Contrefaçon : une guerre sans fin qui alimente les réseaux criminels

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Par Daniel Rémy Publié le 16 août 2017 à 5h01
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@shutter - © Economie Matin
9 000 milliards de dollarsLe commerce de produits contrefaits pesait déjà 9 000 milliards de dollars en 2000.

Christian Peugeot, Président de l’Union des fabricants pour la protection internationale de la propriété intellectuelle (UNIFAB), remettait à Michel Sapin, le 28 janvier 2016, un rapport établissant les liens entre contrefaçon, criminalité organisée et terrorisme.

La contrefaçon, injustement reléguée au second plan, contribue pourtant au financement du terrorisme

L’UNIFAB, à cette occasion, avait mis en évidence le fait que les frères Kouachi, auteurs de la tuerie de Charlie-Hebdo, avaient été impliqués dans une affaire d’importation frauduleuse de fausses Nike. Parallèlement, les rédacteurs mentionnaient les saisies de contrefaçons qui avaient été régulièrement réalisées à Molenbeek, la désormais célèbre banlieue de Bruxelles… (Ivan Letessier- Le Figaro-28.01.2016).

Ce rapport n’avait pas d’autre objet que d’obtenir des instances internationales qu’elles appliquent au « commerce du faux » le même traitement que celui réservé aux trafics d’armes et de stupéfiants. Cette démarche était d’autant plus fondée qu’elle s’appuyait sur une étude réalisée par l’OCDE, laquelle estimait à 300 milliards d’euros le montant des transactions liées aux produits contrefaits ou « piratés » (luxe, vins, alcools, tabac, chimie, pharmacie, pièces détachées, jouets,…).

Tarir les sources de financement du crime organisé est, depuis bien longtemps, l’un des axes privilégiés emprunté par l’ensemble des services en charge de la lutte contre l’argent sale, issu des trafics en tous genres… Le problème est que cette économie « informelle », pour autant que l’on puisse l’évaluer correctement, pesait déjà pas moins de 9 000 milliards de dollars, dans le monde, au terme du siècle dernier, soit l’équivalent du PIB des Etats-Unis, à la même époque (Christian Chavagneux-Alternatives Economiques-octobre 1999).

Autant dire que, sur ce marché, la part imputable à la contrefaçon apparaît comme totalement marginale, au regard des trafics d’armes, de stupéfiants et, également, de la fraude fiscale : l’affaire des « Panama Papers » n’a fait que lever un coin du voile derrière lequel un argent « sans odeur » est proprement lavé…

Les acteurs privés du renseignement, acteurs incontournables et non corruptibles de la lutte contre la contrefaçon et les trafics en tous genres

Avec la recrudescence des attentats, il est clair que la priorité des autorités est tout entière axée sur la protection des citoyens, dans les espaces publics : la lutte contre les réseaux de contrefaçon ne saurait s’exercer autrement que de manière accessoire ou « incidente »…

Les industriels n’ont pas d’autre voie que de s’appuyer sur les acteurs privés du renseignement, lesquels savent remonter les filières et démanteler les réseaux, le plus souvent sans le concours des autorités locales, gangrenées par une corruption endémique, à tous les niveaux (politique, justice, armée, police,…) : un travail « de sape », parfois dangereux, qui se doit être accompli sans relâche, les filières et les réseaux ne mettant jamais très longtemps à se reconstituer.

Rien à voir avec la naïveté confondante de la Compagnie aérienne Sunwing, au Canada, laquelle n’a rien trouvé de mieux que de placarder de belles affiches publicitaires, particulièrement « racoleuses », dans l’aéroport de Montréal, avec pour slogan : « Vacances au champagne… ». Or, en guise de champagne, Sunwing n’avait rien d’autre à proposer à ses passagers qu’un vulgaire mousseux.. (Le Figaro-01.02.2016)

La lutte contre la contrefaçon, on a tendance à l’oublier, c’est aussi une guerre interminable sur le marché des appellations d’origine contrôlée ou protégée (AOC-AOP), une guerre qui fait des ravages, en termes d’image et d’emplois, mais qui, fort heureusement, répand moins de sang que Daech…

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Spécialiste des questions de sécurité et de renseignement, depuis 1976. Issu du secteur privé, Daniel Rémy apporte principalement son expertise et son expérience aux entreprises confrontées à des risques et à des menaces très diverses, en France comme à l'étranger (terrorisme, kidnapping, racket, fraude, espionnage industriel et commercial, tentatives de déstabilisation…). Il est l'auteur, entre autres, de « Qui veut tuer la France ? La stratégie américaine… » (2007), « La France des talibans : République cherche repreneur… » (2002), « Pour l’humour du risque » (2011) et « Terrorisme et sécurité : ils nous prennent pour des cons… » (2016).

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