Ambiance western au Medef en cette fin de mandat de Laurence Parisot. Les couteaux sont sortis et les patrons donnent aujourd'hui une image déplorable de leur organisation.
Au moment où la France s'enfonce dans la dépression, où le chômage bat un record historique, où la confiance dans la gouvernance s'est effondrée, l'organisation patronale française se fourvoie dans des querelles de pouvoirs complètement inutiles et vulgaires.
Laurence Parisot va réussir à rater sa sortie. La présidente du Medef dont le bilan a été fortement hypothéqué par la crise aurait voulu, après huit ans de mandat, en faire un troisième. Elle a donc entrepris de demander une modification des statuts. Mais son initiative a été plutôt mal accueillie.
Sauf coup de théâtre, elle ne devra pas obtenir de majorité pour se livrer à cet exercice. L'UIMM, (métallurgie), le BTP, la FNB (bâtiment) ont fait savoir qu'ils n'étaient pas partants. Le conseil exécutif qui se réunira jeudi pour statuer le fera mais à bulletin secret, ce qui est inhabituel. Ca veut dire que les membres ne seront pas obligés de s'expliquer sur leur vote. Or, la grande majorité des membres du conseil exécutif n'est pas favorable à ce que beaucoup appelle un petit arrangement personnel à Laurence Parisot.
Denis Kessler, qui avait jadis fait équipe avec Ernest-Antoine Sellières, ne mâche pas ses mots. Il considère que le patron des patrons est en mission temporaire, qu'un seul mandat suffit et que huit ans c'est déjà trop long. Denis Kessler dit tout haut ce que la plupart des patrons pensent tout bas. Ajoutant que ce qui se passe aujourd'hui nuit grandement à l'image et à la crédibilité du mouvement des entreprises.
Ce qui est grave dans cette affaire, ce n'est pas que Laurence Parisot soit ambitieuse. Après tout, c'est humain.
Ce qui est grave, c'est que cette ambition se résume à un poste de président et une voiture de fonction. Ce qui est grave, c'est que Laurence Parisot n'ai rien d'autre à dire que « si on lui refuse une réélection c'est aussi par misogynie ». La phrase de trop. Les chefs d'entreprise auraient mérité un autre argumentaire, une autre campagne, un autre programme.
Dans l'interview qu'elle a donné aux Échos cette semaine, les chefs d'entreprise n'ont rien retenu de son analyse de la situation économique, aucune lecture de la surfiscalisé, aucune proposition nouvelle sur la flexibilité et sur la défense des chefs d'entreprise.
Après l'avis des membres exécutif du Medef demain, il y aura, le 16 avril, une assemblée générale où seront examinés les éventuels changements de statuts. Uniquement si le comité émettait un avis favorable, ce qui est assez peu probable. S'il y a vote, il sera très serré selon l'entourage de Laurence Parisot qui considère avoir fait une bonne communication. Et c'est bien ce que lui reprochent beaucoup de patrons : « Que d' la com, rien que d' la com ! ».
En attendant, ses challengers se préparent... Fréderic Saint-Geours investi par le puissant syndicat de la métallurgie est convaincu d'être le meilleur, (si lui ne l'était pas qui le serait ?). Geoffroy Roux de Bézieux ne pense pas qu'il a des chances d'accéder à la présidence du MEDEF mais il pense qu'on aura besoin de lui.
Pierre Gattaz, lui ne dit strictement rien. Il voyage, visite des entreprises et travaille. En fait il n'a besoin de personne. Mieux, il fait croire qu'il a besoin de tout le monde et de ce fait, beaucoup pensent qu'il sera élu à une forte majorité. Comme son père dans les années Mitterrand, le fils est pour beaucoup « le right man at the right time ».
Il plait aux petits patrons de province et aux entreprises familiales et a su se faire accepter par ceux du CAC40. Les syndicats qui opèrent leur virage réformiste, y compris la CGT avec Thierry Lepaon pensent qu'ils pourraient trouver en Pierre Gattaz un interlocuteur dur mais crédible avec lequel ils pourraient dialoguer. Du côté du PS, on le connait bien. C'est lui le premier chef d'entreprise que François Hollande, président de la République avait visité.
Les patrons français ont toujours eu besoin d'un représentant qui a ses entrées à l'Élysée sans être courtisan et qui de ce fait, puisse négocier sans faiblesses des réformes plus libérales. En attendant il est urgent de trouver la fin du film pour affronter l'année 2013 qui sera sans doute l'une des plus mauvaises. Le western c'est bien, mais au cinéma.