« L'Afrique pourrait facilement développer la culture du blé pour se nourrir et échapper aux fluctuations des prix et à l'instabilité politique », selon une étude du Centre international d'amélioration du maïs et du blé situé à Mexico et parue hier à l'occasion d'une conférence sur le blé en Ethiopie.
Ce rapport, qui étudie la situation de 12 pays de l'Ethiopie au Zimbabwe, souligne que les agriculteurs au sud du Sahara ne cultivent que 44% du blé consommé localement, et qu'entre 10% et 25% des quantités considérées comme « possibles d'un point de vue biologique et économiquement rentables » avec un rendement net de $ 200 dollars (€ 154) à l'hectare.
« Le blé n'est pas une céréale africaine, ce n'est pas une céréale tropicale, mais de nombreux gouvernements veulent la produire localement au lieu de payer pour l'importer », explique Hans-Joachim Braun, directeur du programme blé pour le Centre, point par téléphone. Aussi les auteurs de l'étude ont-ils cherché à identifier le moyen de faire croître la production de blé comme « une protection contre l'insécurité alimentaire, l'instabilité politique et les chocs de prix », rapporte Reuters.
Selon le rapport, les pays africains vont dépenser $ 12 milliards, soit plus de € 9 milliards pour importer 40 millions de tonnes (Mt) de blé en 2012. Le blé est destiné notamment aux villes en forte croissance dans lesquelles le régime alimentaire de la population à tendance à changer pour le blé et le riz au détriment du maïs, du sorgho et de la patate douce.
Hans-Joachim Braun souligne que le blé est déjà une céréale bien établie en Ethiopie, au Kenya et en Afrique du Sud, mais qu'il pourrait facilement être développé en zone montagneuse dans d'autres pays subsahariens. Douze pays en Afrique subsaharienne ont produit près de six millions de tonnes de blé par an sur la période 2006-2008, selon le rapport.
« Si l'Afrique ne va pas vers l'autosuffisance en blé, elle pourrait devoir faire face à de nouvelles famines, à l'instabilité, voire à la violence politique, comme les émeutes du pain l'ont montré en Afrique du Nord il y a quelques années », estime Bekele Shiferaw, un des auteurs de l'étude, dans un communiqué. En 2008, la Zambie et le Rwanda ont échappé à de fortes hausses des prix du blé sur les marchés internationaux grâce à leur production domestique, fait valoir l'étude.
« L'Afrique subsaharienne a d'importantes étendues de terre propices à la production de blé de façon rentable dans des conditions de précipitations », affirment les auteurs de l'étude. Mais atteindre l'autosuffisance pour la consommation de blé risque d'être long, tempère Hans-Joachim Braun. « Le potentiel biologique est là. Mais il faut aussi avoir accès aux marchés », souligne-t-il. « Le gros problème est l'infrastructure routière. Cela ne sert pas à grand chose si l'exploitation agricole est loin des villes.»