La croissance perpétuelle est-elle possible dans un monde aux ressources limitées ? En 1972, des chercheurs de l’Institut de technologie du Massachusetts (MIT) publiaient un rapport intitulé « Les limites de la croissance ». Leur idée : si les hommes ne mettent pas fin à leur quête de croissance eux-mêmes, la nature le fera pour eux, sans prendre de gants. La version française de ce texte vient enfin d’être publiée*. Dennis Meadows, l’un des principaux auteurs, lit dans la crise actuelle les premiers signes d'un effondrement du système.
Vous avez écrit votre livre en 1972, remis à jour en 2004. Pourquoi, selon vous, est-il encore d’actualité ?
Dennis Meadows : À l’époque, on disait qu’on avait encore devant nous 40 ans de croissance globale. (…) Nous entrons aujourd’hui dans cette période d’arrêt de la croissance. Tous les signes le montrent. Le changement climatique, la dislocation de la zone euro, la pénurie d’essence, les problèmes alimentaires sont les symptômes d’un système qui s’arrête. (…) Les gens traitent ces questions comme s’il s’agissait de problèmes qu’il suffit de résoudre pour que tout aille bien. Mais en réalité, si vous résolvez le problème à un endroit, la pression va se déplacer ailleurs. Et le changement ne passera pas par la technologie mais par des modifications sociales et culturelles.
Comment peut-on amorcer ce changement ?
Il faut changer notre manière de mesurer les valeurs. Il faut par exemple distinguer la croissance physique (ou quantitative) de la croissance non physique (ou qualitative). Quand vous avez un enfant, vous vous réjouissez, au départ, qu’il grandisse et se développe physiquement. Mais si à l’âge de 18 ou 20 ans il continuait à grandir, vous vous inquiéteriez et vous le cacheriez. Quand sa croissance physique est terminée, vous voulez en fait de la croissance qualitative, c’est-à-dire intellectuelle et culturelle.
Malheureusement, les hommes politiques n’agissent pas comme s’ils comprenaient cette différence (…) : ils poussent automatiquement le bouton de la croissance quantitative. C’est pourtant un mythe de croire que celle-ci va résoudre le problème de la zone euro, de la pauvreté, de l’environnement… La croissance physique ne fait aucune de ces choses-là.
Pourquoi les politiques s’entêtent-ils à agir de la sorte ?
Vous buvez du café ? Et pourtant vous savez que ce n’est pas bon pour vous. Mais vous persistez parce que vous avez une addiction au café. Les politiques sont accros à la croissance. L’addiction, c’est faire quelque chose de dommageable mais qui fait apparaître les choses sous un jour meilleur à courte échéance. La croissance, les pesticides, les énergies fossiles, l’énergie bon marché, nous sommes accros à tout cela. Pourtant, nous savons que c’est mauvais, et la plupart des hommes politiques aussi.
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* "Les limites de la croissance (dans un monde fini)", Donella Meadows, Dennis Meadows, Jorgen Randers, ed. Rue de l’échiquier, 425 pages, 25 euros.
Propos recueillis par Karine Le Loët pour Terra Eco
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