Le marche de l’art contemporain bat tous les records !

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Par Philippe Herlin Publié le 31 octobre 2014 à 4h28

Alors que les stands de la Fiac sont à peine démontés, profitons-en pour faire un point sur le marché de l'art contemporain. Et justement, la société française Artprice, leader mondial de la compilation des résultats des ventes aux enchères, publie son rapport annuel.

Ces douze derniers mois (de juillet 2013 à juillet 2014) sont ceux de tous les records : l'enchère la plus élevée pour une œuvre contemporaine avec 38,8 millions d'euros (Balloon Dog de Jeff Koons), 13 œuvres vendus à plus de 10 millions d'euros, 179 œuvres vendues à plus d'un million d'euros. Jamais ces chiffres n'avaient été atteints. Depuis le ralentissement (mais sans krach contrairement aux bourses) des années 2009-2010, le marché est reparti à la hausse, aussi bien sur les prix que sur les volumes, qui pour ces derniers ont presque doublé.

Prenons encore un peu de recul : en 2002-2003, le marché de l'art contemporain dans les enchères se montait à 125 millions d'euros, aujourd'hui il pèse 1,5 milliard. Les 100 artistes les plus "rentables" génèrent 1 milliard d'euros par an contre 102 millions il y a dix ans.

Ce qui frappe dans ces chiffres c'est l'extrême concentration : les trois premiers artistes en termes de ventes sur 2013-2014 (Jean-Michel Basquiat, Jeff Koons, Christopher Wool) représentent à eux seuls 22% du marché de l'art contemporain (soit environ 400 millions d'euros) ! Un an d'enchère de ces trois signatures représente 100 fois les recettes annuelles de l'art contemporain au Japon ! Ces trois artistes possèdent des points communs : ils sont américains et donc portés par le marché le plus dynamique qui soit. Ils sont aussi soutenus par le marchand Larry Gagosian, à la tête d'un empire de 15 galeries à travers le monde (dont Paris), "le plus puissant aujourd'hui pour fabriquer l'élite du marché" comme l'indique le rapport. Ils sont aussi achetés par les plus grands collectionneurs (Bernard Arnault pour Basquiat, François Pinault pour Koons par exemple). Ce marché en "tête d'épingle", extrêmement concentré, concernant peu de personnes, peut se révéler très fragile en cas de retournement ou d'effet de mode...

On a parlé des Etats-Unis, mais la physionomie du marché de l'art contemporain reflète les rapports de force économiques puisque la Chine fait jeu égal avec la première puissance mondiale. Son artiste le plus connu, Zeng Fanzhi, a déjà signé une vente à plus de 10 millions d'euros. Les deux pays sont au coude à coude, la Chine ayant même pris l'avantage sur 2013-2014 avec 40% du marché mondial, devant les USA (38%). Vient ensuite Londres qui ferme le trio avec 15% de tête. Paris est quatrième avec... 2% des ventes.

Derrière ces records et ces artistes hypermédiatisés, il faut aussi comprendre que le marché de l'art contemporain devient également un marché de masse : 80% des lots sont accessibles pour moins de 5000 euros. Les ventes supérieures à 5000 euros ne concernent que 6% des œuvres, et celles supérieures à 1 million 0,3%. Même des artistes reconnus (Warhol, Bacon) sont accessibles à ces prix raisonnables, même s'il s'agit d'estampes numérotées et signées, mais qui "permettent d'accéder à une valeur sûre sans prendre de gros risques" comme l'affirme le rapport d'Artprice.

Le marché de l'art contemporain n'échappe évidemment pas aux logiques spéculatives, il est moins mature que celui d'avant-guerre et plus volatile prévient Artprice, cependant il offre de belles opportunités à l'amateur éclairé. Acheter une œuvre d'art c'est acheter un actif réel, c'est à dire un bien possédant une valeur intrinsèque, comme un bien immobilier ou de l'or. Son prix peut varier mais il a peu de chance de tomber à zéro comme l'action d'une société qui fait faillite (ou l'obligation d'un Etat qui fait défaut). Et puis il reste au moins le plaisir de profiter du tableau ou de la photographie que l'on a acquis ! Pour celui qui connaît, ou qui prend le temps de connaître, ce marché exigeant, l'art contemporain peut constituer une diversification intéressante de son patrimoine, sans négliger un risque par nature significatif.

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Philippe Herlin est économiste, Docteur en économie du Conservatoire National des Arts et Métiers, il a publié plusieurs ouvrages chez Eyrolles et rédige des chroniques hebdomadaires pour Goldbroker. Il écrit tous les vendredis un article sur l'art et la culture vus à travers l'économie, et intervient ponctuellement sur d'autres sujets. Son site : philippeherlin.com.

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