Jean-Charles de Lasteyrie : orfèvre de l’évaluation financière

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Par Rédacteur Modifié le 24 octobre 2018 à 12h27
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Associé fondateur du prestigieux cabinet Ricol-Lasteyrie, Jean-Charles de Lasteyrie est un des spécialistes français des métiers de l’évaluation financière. Aux côtés de René Ricol et Gilles de Courcel, il a conseillé certaines des plus importantes opérations financières françaises de ces quarante dernières années.

Né en 1953, diplômé de l’ESCP, puis d’expertise-comptable, Jean-Charles de Lasteyrie débute sa carrière en 1977 au sein du cabinet d’audit Calan-Ramolino. En parallèle, il entreprend une thèse de Droit fiscal, consacrée à l’histoire de la fiscalité successorale soutenue à Paris I en 1979.

C’est en 1981 qu’il rencontre René Ricol, qui vient de s’associer chez Calan-Ramolino. Les deux hommes échangent sur de nombreux dossiers et s’apprécient très vite. Ils décident de s’associer en montant leur propre structure : Ricol-Lasteyrie, en 1987. Jean-Charles de Lasteyrie reconnait à René Ricol une hauteur de vue et une vision exceptionnelles, ainsi que des talents politiques et relationnels hors du commun. De son côté, il se passionne pour les opérations techniques et complexes, qui deviendront la marque de fabrique du nouveau cabinet. Et sa marque de fabrique personnelle.

En effet, loin de s’arrêter aux activités traditionnelles d’audit, il veut ouvrir Ricol-Lasteyrie et Associés à de nouvelles activités beaucoup plus financières et stratégiques, et ambitionne de jouer dans la cour des grands, en intervenant auprès des grandes entreprises cotées en bourse. Dès 1989, Ricol-Lasteyrie renonce au commissariat aux comptes au bénéfice d’activités de conseil plus stimulantes intellectuellement.

Les années 90 et leur cortège de fusions-acquisitions offrent ainsi de nombreux dossiers d’évaluation. Les interlocuteurs sont les décideurs stratégiques et les DG ; les opérations sont bien souvent vitales, et les enjeux colossaux. Jean-Charles de Lasteyrie y est aussi amené à entrer en relation étroite avec tout ce que la place financière compte de régulateurs (COB puis AMF…) de banquiers et d’avocats d’affaires. « Nous avons alors commencé à bénéficier d’une très bonne notoriété », indique Jean-Charles de Lasteyrie, pour expliquer que tous les beaux dossiers passent alors entre leurs mains : Thomson-Thales, Vivendi, groupe Pinault, Société Général, GDF-Suez…

La place prise par Ricol-Lasteyrie sur ce marché s’explique aussi par l’obsession de la « qualité ». Pour Jean-Charles de Lasteyrie, il s’agit de « faire les choses bien », et cela passe par la qualité et la complémentarité des associés, celle des équipes, mais aussi par une méthode de management revendiquée : « j’ai toujours refusé de gérer les équipes en fonction des comptes de résultats individuels. Cela crée de la compétition alors qu’il faut au contraire faire travailler les collaborateurs ensemble, et réunir les différentes expertises complémentaires dans la même équipe. C’est cela qui produit une énorme valeur ajoutée. C’est la clé. ».

Cette image de « boutique » qui fait travailler les meilleurs experts sur des dossiers techniques très complexe va mettre le cabinet sur le devant de la scène, à partir de 1993-1994, lors d’une série d’OPR médiatisées. Ces Opérations Publiques de Retrait de la cote sont alors à la mode, mais empreintes d’une grande complexité. Et pour cause, il s’agit d’exproprier une partie des détenteurs de titres, et la question de la méthode d’évaluation est sensible. Les tensions, fréquentes. Une question de chiffres, mais surtout de doigté. Pour Jean-Charles de Lasteyrie, « les OPR étaient un petit marché, mais avec une forte visibilité. Surtout, il s’agissait d’opérations qui correspondaient parfaitement à notre métier et à notre savoir-faire. A l’arrivée, nous sommes devenus très reconnus, dans le cercle restreint des dirigeants des grands groupes ».

Cultivant la discrétion, les associés fondateurs de Ricol-Lasteyrie deviennent alors les interlocuteurs privilégiés de grands patrons, sur des opérations stratégiques et sensibles. Jean-Charles de Lasteyrie, particulièrement, apprécie cette posture de conseiller de l’ombre. Dirigeants d’entreprises, avocats et banquiers d’affaires se succèdent dans les locaux de l’avenue Hoche, pour se faire conseiller lors de phases de négociations ou d’opérations de haut de bilan. « Nous produisons ce qu’on appelle aux Etats-Unis des ’fairness opinions’, et en France, des ‘opinions indépendantes’, » explique J-C de Lasteyrie. « Nous avons choisi de ne pas prendre d’honoraires de résultat, ni indexés à la taille du deal. Nous sommes alors vraiment crédibles pour accompagner notre client, y compris pour lui conseiller de ne pas faire une opération à laquelle d’autres le poussent ».

La déontologie sera également au cœur de l’engagement de Jean-Charles de Lasteyrie dans les instances professionnelles. Élu au Conseil de l’Ordre des Experts Comptables, il y siège entre 2000 et 2004 et préside le Club Fiscal qui se donne comme objectif d’accompagner les experts comptables dans ce domaine à fort enjeu pour leurs clients. En 2009, il est élu vice-président de la FEE, (la Fédération européenne des Experts comptables) et se consacre aux dossiers des normes d’audit, des normes comptables et des enjeux déontologiques. Toujours l’obsession de la qualité.

A la FEE, il préside aussi un groupe de travail dédié à l’Integrated Reporting, une approche permettant de décrire et de mesurer la création de valeur par l’entreprise, au-delà des seuls critères financiers. Pour J.C. de Lasteyrie (qui est le représentant de la profession comptable française au Conseil International de l’Integrated Reporting), il s’agit d’« un rapport holistique qui appréhende l’entreprise dans son environnement ». Une sorte de super rapport RSE, que Gérard Mestrallet, le Président d’Engie, a été un des premiers à adopter en France. Aujourd’hui près de la moitié des entreprises du CAC 40 publie un rapport intégré.

En 2015, René Ricol, Jean-Charles de Lasteyrie et Gilles de Courcel décident de se rapprocher du géant américain EY. Le rapprochement est un succès, les équipes s’apprécient jusqu’à fusionner complètement à la fin de 2017. Aujourd’hui, ce travail accompli, le trio fait savoir qu’il remonte en selle, et s’apprête à relancer un cabinet consacré au conseil financier aux grands patrons. Pour Jean-Charles de Lasteyrie, c’est toujours le même moteur qui l’anime : apporter aux dirigeants des grands groupes une expertise pointue sur des sujets essentiels pour eux, le conseil financier stratégique, bien sûr, socle du développement de leurs activités depuis des années, mais aussi, signe des temps, des sujets nouveaux comme la gouvernance et la « compliance » où des textes nouveaux comme la loi Sapin II viennent modifier fondamentalement la donne, ou encore la gestion des litiges, où l’expertise financière est devenue aussi importante que l’excellence juridique en raison de l’évolution exponentielle des enjeux financiers.

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