A quelques jours de l’élection présidentielle, les candidats doivent entendre les préoccupations des Français et s’engager à mettre en œuvre des solutions concrètes pour y répondre. Or, après le pouvoir d’achat, c’est le système de santé qui inquiète le plus nos compatriotes, et la crise sanitaire que nous traversons a démontré à la fois son importance et ses nombreuses failles.
Elle a aussi révélé l’impact d’une autre pandémie, que l’OMS qualifie de « mondiale » : l’obésité. Les chiffres sont accablants : le surpoids a été un facteur aggravant, et pire encore, mortel de la Covid, comme hélas bien d’autres pathologies. Nos gouvernants doivent prendre la mesure de l’ampleur du sujet de l’obésité qui constitue pour les décennies à venir l’un des enjeux majeurs de santé publique et s’engager à prendre enfin les décisions qui s’imposent : reconnaître l’obésité comme une pathologie et mettre en place un plan décennal interministériel global.
Rappelons ici que le droit à la protection de la santé, sans discrimination, est inaliénable et inscrit comme tel dans le code de la santé et la déclaration universelle sur la bioéthique et les droits de l’homme de l’Unesco : « Le droit fondamental à la protection de la santé doit être mis en œuvre par tous moyens disponibles au bénéfice de toute personne.(1)»; « Aucune personne ne peut faire l'objet de discriminations dans l'accès à la prévention ou aux soins.(2)» ; « Aucun individu ou groupe ne devrait être soumis, en violation de la dignité humaine, des droits de l’homme et des libertés fondamentales, à une discrimination ou à une stigmatisation pour quelque motif que ce soit.(3)».
Face à la maladie obésité. Le taux d’obésité en France ne cesse d’augmenter, en particulier chez les plus précaires. Aujourd’hui, ce sont plus de 8 M de personnes qui sont touchées, avec une relation directe sur l’état de santé, la qualité et l’espérance de vie. Selon l’OMS, d’ici 2030, une personne sur cinq sera touchée. Et l’obésité tue déjà 2,8 M de personnes au niveau mondial.
La crise de la Covid a été un électrochoc ! Ce sont les personnes en surpoids qui, après les personnes âgées, ont été les principales victimes de cette pandémie - près de 40 % des décès.
Changer de regard. Non, l’obésité n’est pas un choix de vie ! C’est une maladie chronique qui doit être considérée comme telle, avec ses 18 pathologies et même 19 avec les formes graves de la Covid. Le regard porté sur l’obésité tant d’un point de vue médical que sociétal doit radicalement changer. L’obésité doit être reconnue comme la maladie grave qu’elle est, pour qu’enfin les personnes qui en souffrent puissent bénéficier de l’écoute dont elles ont besoin et d’une prise en charge véritablement adaptée. C’est ainsi que l’on fera évoluer les mentalités vers davantage de bienveillance et surtout reculer discrimination et grossophobie.
L’Etat : un moteur indispensable ! La France, où il reste encore tant à faire, fait pourtant figure d’exemple pour d’autres pays de l’UE. Mais cette avance durement gagnée ne doit pas être perdue au fil des changements de gouvernements. Il est temps de considérer l’obésité comme une grande cause nationale et d'en faire l’objet d’un plan ambitieux de prévention et de prise en charge holistique, sous l’égide de l’Elysée ou du Premier ministre, qui impliquerait à parts égales les différents ministères concernés. Un plan global qui ferait bouger les lignes en matière d’alimentation, d’accompagnement psychologique et physique, d’exigences face à l’industrie agroalimentaire, d’urbanisation pour encourager la pratique du sport etc. Une démarche qui implique également que les professionnels de santé puissent bénéficier dès leur cursus initial, d’une formation dédiée grâce à laquelle ils seront en mesure d’accompagner les patients souffrant d’obésité, au plus près de leurs besoins, et de dispenser une prise en charge adaptée à leurs pluri-pathologies.
C’est à cette condition seulement que nous pourrons enrayer les courbes exponentielles de l’obésité. La France a aujourd’hui une avance durement acquise que nous ne pouvons pas perdre. Il faut continuer d’avancer !
1 Code de la santé publique, art. L. 1110-1.
2 Code de la santé publique, art. L. 1110-3.
3 Déclaration universelle sur la bioéthique et les droits de l’homme, art. 11, Unesco, 19 octobre 2005, https://fr.unesco.org/themes/%C3%A9thique-sciences-technologies/bioethique-droits-humains