D’importantes disparités de performances demeurent au sein des systèmes éducatifs du monde. Accès difficile à l’éducation, manque d’équité entre les sexes, inadéquation entre les formations proposées et les attentes du marché du travail… Les problèmes sont nombreux et touchent pays pauvres comme développés. S’il n’existe pas de solution miracle pour faire face aux enjeux de l’éduction pour les générations à venir, une constante se remarque toutefois : il importe d’innover.
L’école pour tous n’est pas pour demain. Près de 264 millions d’enfants et d’adolescents dans le monde n’ont toujours pas accès à l’éducation. De plus, un jeune sur douze, seulement, est susceptible d’acquérir des compétences du niveau secondaire dans les pays à faibles revenus. De fait, dans les régions pauvres, il est encore très difficile pour les familles d’envoyer leurs enfants à l’école. Les causes sont multiples : des coûts importants (uniformes, manuels scolaires, fournitures…), le recours au travail des enfants pour augmenter les revenus du foyer ou encore le manque de sécurité (guerre civiles, conflits ethniques, forte criminalité…).
Tous ces enfants se voient privés d’une chance de s’épanouir et de s’émanciper, perpétuant un cercle vicieux, l’éduction étant, selon l’Unesco, un « catalyseur pour le bien-être des individus et l’avenir de notre planète ». Seulement « au rythme actuel, le monde parviendra à un enseignement primaire universel en 2042, à un enseignement secondaire du premier cycle universel en 2059 et secondaire du second cycle universel en 2084 ». Soit, pour ce dernier indicateur, avec plus d’un demi-siècle de retard sur la date fixée dans le cadre des Objectifs de développement durable (ODD).
Même au sein de l’OCDE, de nombreux progrès restent à faire
Les problèmes liés à l’éducation ne sont pas l’apanage des pays pauvres. Ainsi, une enquête PISA de l’OCDE sur l’état de l’éducation dans le monde a évalué la qualité, l’équité et l’efficacité des systèmes scolaires des pays de l’OCDE. Une fois de plus, Singapour caracole en tête, talonné par le Canada, le Danemark et Hong Kong (Chine), qui affichent des niveaux élevés de performance et d’équité. L’Estonie se distingue également, grâce à des pratiques innovantes visant à reconstruire son système éducatif à la suite de son indépendance, en 1992.
Mais, si les dépenses allouées à l’enseignement primaire et secondaire ont augmenté de presque 20 % depuis 2006, seuls 12 des 72 pays de l’OCDE ont vu leurs résultats en sciences progresser au cours de cette période. A contrario, l’Australie, la Finlande, la Grèce, la Hongrie, la Nouvelle-Zélande et la République tchèque ont vu leur part d’élèves peu performants augmenter. De plus, les élèves défavorisés sont en moyenne trois fois plus susceptibles d’être en difficulté à l’école. Et près de 20 % des élèves n’atteignent pas le niveau de compétences de base en compréhension de l’écrit – un chiffre qui n’a pas décru depuis 2009.
Un manque d'adéquation entre la formation et les attentes du marché de l'emploi
D’autres pays, qui offrent des formations de qualité, font face à un autre handicap : une inadéquation entre ces formations et les attentes du marché de l'emploi. Ainsi, des pays avec des taux de réussite élevés au niveau universitaire, affichent un taux d’employabilité des jeunes moins reluisant. Publiée en 2013, une étude du site Bayt révélait qu’un jeune diplômé sur cinq de la région Maghreb/Machrek reprochait au système éducatif de ne pas assez mettre en avant les qualités recherchées sur le marché du travail. Plus alarmant encore, 73% des sondés estimaient que leur créativité était étouffée par le système éducatif, d’après l’édition 2015 de la même étude. Conséquence immédiate : l’arrivée sur le marché du travail de jeunes diplômés peu adaptés et peu enclins à prendre des initiatives.
Transition éducative : l’innovation au service du savoir
La leçon de ces observations est que l'éducation ne doit pas être considérée comme figée. Plusieurs initiatives se proposent ainsi de réfléchir autour des innovations permettant de porter la transition éducative. Le sommet Wise, organisé tous les deux ans à Doha, cherche par exemple à trouver des solutions pour mettre en phase les systèmes éducatifs des pays avec les attentes du monde moderne. Du 14 au 17 novembre, le sommet s’organisera autour de trois piliers : (ré)apprendre à apprendre (sur la place de l’innovation dans l’enseignement et l’identification des connaissances les plus adaptées à la société moderne) ; coexister dans un monde en perpétuelle évolution (sur le développement de valeurs et d’attitudes communes soutenant la cohésion des citoyens du monde) ; construire ensemble des sociétés du savoir (sur les réformes et politiques d’émancipation des individus afin qu’ils puissent librement innover et participer à la construction d’un monde plus juste).
En juillet dernier, l’Institut Montaigne s’est également penché sur la question via une approche intercontinentale, dans le cadre d’un séminaire qui réunissait experts du Maroc et de France. Intitulé « Le défi de l’équité, de l’innovation et de l’amélioration de nos systèmes éducatifs », ce rendez-vous, organisé en partenariat avec OCP Policy Center, s’intéressait notamment au « rôle du numérique dans l’apprentissage des fondamentaux », et réservait une place centrale à la thématique de l’innovation.
On le voit, cette quête du progrès doit être inhérente à tout système éducatif. Une récente étude menée par la Commission européenne sur la question de l’éducation le soulignait encore, insistant tout particulièrement sur la nécessité de cet aggiornamento au sein des zones défavorisées. Un indicateur fort pour les décideurs politiques et les communautés scolaires dans leurs souhaits de modernisation des pratiques et approches pédagogiques.