Alors que l'Unedic a accusé en 2013 un déficit record de 4,1 milliards d'euros, les partenaires sociaux (patronat et syndicats) se sont mis d'accord pour un plan d'économies de... 400 millions d'euros en rythme annuel. « Much ado about nothing », comme dirait Shakespeare (« beaucoup de bruit pour rien ») ?!
« Plus une personne travaille, plus elle accumule des droits à l'assurance-chômage »
Syndicats et patronat se retrouvaient une dernière fois vendredi pour clore les négociations portant sur la réforme de l'assurance-chômage. C'est finalement dans la nuit de vendredi à samedi qu'ils ont trouvé un accord.
Rien de bien révolutionnaire : les règles actuelles, dans les grandes lignes, restent inchangées. Un maximum de chômeurs - toute personne ayant travaillé pendant quatre mois (sur les 28 précédant la perte d'emploi) avant de perdre son poste, soit actuellement 2,2 millions de personnes sur les 3,3 millions de sans emploi que compte le pays- seront indemnisés, pendant une durée toujours aussi longue -deux ou trois ans, selon si l'allocataire est âgé de moins ou plus de 50 ans.
Une des nouveautés consiste en la création de « droits rechargeables » pour les demandeurs d'emploi qui retrouvent un travail... avant de le reperdre une nouvelle fois. Cette disposition était prévue dans l'accord sur la sécurisation de l'emploi signé il y a un an. Objectif : inciter les chômeurs à reprendre un emploi, même court ou moins bien payé, alors qu'aujourd'hui, ils ont parfois intérêt, sur le plan strictement financier, à ne pas se remettre au travail.
Plus de 250 000 personnes alternant entre reprise d'activité temporaire et virée à Pôle Emploi en profiteront. Concrètement, ils verront leur durée d'indemnisation s'allonger. « Plus une personne travaille, plus elle accumule des droits à l'assurance-chômage » précise l'accord. Coût estimé : 400 millions d'euros par an.
Les cadres, les seniors et les intermittents vont voir les règles d'indemnisation (un peu ) changer
En revanche, le Medef, qui voulait absolument réaliser des économies pour sauver le régime au bord de la faillite, a obtenu que soient modifiés les droits de certains bénéficiaires de l'assurance-chômage. Les cadres notamment : par exemple, au lieu de percevoir 57,4% de son ancien salaire, un chômeur qui gagnait plus de 2 042 euros par mois brut n'en percevra plus que 57%.
Autre mesure : une personne qui perd son emploi mais qui part avec un « chèque » versé par son entreprise, comme ce peut être le cas lors d'une rupture conventionnelle, ne percevra des indemnités chômage qu'à partir, non plus de 75 jours maximum, mais de 180 jours maximum (sauf pour les licenciés économiques). Une sorte de délai de carence de six mois.
Et le mode de calcul change : le délai sera égal, en jours, au chèque de départ perçu, divisé par 90. Par exemple, une personne qui touche un chèque de départ de 10 000 euros devra attendre 111 jours pour commencer à percevoir des indemnités chômage, et non plus 75 jours maximum, dans la limite de 180 jours.
Les seniors de plus de 65 ans aussi en sont pour leurs frais : actuellement exonérés de cotisations, ils vont devoir payer une « contribution spécifique de solidarité » calquée sur les cotisations chômage (4 % employeur, 2,4 % salarié).
Enfin les intermittents du spectacle, qui étaient dans le collimateur du syndicat patronal qui rêve de supprimer leur régime jugé très avantageux, devront eux aussi faire un effort : certes les artistes ne devront toujours travailler que 507 heures en l'espace de dix mois et demi (soit 10 heures par semaine) pour être éligibles à l'assurance-chômage mais le cumul des salaires et des indemnités de l'assurance-chômage est désormais plafonné à 5 475,75 euros brut mensuels et leur taux de cotisation est augmenté de deux points.
En 2012, la Cour des Comptes dénonçait dans son rapport annuel notamment la dérive du régime des intermittents du spectacle : ils sont 100 000, soit 3% des demandeurs d'emploi, mais couteraient 1 milliard d'euros (ils représenteraient donc à eux seuls un quart du déficit !).
Ces changements doivent permettre de réaliser 800 millions d'euros d'économies par an. Avec les 400 millions de dépenses, on est donc à 400 millions d'économies nettes. On est loin de combler le trou de l'Unedic, mais proche de ce sur quoi tablait le gouvernement : le projet de loi de finances pour 2014 prévoyait 0,3 milliard d'euros d'économie !