La culture de la performance, du mérite, de la responsabilité, de la récompense, de l'intéressement va-t-elle pénétrer petit à petit dans la fonction publique ? Il semble qu’un ministre, pourtant de gauche, y soit "tout à fait favorable".
Bientôt des fonctionnaires évalués au vu de leurs performances ?
C’est du moins ce que le jeune ministre de l’Economie, Emmanuel Macron, a déclaré sur Europe 1 ce mardi 10 novembre 2015. Coutumier des déclarations choc ayant vocation à faire bouger les lignes et briser les tabous, il s’est dit "tout à fait favorable" à "accroître la part de mérite" dans la rémunération des 5,2 millions de fonctionnaires que compte le pays.
"Je pense qu'il faut accroître la part de mérite, la part d'évaluation, dans la rémunération de la fonction publique", a-t-il insisté.
Pas sûr que le ministre s’en tire à si bons comptes. Le président de la République va certainement le recadrer manu militari !
La ministre de la Fonction publique, Marylise Lebranchu, a, aussitôt informée des propos de son collègue, sauté au plafond. "Je crois qu'Emmanuel Macron, il faut qu'il accroît le nombre d'emplois dans le pays, qu'il s'occupe de l'économie (sic)" a-t-elle lancé.
Une vieille lune
En réalité, il existe déjà des primes variables qui dépendent de l’engagement professionnel et de la manière de servir des fonctionnaires. Elles ont été introduites par le gouvernement de Nicolas Sarkozy.
L’idée de rémunérer les fonctionnaires en partie en fonction de leur mérite présumé ne date pas d’hier. Comme le rappelle le magazine Challenges, déjà en 1946, Maurice Thorez, patron du Parti communiste et ministre de la fonction publique, déclarait: "il est essentiel que la notation exprime la valeur réelle et inégale des agents". Puis, un décret de février 1959 devait en théorie permettre de moduler les primes. Dans les faits, il n’a jamais été appliqué.
Peut-être car il est difficile de décider si le fonctionnaire est méritant alors que les performances sont souvent collectives dans le service public ?
A Singapour, un système de Flexible Wage System (Système de Rémunération Flexible) a été introduit dans la fonction publique dès 1986. Les éléments jugés les plus performants par leurs managers reçoivent un bonus pouvant aller jusqu’à un mois et demi de salaire. Parallèlement, quand la croissance augmente, tous les fonctionnaires touchent une prime exceptionnelle, sous la forme d’un treizième voire d’un quatorzième mois.