Marchés de l’or : le jour où le grand carnage a commencé

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Par Charles Sannat Publié le 16 avril 2013 à 10h54

Les plus anciens sur le marché de l’or se souviennent des années 70 et 80.

C’est lors de cette décennie que les cours de l’or sont passés d’environ 35$ l’once (à l’époque où le dollar était encore convertible en or) à 850$ l’once lors de son plus haut en 1980. Après a suivi une période de plus de 20 ans avec un métal jaune passé aux oubliettes de la modernité monétaire. Il faudra attendre les attentats du 11 septembre pour voir l’or recommencer à briller.

Cette fois-ci c’est différent !
Non je plaisante, ceux qui me lisent savent à quel point je déteste cet argument stupide du « cette fois-ci c’est différent » destiné à faire avaler n’importe quoi et n’importe quel excès à des marchés en pleine « exubérance irrationnelle ». Non mes amis, cette fois-ci ce n’est pas différent.

Cette fois-ci c’est exactement pareil !
Ou presque… Encore une fois les plus anciens se souviendront, en ce qui me concerne j’étais trop jeune, mais après tout c’est à cela que servent les livres (un truc en papier que l’on utilisait dans l’ancien temps avant l’apparition du web 2.0 et de tous les appareils commençant par i-quelque chose).

Nous vivons donc en direct, une situation qui ressemble à s’y méprendre à celle du milieu des années 70.
L’or va passer de 35$ en 1971 à 195$ en 1974. Son cours va alors se stabiliser peu ou prou légèrement en dessous de ses plus hauts avant de connaitre une chute vertigineuse dès septembre 1975… pour redescendre jusqu’à 104$ fin aout 1976. Sur cette période l’once d’or va perdre presque 45% de sa valeur.

Fin de l’histoire, explosion de la bulle de l’or ? Non pas du tout, c’est au contraire le commencement de tout puisqu’en janvier 1980 l’once d’or atteindra le record historique de 850$ l’once, la valeur de celle-ci étant multipliée par 8 par rapport à ses plus bas de 1976. Cette fois-ci en 2013, les choses ne seront sans doute pas très différentes de ce qu’elles ont été en 1976.

La règle du TFF
Pour comprendre les marchés, un vieux briscard m’avait expliqué un jour qu’il fallait toujours se référer à la règle du TFF. TFF étant les initiales de Tendance, Flux, et Fondamentaux.
Pour le métal jaune, la tendance est baissière. Les flux sont vendeurs, mais les fondamentaux restent excellents. Cependant, des fondamentaux excellents ne suffisent jamais à faire la hausse d’une valeur. JAMAIS.

Comme en 1976, l’or voit son cours massacré et pourtant les fondamentaux restent bons. Cela veut dire tout simplement qu’encore une fois, nous sommes dans un moment de correction, aussi violente soit-elle mais pas dans l’explosion d’une bulle, car la bulle est sur la monnaie par sur l’or. Le rebond sera donc très violent et ce mouvement de baisse va permettre à certains de faire main basse sur de grosses quantités de métal jaune à prix bradé.

Que sait-on après ce massacre des cours ?
Comme je vous le disais hier, il y a certaines choses que l’on peut savoir. Par exemple sur le GLD l’un des gros tracker d’or physique les volumes de ventes sont de l’ordre de 5 à 6 fois des volumes normaux… il y a donc de gros dégagements sur les ETF de toutes sortes et ça c’est une excellente nouvelle.

Meril Lynch à la manœuvre ? On sait également que vendredi dernier la banque d’investissement américaine qui pour une fois n’est pas Goldman Sachs, a passé un ordre de vente à découvert de 6 milliards de dollars ce qui correspond à environ 4 millions d’onces soit tout de même 124 tonnes !

Bien sûr face à cet afflux brutal les cours ont décroché, ce qui a entraîné une succession de « stop loss », c’est-à-dire d’ordres préenregistrés de vente automatique dès que le cours atteint un niveau fixé à l’avance par le vendeur. Vous comprendrez qu’il est facile d’initier un fort mouvement de baisse et de provoquer des ventes automatiques en cascade si l’on dispose de suffisamment d’argent pour émettre un ordre très important au départ… le reste le marché s’en chargera tout seul.

On sait aussi, que le COMEX a vu son stock d’or physique plonger de 17% en 2013 à 286 tonnes, ce qui constitue son plus bas niveau depuis septembre 2009, mais ne correspond pas encore à une pénurie d’or physique. Disons que le COMEX venait de rentrer en zone rouge en ce qui concerne les stocks d’or disponibles.

On voit aussi que le pétrole poursuit sa baisse aujourd’hui et perd plus de 2% ce qui n’est pas anodin et montre également que les « marchés » anticipent un fort ralentissement de la croissance mondiale ce qui vient corroborer enfin les chiffres de la croissance chinoise… qui sont enfin moins bons que prévus.

Il se passe des choses !
Oui, se passe des choses, beaucoup de choses, mais finalement lorsque l’on y réfléchit il n’y a rien de sérieux qui puisse expliquer cette baisse énorme de l’or. RIEN.
On peut se tortiller dans tous les sens, pour le moment on ne peut pas apprécier convenablement la situation, ce qui n’empêche pas de se dire entre nous d’un air entendu « qu’il se passe des choses » !

La débancarisation générale a-t-elle commencée ?
Mon crédo depuis fin décembre 2012 est d’inciter nos lecteurs à se débancariser vite et bien et au maximum de ce qu’ils peuvent pour orienter leur patrimoine vers des actifs tangibles.
Je pense que la grande débancarisation générale vient de commencer, cela veut dire dans un premier temps qu’il y aura un afflux de « papier » et que tout cela va faire baisser les cours.
Une fois que tout le monde se sera débarrassé de tout ce papier alors, les choses sérieuses pourront commencer.

Je pense que cet effondrement de l’or et du pétrole cache tout autre chose qu’une simple spéculation. Il est fort possible, mais seul le temps nous le dira, que ce jour restera dans l’histoire financière comme le jour où le grand carnage a commencé.

Lorsque j’évoque ce grand carnage, je ne parle pas des cours de notre métal préféré, non je parle du début de l’effondrement de tout le système économico-financier dans lequel nous vivons.

La mer se retire avant un tsunami
Les marchés américains pourtant particulièrement haussiers ces derniers mois (sans que l’on sache trop pourquoi) ont terminé dans le rouge bien vif ce soir. Toutes les matières premières dévissent. Les Etats-Unis bien que l’on en parle pas sont tombés de la falaise fiscale. Le VIX qui est l’indice de la peur et de la volatilité vient de bondir de 45%! L’indice du fret maritime le Baltic Dry Index se maintient proche de ses plus bas historiques.

Le pétrole chute très lourdement. Enfin l’or s’effondre. Alors tout cela finalement ressemble à s’y méprendre à la mer qui se retire… avant l’arrivée du tsunami. La chute de l’or n’est que les prémisses de quelque chose de beaucoup plus gros et de beaucoup plus dévastateur. J’en veux pour preuve les toutes dernières déclarations d’Angela Merkel pour qui l’Allemagne « n’avait pas la force de mettre sur pied de nouvelles mesures de relance sans risquer d’y perdre la confiance dont elle jouit sur la scène internationale ».

Sauver juste ce qui peut l’être
Pour nos amis allemands (sans ironie cette fois), la messe est dite et tout le système va s’effondrer. Alors que sauver? Une seule chose. La monnaie. Sauver la monnaie et la confiance que l’on peut avoir en elle c’est rendre l’effondrement moins rude dans le sens où un minimum d’activité économique et d’échange pourront quand même subsister. Enfin, sauver la monnaie c’est se garder la possibilité dans un futur indéterminé de pouvoir repartir de l’avant ce qui n’est pas le cas lorsque toute confiance a disparu.

Vraisemblablement, l’Histoire sous vos yeux est en marche.

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Charles SANNAT est diplômé de l'Ecole Supérieure du Commerce Extérieur et du Centre d'Etudes Diplomatiques et Stratégiques. Il commence sa carrière en 1997 dans le secteur des nouvelles technologies comme consultant puis Manager au sein du Groupe Altran - Pôle Technologies de l’Information-(secteur banque/assurance). Il rejoint en 2006 BNP Paribas comme chargé d'affaires et intègre la Direction de la Recherche Economique d'AuCoffre.com en 2011. Il rédige quotidiennement Insolentiae, son nouveau blog disponible à l'adresse http://insolentiae.com Il enseigne l'économie dans plusieurs écoles de commerce parisiennes et écrit régulièrement des articles sur l'actualité économique.

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