Le président s’est exprimé après le grand débat national. Ce grand remue-méninge national, ou brainstorming si l’on préfère, faisant lui-même suite à une crise sans précédent, nommée mouvement des Gilets jaunes.
Répondre à tous avec des paroles pour chacun : quel scénario !
A quelques encablures du début du festival de Cannes 2019, c’est à un véritable défilé d’acteurs que nous avons eu droit depuis jeudi 25 avril.
Qu’a donc dit le président pour déclencher autant de critiques ? Après une première salve de mesures annoncées en fin d’année dernière, pour un montant de plus de dix milliards d’euros, une seconde vient de s’ajouter pour plus de la moitié de la première, amenant l’ensemble à près de quinze milliards d’euros d’allègements, de réévaluation et autres défiscalisation.
Bien sûr, le mouvement des « gilets jaunes » étant disparate au possible : de la famille monoparentale qui ne s’en sort pas à certains patrons qui se plaignent du trop-plein de charges, contenter l’ensemble des français qui s’estiment sous-payés ou pas assez valorisés dans leur activité, et ce à juste titre, tenait de la magie ! Des thèmes centraux ont beaux avoir émergé tels la justice fiscale ou la volonté d’une démocratie plus inclusive, vouloir répondre à chacun avec un discours pour tous semblait impossible.
Ainsi, l’exercice un temps reporté pour cause d’incendie de Notre-Dame de Paris, relevait du « casse-gueule » politique de première. Les acteurs du Paysage Politique Français avaient tous appris leurs réponses par cœur ; du « ce n’est pas suffisant » au « cela ne règle pas la question » ou encore « il n’est pas à la hauteur ». Sera-ce suffisant pour prétendre à la palme du meilleur acteur politique de l’année ? Certainement pas ! Comme toujours, la peur de reconnaître telle ou telle mesure comme potentiellement efficace à quelques semaines d’élections intermédiaires a rendu tous ces apprentis politiques en lice pour les élections européennes chantre d’une mauvaise foi finalement pas surprenante.
L'ENA ce vrai faux épouvantail
Non, ce n’était ni nul ni qu’un exercice de communication. Toutefois, tout n’a pas été développé.
La mesure qui était la plus surprenante était la suppression de l’Ecole Nationale d’Administration. L’ENA : ses promotions, son entre soi, son classement final…. La fameuse école repoussoir pour beaucoup d’hommes et de femmes politiques est-elle l’un des principaux maux de notre pays ? Car posons-nous la question un instant : il apparaît légitime à chacun fan de sport : football, rugby ou basket de sélectionner les meilleurs joueurs pour constituer l’élite d’une discipline ; il apparait non moins légitime de nommer à leur tête un sportif confirmé : tant sur le passé sportif que sur le banc (le rugby et la FFR n’y déroge pas en ce moment même !) et ce qui vaudrait dans le sport professionnel ou autre ne vaudrait pas dans la vie citoyenne ? Je suis désolé, mais pour mener des actions macroéconomiques, géopolitiques ou d’envergure, je ne souhaite pas que de simples citoyens tirés au sort soient décisionnaires. Non ! Comme en foot on ne tirerait pas au sort l’attaquant de l’équipe de France ou son trois-quart centre, ou son pivot, on ne peut s’en remettre au « sort ». Citoyens égaux en droits et devoirs oui ! Citoyens égaux en capacités non ! A chacun son domaine de compétence !
Pour cette école, revoir le mode d’éducation, pourquoi pas….mais même sur ce sujet suis-je compétent ? Non.
J’appréciais cette forme de mobilisation née en novembre, faisant fi de l’origine, du statut social, économique… Aujourd’hui, ces mêmes manifestants rassemblent au mieux un petit stade de foot de province …sur le territoire ! Et quasi 24 heures de rang sur chaque chaîne info. De sombres populistes ont pris un certain ascendant médiatique. Mais le malaise est autre part.
De vraies réponses aux bonnes questions
Les mesures concernant la baisse d’impôts sur les classes moyennes et la ré indexation des retraites de moins de deux milles euros ont cependant reçu un avis très favorables d’après un sondage réalisé auprès de 1010 personnes entre vendredi 26 et lundi 29 avril, par YouGov. 78 % des sondés approuvent ces deux mesures sans réserve.
En même temps que ces mesures pour booster le pouvoir d’achat sont amenées, un autre chantier sur la « dépendance » et, plus globalement, le vieillissement de la population de notre pays va entraîner de nouvelles dépenses publiques. Comment dans un avenir proche concilier ces charges ?
Emmanuel Macron a certes fait comprendre que la lutte contre l’évasion fiscale allait être accrue, et Edouard Philippe en a même annoncé le calendrier : mai-octobre, trouver des fonds pour l’Etat va être compliqué. C’est dans ce contexte que la réforme des retraites à venir promet pas mal d’effusions, pour rester dans l’euphémisme !
La guilde politique des acteurs et actrices français(e)s ont beau avoir éructé, rien de concret n’a transpiré sur le fond de ces sujets cruciaux. Il faut bien reconnaître que même le débat autour des élections européennes a un encéphalogramme assez plat ! Il ne faudra donc pas chercher chez ces derniers ni le premier rôle, ni même celui de figurant future vedette mondiale.
Des manques... restent trois ans pour cela
Il n’empêche que le président français, s’il a balayé quasiment tous les sujets jusqu’à l’écologie, un manque certain est apparu :
La place du citoyen, son engagement, sa reconnaissance dans la société. D’une part, tout ce qui relevait de la reconnaissance du vote blanc a été mis de côté… Pourquoi pas. Mais, d’autre part, rien sur l’engagement associatif citoyen, véritable ciment de notre pays. C’est bien dommage. « On ne naît pas citoyen, on le devient » pour paraphraser Simone de Beauvoir. Et en ce sens, en marge d’une mobilisation citoyenne inédite qui vient d’appeler une réponse inédite, loin d’être parcellaire, du président de la République, j’attire votre attention sur le livre de Dorian Dreuil « Plaidoyer pour l’engagement citoyen », préfacé par Audrey Pulvar, aux éditions VA Press, qui retrace son action et celles croisées de vie associatives de par le monde. Dorian Dreuil, la vingtaine à peine finissante et dix ans d’engagement, dresse « les nouvelles logiques d’engagements et trace les lignes prospectives des grandes évolutions des ONG » : rien de plus à dire à part le lire et s’en inspirer, même et surtout au plus haut niveau de notre pays !