Selon un nouveau rapport sur la protection des lanceurs d’alerte dans les pays de l’OCDE, il apparaît que les nations, malgré un développement marqué des corpus législatifs en la matière, sont encore loin de garantir que les salariés signalant des actes répréhensibles survenus sur leur lieu de travail sont protégés de toute mesure discriminatoire ou disciplinaire.
Les pays prennent cette question plus au sérieux, notamment dans le secteur public. Ils ont ainsi promulgué plus de lois de protection des lanceurs d’alerte dans les cinq dernières années que dans les vingt-cinq années précédentes, mais on peut continuer de s’interroger sur l’efficacité pratique de ces textes. Dans son rapport, l’OCDE se prononce pour un examen, et en fin de compte un resserrement, de ses normes applicables à la protection des lanceurs d’alerte.
Le rapport – examiné aujourd’hui par les ministres de la Justice et d’autres hauts responsables venus d’une cinquantaine de pays assister à une Réunion ministérielle de l’OCDE sur l’anticorruption – utilise une enquête de 2014 menée dans 32 pays sur la protection des lanceurs d’alerte, ainsi qu’une enquête de 2015 sur l’intégrité et la gouvernance des entreprises. Il comprend des études de cas sur la Belgique, le Canada, le Chili, les États-Unis, l’Irlande et la Suisse.
Parmi les conclusions du rapport :
-Vingt-sept des 32 pays de l’enquête disposent d’une législation ou de dispositions législatives spécifiquement axées sur la protection des lanceurs d’alerte et prévoyant une telle protection dans certaines circonstances, et 13 d’entre eux ont une loi protégeant spécifiquement les lanceurs d’alerte du secteur public. La plupart des lois ont été adoptées non pas spontanément, mais en réaction à un scandale.
-86 % des entreprises de l’enquête disposent d’un mécanisme de signalement des soupçons d’actes illicites graves, mais un tiers d’entre elles n’ont pas de politique écrite de protection des lanceurs d’alerte contre les représailles, ou ne savent pas si elles en ont une.
-La moitié environ des répondants aux deux enquêtes disent que leur pays ou leur entreprise autorise le signalement anonyme des soupçons d’actes illicites.
-Malgré cela, les lois actuelles ne protègent pas toujours de manière complète les salariés du public et du privé, et les signalements concernant des corruptions transnationales sont particulièrement mal couverts. Fait notable, 27 des 41 pays Parties à la Convention de l’OCDE sur la lutte contre la corruption ne protègent pas efficacement les lanceurs d’alerte qui signalent des faits de corruption transnationale, que ce soit dans le secteur public ou dans le secteur privé.
-Dans certains pays, le flou qui subsiste sur qui exactement est visé par la législation de protection des lanceurs d’alerte peut saper la confiance de ces derniers dans le système et les dissuader d’agir.
-Très rares sont les pays qui ont pris des mesures pour sensibiliser le secteur des entreprises à l’importance d’encourager le signalement des actes répréhensibles et de protéger les personnes qui dénoncent de tels actes.
-Malgré ces insuffisances, le signalement d’actes répréhensibles ou le lancement d’alertes effectués de manière spontanée a été, entre 1999 et 2014, le principal moyen de détection de 33 % des cas de corruption transnationale dans les pays de l’OCDE.
Le rapport est disponible en anglais sur le site Internet de l’OCDE : www.oecd.org/corruption/committing-to-effective-whistleblower-protection-9789264252639-en.htm ainsi qu’en version abrégée : www.oecd.org/corruption/anti-bribery/Committing-to-Effective-Whistleblower-Protection-Highlights.pdf.