En moins de deux ans, les Initial Coin Offerings (ICO), ces opérations de levée de fonds via émission de jetons cryptographiques, ont atteint une popularité qui dépasse la communauté de la blockchain et concerne l’ensemble du secteur de l’innovation technologique. Les ICO bouleversent tout à la fois le financement de l'innovation, permettant aux start-up d’accéder à un financement participatif mondialisé et les rapports de force habituels entre capital-investisseurs et entrepreneurs.
L’imbrication directe entre l’usage économique et la valorisation financière favorise l’alignement des investisseurs et des équipes opérationnelles pour la réussite du projet. Enfin, de nouveaux modes de gouvernance se mettent en place, inspirés du modèle des réseaux décentralisés.
Les ICO prennent une place croissante dans le financement de l'innovation. Représentant 1% de l'investissement mondial des capitaux-risqueurs en 2017, le financement par ICO devrait dépasser 3% en 2018 et tendre vers 10% d’ici la fin de la décennie.
Cette opportunité pour la French Tech n’a pas échappé aux pouvoirs publics qui encouragent l’écosystème et lui offrent un cadre qui sera déployé en fin d'année grâce à la loi Pacte. Par l’instauration d’un régime de visa optionnel, cette loi prévoit de protéger les souscripteurs d’ICO, en particulier contre toute forme de fraude, et d’obliger les émetteurs à respecter les principes de conformité (anti-blanchiment notamment). Pour accélérer l’alignement des acteurs, nous proposons que la loi Pacte et ses textes d’applications permettent la mise en place d’un mécanisme de type sandbox, comme cela a pu notamment être fait avec succès au Royaume-Uni et au Canada.
Il restera à clarifier le cadre fiscal et européen. Nous proposons que la France porte au niveau européen deux réformes nécessaires à l’épanouissement des ICO en Europe.
D’une part, l’allègement de la fiscalité : les ICO étant assujetties à la TVA, il conviendrait de leur appliquer un taux réduit, pour réduire la taxation a priori des capitaux levés – les levées de fonds et les entrées en bourse ne subissent pas cette taxe. A défaut, les ICO continueront à être principalement menées depuis des Etats en mesure de proposer une fiscalité attractive, sinon absente. Cet allègement constitue l’une des clefs pour renforcer l’attractivité de la place de Paris dans l’écosystème.
D’autre part, une harmonisation communautaire qui permettrait de généraliser le régime de labellisation, sous l’égide de l’AMF, qui doit être mis en place en France avec la loi Pacte, de manière à sécuriser la promotion des ICO françaises dans l’ensemble du grand marché européen. Une telle initiative prolongerait utilement la démarche récemment annoncée des gouvernements français et allemands de rapprocher leur réglementation en la matière.