projet se compte en centaines, entre les employeurs, les gens avec lesquels j’ai travaillé, ceux qui m’ont hébergé. Cela fait du monde ! La semaine dernière, j’ai, par exemple, rendu visite à des gens que j’avais rencontrés l’année dernière lors de ma semaine croate.
JOL Press : Qu’est-ce que vous retirez de cette aventure ?
Jan Lachner: J’en tire deux enseignements principaux. D’une part, je me suis rendu compte que l'on était beaucoup plus flexible et adaptable qu’on ne le pense. Personne n’est « mono-tâche ». Deuxièmement, j’ai remarqué que, en tant qu’Européen, on était vraiment pas si différent les uns des autres. Il y a plus de différences au niveau des catégories socio-culturelles et socio-économiques qu'entre les pays.
JOL Press : Comment revient-on d’une expérience comme celle-ci ?
Jan Lachner: Je vais commencer par chercher un emploi. Et pas forcément dans l’aéronautique, cela peut-être autre chose. Cette expérience m’a permis de réaliser que je pouvais me débrouiller dans d’autres domaines.
Retrouvez les étapes du voyage de Jan Lachner sur Euro Jobs Project