Ainsi semble être la racine de l'attitude des gouvernements successifs sur la question du travail du dimanche. Reconnaissons-le, le jour du dimanche a successivement pu être le jour du seigneur pour certains, le jour de l’Eglise, le jour pour monter au bourg, le jour des retrouvailles familiales, le jour du bricolage ou le jour de la virée en voiture pour d’autres ou encore le jour d’ennui pour quelques esprits poétiques.
Le travail du dimanche a une belle histoire. Elle reflète d’ailleurs celle de la société et raconte ses évolutions successives.
Elle apparaît pourtant encore trop comme une institution immuable.
Certains observateurs s’étonnent que cette réforme, qui du reste n’aura pas lieu, suscite autant d’émoi dans notre pays. C’est finalement qu’ils oublient qu’il s’agit de l’une des mœurs de notre civilisation chrétienne
Sans stigmatiser personne mais avec cette histoire en tête, nous pouvons légitimement être conduit à nous demander si c’est bien le rôle de la loi de la Ve République, en 2014, à l’heure du tout digital, dans une société laïque, de sanctionner les manquement à une loi ecclésiastique.
La question du travail le dimanche s’est toujours posée à des cycles économiques clés de notre histoire. C’est ainsi qu’il s’est développé sous la Monarchie de Juillet parce que l’activité économique naissait de la grande industrie. C’est aussi ainsi qu’il s’est essouflé à l’aune de la troisième République.
L’Histoire nous enseigne des leçons particulièrement intéressantes à cet égard. Il ne faut pas oublier que les métiers de l’habillement ou de l’alimentation sont des métiers en activité le dimanche… depuis le Moyen-Age
Il faut bien mesurer le sens de cette réalité historique pour bien comprendre les enjeux du travail dominical.
C’est le 10 août 2009 que la loi est venue étendre le périmètre de l’élargissement de l’autorisation d’ouverture dominicale, ouvrant ainsi une brèche dans la loi du 13 juillet 1906 à l’origine de sa prohibition.
Les dérogations à la loi sur le travail du dimanche la délégitiment
Sans nous prononcer sur la légitimité ou la nécessité de ce dispositif législatif, force est de constater qu’à la vérité, les dérogations se sont multipliées au point de ne plus faire sens en dévoyant l’essence même du texte par une application particulièrement fastidieuse.
Confrontée à cette réalité incohérente, les entrepreneurs se demande jusqu’à quand ceux qui ont la charge de la décision publique vont prendre comme alibi la multiplication des dérogations pour ouvrir le champ de l’ouverture dominical tout en prétendant ne pas toucher au travail dominical.
A l’heure où tous les sondages d’opinion montrent l’unité des Français sur le sujet, il paraît inconcevable de ne pas attaquer à bras le corps ce sujet.
En dix ans, ce n’est pas moins d’une dizaine de propositions de loi qui ont été déposées pour élargir le travail le dimanche. C’est dire que le sujet déchaine les passions.
Cela ne doit pas nous empêcher de regarder lucidement la réalité du terrain entrepreneurial
D’abord, à partir du moment où il existe des étudiants et des salariés volontaires pour travailler le dimanche, nous ne voyons pas au nom de quoi nous pourrions par principe leur refuser le droit de travailler ?
En 2013, travailler le dimanche est souvent pour eux tout à fait naturel. Les empêcher de travailler le dimanche, c’est directement précariser ces salariés qui voient ici le moyen de survivre souvent pour financer leurs études notamment.
Aussi, comment peut-on sérieusement renoncer à capter le potentiel de consommation du dimanche et donc de croissance car il existe bien un besoin de consommation le dimanche, à l’heure où nous ne cessons de lire qu’il faut trouver un moyen de relancer l’activité économique en cette période de crise ?
Par ailleurs, quel sens peut bien avoir une interdiction physique d’ouverture à l’heure où c’est le ecommerce qui régit la majorité des transactions commerciales. Va-t-on demander à Ebay ou Amazon de fermer leurs sites internet le dimanche ?
Une loi désuète, absurde
Nous voyons bien l’absurdité d’une loi désuète. Veut-on vraiment renoncer à 10 000 emplois de plus rien qu’à Paris ? Peut-on vraiment renoncer à 20 000 emplois supplémentaires à temps plein si l'on autorise l'ouverture 10 à 12 dimanches par an comme l’affirme le Conseil du commerce de France ?
Ne peut-on pas sérieusement relire l’étude du Conseil d'analyse économique de 2007 qui explique qu’empêcher les Français de travailler le dimanche c’est renoncer à 100 000 emplois dans celui du commerce de détail.
Souhaite-t-on vraiment renoncer aux 14 800 emplois qui pourraient être créés dans le secteur non-alimentaire ?
Il est temps de s’occuper de la situation des 6,4 millions de salariés concernés par le travail le dimanche, recensés par l’INSEE.
Pour cela, quoi de mieux que de se rappeler qu’on ne peut pas résoudre un problème avec le même type de pensée que celle qui l'a créé. Poser comme base de réflexion à la situation, la loi qui a interdit le travail le dimanche, c’est sans doute une véritable erreur …