Le renchérissement de l’immobilier – principalement dû à la réglementation foncière – écarte la main-d’œuvre peu qualifiée des régions productives et participe à la pauvreté.
Conformément à son idéologie totalitaire, la Chine maoïste a longtemps restreint les migrations internes, des campagnes vers les villes, au nom du respect de la division du travail prévue par les planificateurs centraux. Elle usait notamment de deux dispositifs pour cela. Le premier est le système de passeport intérieur, le Hukou, toujours en vigueur, quoiqu’assoupli. Le second, plus intéressant, consistait à établir un monopole étatique quant à la fourniture de logements urbains. En s’auto-proclamant l’unique bailleur urbain du pays, le régime communiste s’est doté d’une plus grande capacité à contrôler les flux de populations.
Les résultats de cette politique ont été désastreux. En empêchant les Chinois des champs de migrer vers les villes (qui concentraient les activités industrielles à plus haute valeur ajoutée), le régime maoïste a maintenu des centaines de millions de personnes dans la misère en amputant la croissance économique du pays. Si le totalitarisme chinois n’est évidemment pas comparable avec les social-démocraties occidentales, l’analogie concernant les relations entre immigration, immobilier et pauvreté présente tout de même un certain intérêt.
La stagnation des salaires est surtout due à la hausse de l’immobilier
Dans un article paru le 30 août dans le magazine américain Foreign Affairs, Sahil Mahtani, analyste pour la Deutsche Bank, et Chris Miller, professeur d’histoire internationale à l’Université Tufts à Boston, imputent une partie de la stagnation des salaires aux Etats-Unis à l’explosion des prix de l’immobilier, notamment dans les grandes métropoles, en raison des restrictions foncières mises en place dans le cadre de la planification urbaine. Rien à voir donc avec les épouvantails de la robotisation ou encore de la concurrence étrangère, comme le dit Donald Trump dans ses discours mercantilistes à l’étranger.
L’accent est ici mis sur le rôle de l’immobilier, leurs effets sur la mobilité géographique des travailleurs et l’évolution de leur pouvoir d’achat. Les auteurs de l’article citent notamment une étude publiée en 2015 par deux économistes américains, Peter Ganong et Daniel Shoag, respectivement affiliés à la Harvard University et à la Harvard Kennedy School. Les deux économistes soutiennent l’idée qu’en faisant exploser les prix de l’immobilier dans les grandes métropoles, la réglementation foncière maintient de fait les travailleurs peu qualifiés en dehors des régions les plus productives.
Ils font le constat d’une mobilité spatiale plus faible aux Etats-Unis, où les travailleurs peu qualifiés, en raison des prix de l’immobilier, osent de moins en moins se déplacer vers les zones les plus riches, comparé aux décennies passées. Non seulement ce phénomène entrave la mobilité sociale des populations les plus pauvres, mais il conduit en plus à une spécialisation des industries sous-optimale qui ralentit la croissance économique. La réglementation foncière agit donc comme une politique migratoire qui ne dit pas son nom, engendrant une ségrégation de fait.
Voilà des conclusions susceptibles d’inspirer tous ceux qui, en France, déplorent la ségrégation croissante qui caractériserait un certain nombre de quartiers populaires. Seulement la classe politique ne semble pas disposée à faire sauter tous les freins politiques à la mobilité géographique des populations. A défaut d’engager une véritable déréglementation du marché de l’immobilier ou du travail, la politique de la ville, officiellement destinée à favoriser le développement des quartiers pauvres, se contentera donc de continuer à faire ce que l’on fait de mieux en France : acheter la paix sociale à coup de subventions plutôt que de mettre en place les institutions qui favoriseraient l’enrichissement des populations enclavées.
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