Et il se retrouvait dans ce salon, avec ce feu de bois qui crépitait et cet homme seul qui buvait son whisky, en regardant par sa fenêtre tomber la neige. L’homme paraissait triste et fatigué. Il se promenait sans but dans la pièce, allant de la fenêtre au feu.
De temps en temps, il replaçait une bûche, arrangeait le pare-feu.
Il pouvait avoir 50 ans, 55 peut-être.
Il semblait ne pas vouloir se fixer, sauf peut-être quand il sirotait son whisky, qu’il buvait à petites lampées, avec un plaisir évident. Il avait de bonnes raisons d’être las. C’était la nuit de Noël. Il était seul ce soir.
Il s’appelait Pierre, il était chef d’entreprise et la société qu’il dirigeait allait être vendue dans les jours à venir.
C’était une entreprise de roulements pour l’industrie.
Il tenait cette entreprise de son père qui la tenait également de son père. Et lui, il allait la perdre. La faute à qui ?
La faute aux grands groupes qui innovent sans cesse et cassent les prix !
La faute aux clients qui veulent payer toujours moins cher !
La faute aux concurrents qui ne respectent rien !
La faute aux partenaires qui transgressent les accords !
La faute aux salariés qui veulent toujours plus d’argent en travaillant moins d’heures !
La faute aux banquiers qui prêtent toujours moins d’argent en demandant plus de garanties !
La faute au…
Il pouvait faire une liste de raisons longue comme un jour sans pain.
Il les connaissait bien les raisons.
Il était fatigué.
Extrait du livre "Le Management du Père Noël" de Daniel Cissé