Elle a fait la une des journaux pendant des semaines, et a entraîné la démission de la ministre de la Justice Christiane Taubira. Elle est actuellement l'objet de débats houleux à l'Assemblée nationale. Elle, c'est la déchéance de nationalité. Une mesure annoncée à grands cris par le chef de l'Etat au lendemain des attentats du 13 novembre 2015. Qu'en reste t-il aujourd'hui ?
La déchéance pour tous ?
L’Assemblée nationale débat actuellement, dans une ambiance électrique, du projet d’étendre la déchéance de nationalité aux personnes condamnées pour des actes de terrorisme et étant Français de naissance.
Actuellement, seules les personnes accusées de terrorisme et étant binationales et naturalisées depuis moins de 10 ou 15 ans (c'est-à-dire des gens nés avec une autre nationalité et qui ont été naturalisés français) peuvent perdre leur nationalité et leur passeport français.
Or François Hollande a promis juré devant le Congrès réuni à Versailles d'étendre cette sanction à toutes les personnes "condamnées pour un crime ou un délit constituant une atteinte grave à la vie de la Nation". C'est-à-dire aussi aux binationaux Français de naissance (nés Français car l’un de leurs parents est Français ou car ils sont nés en France d’un parent lui-même né en France quelle que soit sa nationalité).
"Tout individu a droit à une nationalité"
On estime que 5 % de la population française âgée de 18 à 50 ans sont binationaux. Ce qui représente un peu moins d'1,5 million de personnes, dont neuf sur dix sont des immigrés qui ont acquis la nationalité française ou des descendants d'immigrés nés Français.
La mesure devrait être réservée aux personnes ayant une double nationalité, car selon l’article 15 de la Déclaration universelle des droits de l’homme, "tout individu a droit à une nationalité". Et depuis la loi Guigou de 1998, le Code civil précise bien que la déchéance de nationalité ne peut pas avoir "pour résultat de rendre apatride".
Cette réforme, pour être adoptée, doit obtenir l'assentiment des trois cinquièmes des parlementaires – députés et sénateurs réunis. Ce n'est pas gagné.