Les incertitudes politiques en Italie remettent en question la capacité du pays à mener les réformes nécessaires à l’assainissement de ses finances publiques. Du coup, la prime de risque sur les taux italiens se regonfle, tout comme celle sur les actions.
Le spectre de l’instabilité politique menace de nouveau la pérennité du rebond des marchés d’actions de la zone euro amorcé en juin 2012. Depuis, l’indice Euro Stoxx 50 et le CAC 40, principal représentant de la Bourse de Paris, ont rebondi de plus de 20 %. Le volontarisme affiché par Mario Draghi, le patron de la BCE, aussi bien au travers des opérations de refinancements bancaires exceptionnelles en quantités illimitées (LTRO) qu’entre les lignes de son discours estival de 2012, pour éviter un éclatement de la zone euro, y est pour beaucoup. Les investisseurs, notamment anglo-saxons, ont repris goût pour le risque en rapatriant leurs avoirs sur le Vieux Continent qu’ils croyaient perdu. Selon Fitch, les 10 plus gros fonds monétaires américains, regroupant à eux seuls 671 milliards de dollars d’en cours, soit 46 % du marché total, ont ramené leur taux d’exposition aux banques européennes à 14,5 % en janvier 2013, un plus haut niveau depuis fin octobre 2011.
Mais ce regain d’intérêt pourrait faire long feu. L’instabilité politique, bête noire de la communauté financière, surtout en période de rigueur budgétaire, pointe son nez du côté de la Botte. Les élections générales des 24-25 février ont donné une majorité de centre-gauche à la Chambre des Députés, mais n’ont pas permis de dégager une majorité au Sénat. Douchant au passage les espoirs de voir le processus de « broshing » de ses finances publiques et sans encombre. « Les résultats des élections italiennes ont créé la surprise et pourraient déclencher une nouvelle remontée de la prime de risque politique. En effet, les marchés financiers et les dirigeants politiques de la zone euro craignent que les réformes du pays en cours ne soient interrompues à la suite de ces élections » soulignent les équipes d’Allianz Global Investors.
Un avis partagé par Bruno Cavalier, chez Oddo Securities : « Une prime de risque va être imposée à l’Italie. Le pays n’a pas véritablement de problème de déficit public, il doit toutefois supporter, et refinancer, une dette considérable (près de 130 % du PIB). De l’ampleur de cette prime de risque dépendra donc largement l’évolution des marchés européens ». En l’occurrence même si l’Italie est parvenue, récemment, à se refinancer sur le marché de la dette sans dépasser le seuil psychologique des 5 %, la courbe des taux transalpins se tend. Les taux à 10 ans des obligations souveraines ont grimpé de plus de 40 points de base en deux semaines. L’étau se resserre et menace un peu plus chaque jour la reprise des indices boursiers amorcée il y a six mois. D’ailleurs, au cours du mois écoulé, l’indice Euro Stoxx 50 a replongé de 5 %, suivi de près par le CAC 40.
La faillite de l’Etat transalpin n’est certes pas programmée pour demain. Toutefois, les opérateurs redoutent une mise en place tardive des réformes qui éloignerait d’autant toute perspective d’interventionnisme de la BCE sur le marché secondaire de la dette italienne. Les inquiétudes ne portent pas sur les chiffres du déficit public, qui est resté contenu en-dessous du seuil critique des 3 % du PIB l’an dernier, et cela notamment grâce à de solides excédents primaires (solde budgétaire avant charges d’intérêt). En revanche, du côté des engagements financiers de l’Italie, le constat est plus inquiétant. La dette publique transalpine devrait atteindre plus de 127 % de son PIB en 2012 pour ensuite s’installer au-delà des 128 % en 2013. Le pays se hisse ainsi à la deuxième place des pays les plus endettés, en valeur relative, de la zone euro derrière… la Grèce. Même si la comparaison s’arrête là, les échéances sont bien réelles tout comme le risque de voir la situation dégénérer en cas de dérapage du coût de refinancement de l’Etat transalpin.