Les femmes qui ont des enfants paient le prix fort : la lourdeur des frais de garde, l’accès à ces services et la fiscalité en dissuadent plus d’une de travailler davantage, selon un nouveau rapport de l’OCDE.
Le rapport intitulé Inégalités hommes-femmes : il est temps d’agir montre que les avancées dans l’éducation parmi les femmes ont contribué à une augmentation globale de leur participation dans le marché du travail, mais des écarts considérables demeurent au niveau des heures de travail, des conditions de l’emploi et des salaires.
Dans les pays de l’OCDE, les hommes gagnent en moyenne 16 % de plus que les femmes pour une activité similaire à plein temps. L’écart est encore plus marqué au sommet de l’échelle salariale, où il peut atteindre 21 %, ce qui prouve que le plafond de verre n’a pas disparu. Malgré le fait que les inégalités de salaire entre les hommes et les femmes se sont légèrement atténuées, le progrès est insuffisant et beaucoup reste à faire dans plusieurs pays.
« Lutter contre les inégalités hommes-femmes doit être au cœur de toute stratégie visant à rendre nos économies plus durables et nos sociétés plus solidaires », a déclaré le Secrétaire général de l’OCDE, M. Angel Gurría, à l’occasion de la publication du rapport, lors du Forum de l’OCDE sur la parité qui s’est tenu à Paris. « La population mondiale vieillit, et nous ne pourrons faire face à cette évolution qu’en mobilisant tous les talents. Les gouvernements doivent améliorer leurs systèmes d’éducation, l’imposition et de prestations sociales, et offrir des services de garde d’enfants plus abordables, afin d’aider les femmes à contribuer davantage à la croissance économique et à une société plus juste. »
L’écart de salaire moyen entre les hommes et les femmes atteint 22 % dans les familles qui élèvent un ou plusieurs enfants. Pour les couples sans enfant, en revanche, il n’est que de 7 %. La pénalité salariale liée à la maternité est en moyenne de 14 % ; c’est en Corée que la différence est la plus élevée, tandis qu’elle est presque nulle en Italie et en Espagne.
L’amélioration des régimes fiscaux et des prestations sociales pour les parents qui exercent un emploi permettrait de lutter contre ces disparités. Après déduction des frais de garde, plus de la moitié (52 %) du deuxième salaire part en impôts, une proportion qui s’élève à 65 % ou plus en Allemagne, en Australie, aux États-Unis, en Irlande, au Royaume-Uni et en Suisse.
Si les frais de garde des enfants absorbent un salaire, il n’y a le plus souvent guère d’intérêt, voire aucun, à ce que les deux parents travaillent, du moins à temps complet. Les femmes occupant un emploi à temps partiel sont particulièrement nombreuses en Allemagne, en Autriche, en Irlande, aux Pays-Bas et au Royaume-Uni. Si l’on tient compte du travail à temps partiel, l’écart de rémunération nette hommes-femmes est multiplié par deux dans de nombreux pays européens, par trois en Irlande et aux Pays-Bas.
Dans bien des pays, l’emploi des femmes a moins souffert de la crise que celui des hommes, et de nombreuses femmes mariées ont pu étoffer les revenus du ménage en travaillant davantage. Toutefois, les suppressions d’emploi dues à la crise qui ont frappé le secteur public – où les femmes représentent quasiment 60 % de l’effectif total – se traduiront dans les années à venir par une aggravation de la situation des femmes sur le marché du travail. Les pouvoirs publics doivent veiller, affirme l’OCDE, à ce que les restrictions budgétaires ne mettent pas à mal les progrès accomplis en faveur de l’égalité hommes-femmes en matière d’emploi.
Augmenter le droit individuel du père à un congé parental sur une base « à prendre ou à laisser » peut accroître son implication à long terme dans l’éducation de l’enfant. Les hommes sont le facteur clé pour accroître la participation des femmes dans le marché du travail: les pays ayant le plus faible écart entre les sexes dans le travail non rémunéré sont ceux qui ont les meilleurs taux d'emploi féminin.
Les effets à long terme des inégalités de rémunération s’avèrent dramatiques pour les femmes. Nombreuses sont celles qui, parce qu’elles ont travaillé moins longtemps dans le secteur formel, et en dépit du fait qu’elles assumaient chez elles la majorité des tâches domestiques non rémunérées, percevront une retraite plus faible et vivront leurs dernières années dans la pauvreté. Avec une espérance de vie supérieure de près de six ans à celle des hommes, les femmes de plus de 65 ans ont aujourd’hui une fois et demie plus de risques de connaître la pauvreté que les hommes de la même classe d’âge.
Le rapport fournit en outre de nouveaux éléments prouvant l’existence de disparités dans le domaine de l’entrepreneuriat. Dans les pays de l’OCDE, la proportion d’entreprises appartenant à des femmes est voisine de 30 %. Les femmes installées à leur compte ont également un revenu inférieur de 30 à 40 % à celui des hommes dans la même situation. Pour l’OCDE, il est essentiel d’améliorer l’accès au financement des entrepreneurs femmes.
En ce qui concerne l’éducation, la situation des femmes a enregistré des avancées considérables dans le monde entier au cours des vingt dernières années. Dans de nombreuses disciplines, les filles font mieux que les garçons et sont davantage susceptibles de poursuivre leurs études jusqu’à 18 ans, voire au-delà. Pourtant, elles sont moins enclines à opter pour des matières scientifiques ou technologiques. Afin d’inciter davantage de filles à choisir ces filières, qui conduisent à des emplois qualifiés très rémunérateurs, l’OCDE recommande de mieux sensibiliser aux conséquences des choix éducatifs sur les possibilités de carrière et les perspectives de rémunération. Les sociétés doivent aussi faire de leur mieux pour tirer parti de l’augmentation dans le capital humain, car les avances dans l’éducation ne sont pas totalement prises en compte dans la participation des femmes sur le marche de travail.