La lourde tache qui attend Emmanuel Macron sur le travail indépendant

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Par Grégoire Leclercq Publié le 9 mai 2017 à 13h52
Travail Maison Independant Reforme Macron President
cc/pixabay - © Economie Matin
23%23 % des affiliés au RSI comptent changer de statut en 2017.

Le chantier qui attend le président de la République sur le travail indépendant est colossal. C’est sans doute une des priorités. A lui de donner le choc de confiance attendu par le secteur, pour véritablement remettre la France en marche, économiquement et moralement.

Il faut l’avouer, le bilan rendu par son prédécesseur n’est pas brillant : baisse massive des inscriptions au régime auto-entrepreneur, complexification des démarches administratives, perte de confiance des Français dans les dispositifs de création d’activité, persistance d’un galimatias indescriptible de régimes, statuts, dérogations, exceptions, exclusions, clauses et autres inepties juridiques, évolutions lentes et mais visiblement pas salutaires du RSI…

Ce n’est donc rien de dire qu’il faut remettre la France en marche, mais il faut le faire rapidement ! Par exemple, les discussions pour faire émerger la Loi Pinel ont pris deux ans et demi ; les aménagements de la Loi Sapin 2 ne sont toujours pas publiés intégralement dans les décrets ; l’article 60 de la Loi Travail qui améliore la protection des indépendants affiliés à une plateforme n’a pas encore de décret finalisé.

Pourtant, il y a urgence à massifier, élargir et éclaircir l’exercice du travail indépendant. L’économie collaborative émerge, le travail freelance ne cesse de se développer. Cette dynamique de l’économie des services à la demande et des plateformes digitales, entretient un essor exponentiel. Elle exigera très vite une clarification, tant sur les qualifications que sur les régimes ou sur la potentielle situation de salariat déguisé. C’est la condition indispensable à l’émergence de tout un pan de la French Tech, orienté vers l’économie de plateformes.

Le chantier technique n’est pas à minimiser, tant il est ample : simplification administrative, réflexions sur les qualifications professionnelles, refonte de la protection sociale, création d’un droit au chômage, clarification de la fiscalité et en particulier de la CFE, remise à plat juridique des conditions de requalification, responsabilité sociale des plateformes, mise en œuvre des tiers de confiance… Ce chantier est d’autant plus complexe qu’il implique de nombreux acteurs divers, relevant chacun de ministères ou de directions centrales différentes, et par définition ne partageant pas le même calendrier, les mêmes priorités, les mêmes contraintes.

Mais ce qu’il faut bien comprendre, c’est que cette révolution des modes de travail est tout sauf technique. Elle est un formidable levier politique dans un quinquennat qui sera scruté à l'aune de ses résultats sur le chômage ! Qui dit travail indépendant dit levier d’insertion, dit rebondissement professionnel, dit lutte contre le travail au noir, préférence pour l’activité plutôt que pour l’assistanat, levier de croissance bien évidemment… Qui dit assouplissement du code du Travail dit nécessairement, par effet de bord, montée en charge des modes de travail alternatifs (freelance, portage salarial, contrats d’usage, assimilés salariés). On mesure l’esprit de synthèse et d’apaisement qu’il faudra déployer pour éviter l’affrontement stérile des tenants du salariat exclusif contre les défenseurs d’une indépendance excessive.

De même qu’il faudra unir la grande famille des indépendants autour d’intérêts communs et partagés, pour éviter là encore les éternels conflits. Certes, les indépendants ne se ressemblent pas tous. De l’auto-entrepreneur prestataire de services informatiques, au VTC en SASU, en passant par le coiffeur de quartier et le patron de l’entreprise générale du bâtiment, employeur de 3 salariés, il y a un monde. Un monde disparate, où l’hétérogénéité des métiers, des qualifications, des histoires, des organisations syndicales, des tailles d’entreprises et des régimes n’aide pas à une vision globale du sujet.

Pour y arriver, je ne vois pas de solution miracle. Mais je sais qu’il faut :

  • Une conviction forte et constante : nous nous noyons dans la complexification, et nous devons en sortir ;
  • Un objectif précis : mieux protéger les entrepreneurs des accidents de la vie et s’adapter aux carrières morcelées que nous vivons tous ;
  • Du courage pour tenir face aux multiples groupes de pression qui ne tarderont pas à hérisser tous les obstacles possibles ;
  • Des mesures rapides et efficaces dès la première année : hausse des plafonds du régime de l’auto-entreprise, bénéfice élargi à tous les indépendants du dispositif Madelin, auto-liquidation des cotisations au RSI. Ces trois mesures redonneront un signal fort et rassembleur.

Monsieur le Président, bonne chance pour ce chantier d’avenir. Il est passionnant et engageant, il impacte aujourd’hui 6 à 8 millions de Français, 15 millions demain. Ils comptent sur vous !

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Gregoire Leclercq 800x533

Grégoire Leclercq, 38 ans, (Saint Cyr, master en Droit Pénal, MBA d’HEC Paris) a rempli diverses fonctions de commandement au sein d’une unité de Gendarmerie de Montagne avant de rejoindre le monde civil comme directeur de la relation client chez EBP Informatique en 2010, puis Directeur général délégué en 2018. Engagé dans la défense du travail indépendant, auteur de plusieurs ouvrages sur le sujet, il est également membre du board de plusieurs startups dans le monde IT. 

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