La cession des actifs de Casino relancera-t-elle la guerre du retail ? Tandis que les rumeurs concernant les velléités de rachat du groupe de Jean-Charles Naouri par Carrefour accaparent l’attention des observateurs, le groupe Lidl prépare de son côté un vaste plan d’expansion en France. L’enseigne allemande pourrait être la grande gagnante de cette nouvelle séquence.
Depuis quelques semaines, le groupe Casino est au centre de toutes les attentions. Si l’annonce par son conseil d’administration fin août d’un nouveau plan de désendettement et de cession d’actifs en France offre de nouvelles perspectives d’avenir au groupe, celles-ci attisent également les convoitises. En délaissant le segment peu porteur et en perte de vitesse de l’hypermarché pour se recentrer sur les enseignes premium, le numérique et le commerce de proximité, Casino attire dans son sillage d’autres distributeurs comme Intermarché, Auchan ou Leclerc, qui accusent un retard certain dans leur maillage territorial et ont intérêt à s’étendre pour accroître leurs parts de marché. Le groupe Carrefour, dont l’action stagne en bourse, manifeste quant à lui un intérêt certain pour une opération de croissance externe pour relancer son cours. Une opération rendue compliquée par le déclin des hypers du groupe qui grève ses résultats et compliquent tout projet d’envergure pour le groupe d’Alexandre Bompard, malgré les rumeurs persistantes de ces derniers jours.
Lidl en embuscade
C’est sans compter sur Lidl qui pourrait jouer les trouble-fête. L’enseigne allemande, qui s’est, depuis 2012, éloignée de son image de hard-discounter pour se muer en supermarché de proximité, affiche clairement ses ambitions depuis quelques années. Une évolution stratégique qui porte ses fruits, puisque Lidl a vu sa part de marché progresser jusqu’à 5,9 % en août dernier – après avoir battu le record de sa plus forte progression enregistrée en l’espace d’un mois, soit +0,7%. Le distributeur, qui a accru son assortiment, poussé son offre de produits frais et misé davantage sur le e-commerce, est bien décidé à atteindre les 8 % de part de marché d’ici 2020.
Pour ce faire l’enseigne vise un déploiement plus important dans l’Hexagone, qui coïncide avec l’évolution de ses besoins en matière d’immobilier commercial. Si Lidl avait en effet bénéficié de la loi LEM en 2008 pour s’implanter dans de petites surfaces inférieures à 1.000 m², le groupe a besoin désormais de magasins plus grands pour présenter son assortiment étendu. Les cessions du groupe Casino représentent donc une aubaine stratégique pour le distributeur allemand qui fait tout pour ne pas laisser passer cette opportunité.
Leclerc, Auchan et Intermarché perdants ?
Face à une offre massive de Lidl, Casino pourrait être davantage tenté de céder ses actifs en gros en acceptant une proposition globale de rachat, plutôt que de négocier au cas par cas la vente de ses magasins. Auchan, Intermarché, mais surtout Leclerc, qui se retrouvent plutôt dans ce profil d’acheteur, apparaissent donc mécaniquement en position d’infériorité dans le cadre de leurs négociations avec Casino. Une situation déjà observée en février 2019 lors de la mise en vente d’un lot de 34 magasins par le groupe Casino, dont 33 avaient été acquis par le seul Lidl, contre un pour le groupe de Michel-Edouard Leclerc.
Au risque pour ces enseignes de subir une concurrence accrue sur leur segment principal – à l’heure où la guerre des prix, cheval de bataille pourtant de Michel-Edouard Leclerc, fait rage et tire toujours plus bas les marges des distributeurs.