Tribune de Jérôme DUBUS, conseiller de Paris (LaREM).
L’Europe, c’est d’abord un souffle, une évocation fertilisatrice, une inspiration bâtisseuse, portée par 2 000 ans d’Histoire et vouée à se poursuivre les 2000 ans à venir. L’Europe, c’est aussi une unité de civilisation car, à travers les siècles, elle a rassemblé les peuples de l’Atlantique à l’Oural, dans les tragédies les plus sombres comme dans les triomphes les plus glorieux. L’Europe, c’est également le continent des Droits de l’Homme et de la flamme démocratique, car ceux-ci constituent sa philosophie consubstantielle et son ambition la plus invariable. L’Europe, enfin, c’est une réalité multiple d’institutions, de territoires, de traités, de cultures, voire d’imaginaires collectifs, mais aussi et avant tout autre chose, d’individus libres et égaux. Ainsi Jean MONNET définissait le rêve confédéral : « Nous ne coalisons pas des États, nous unissons des hommes. »
2ème PIB mondial, l’Union Européenne, enfant de ce rêve partagée, a su consacrer la réémergence d’un continent que d’aucuns auraient dit fini au terme de deux Guerres Mondiales mortifères et fratricides. A l’heure où les tensions internationales, économiques comme diplomatiques, resurgissent après quelques décennies de calme relatif, elle doit être notre espoir et notre horizon. Oui, dans un contexte mû par les ambitions dévorantes des géants asiatiques, l’indifférence américaine, l’urgence climatique, un impérialisme russe revigoré et l’émergence de nouvelles puissances, étatiques mais aussi boursières, l’Union s’impose, plus que jamais, comme la seule échelle de réflexion pragmatique et efficace.
Or, c’est au cœur de ce changement de paradigme international que ses mécaniques cruciales ont choisi de s’enrayer. Percées des populismes rouges et bruns, réapparition des discours indépendantistes, évidente désunion sur l’enjeu migratoire… Tous nous approchent un peu plus du précipice, mais nul ne l’aura fait autant que le feuilleton du Brexit qui, sans cesse repoussé, aura tant fracturé la scène politique britannique qu’éventer les mensonges des eurosceptiques et aurait pu sonner le glas de nos ambitions partagées. Aujourd’hui seul compte l’extinction de ces foyers de discorde et l’annonce d’une profonde refonte de notre projet européen. Bref, sachons faire de cette crise le tournant délibéré de notre Renaissance collective.
Emmanuel MACRON a parfaitement appréhendé cette impérieuse nécessité et aura eu le courage de la placer au cœur de son logiciel idéologique. Plus de liberté, plus de protection et plus de progrès économique : voici ce qu’attendent les Européens de la réforme de leurs institutions, une réforme qui alors ne saura être portée qu’avec l’énergie et avec l’audace que l’on connait au Président de la République.
La liberté tout d’abord, car, plus que jamais, préserver l’unité européenne passera par la défense de nos processus électoraux contre les manipulations et ingérences extérieures. Aussi faudra-t-il créer une Agence Européenne de Protection des Démocraties et, à l’échelle de l’Union, interdire le financement des partis politiques par des puissances étrangères. De même, la protection des intérêts de notre continent devra être renforcée, car l’assurance d’une juste concurrence ne saurait être plus longtemps un tabou ! Sanctionnons les entreprises qui portent atteinte à nos intérêts stratégiques et nos valeurs essentielles ! Assumons dans nos marchés publics une préférence européenne ! N’ayons pas honte de mettre en œuvre une police des frontières communes et un office européen de l'asile ! Consolidons l’Euro pour en faire une véritable monnaie de réserve internationale ! Enfin et évidemment, renouons avec l’idéal de progrès qui transcende, depuis l’Antiquité gréco-romaine, l’Histoire de notre civilisation. Que ce soit par la création d’une Banque Européenne du Climat, la supervision des grandes plateformes ou la signature d’un pacte d'avenir avec l'Afrique, osons redevenir moteur du progrès technique comme social et reprendre cette place de leader qui nous aura trop longtemps échappé.
En somme, ayons à nouveau le courage de défendre nos valeurs européennes. Il ne s’agit pas de renoncer à notre souveraineté, comme aiment à l’insinuer Mme Le Pen ou M. Mélenchon. Il s’agit simplement d’embrasser la modernité de l’esprit européen, de le remettre au service de tous les habitants de l’Union, d’assurer que notre réussite collective serve réellement à chacun. Bref, pour paraphraser Paul VALERY, ce qui est en jeu aujourd’hui, c’est de savoir si, pour les décennies à venir, l’Europe sera simplement un petit cap du continent asiatique ou au contraire restera « la partie précieuse du monde. »