Analyse économico-politique de la France : Les causes de sa décadence

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Par Daniel Moinier Modifié le 11 avril 2022 à 7h30
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2463 MILLIARDS €Le PIB de la France en 2021 a atteint 2.463 milliards d'euros.

Ce mois d’avril 2022 peut être une période cruciale pour l’avenir de notre pays. Personne ne peut ignorer que nous sommes en campagne électorale et que le sort de la France dépendra du scrutin final du 24 avril. Vous allez dire comme à chaque élection ! Certainement pas ! et pourtant la France vient de voir sa dette passer allégrement les 100%. 98,1% avant la crise Covid et jusqu’à 116,3% au plus haut fin septembre 2021. Ce qui représente 2834,3 Mds d’euros, soit la plus forte dette des pays européens. De plus, le taux d’intérêt de la dette qui était encore au taux de 0.35%, vient de passer à 1,20% le 03 avril dernier, ce qui va fortement augmenter nos remboursements.

Depuis l’année 2020 et l’arrivée du Covid, la France a emprunté 560 Milliards d’euros soit 24% du PIB.

Le PIB de 2019 était de 2437 Mds d’euros, il a baissé en 2020 à 2302 Mds (- 7,9%) et remonté à 2463 Mds en 2021 (+ 7%) suite à une forte reprise.

Il est intéressant de rappeler que le traité européen de Maastricht de 1992 fixait une limite de dette publique à 60% du PIB. La France l’a dépassée en fin d’année 2002 pour ne plus repasser en dessous.

Alors que la crise Covid s’estompe et que la reprise bat son plein, que va devenir notre PIB avec la guerre en Ukraine et toutes ces perturbations économiques internationales ?

Les causes de notre enlisement progressif depuis plus de 50 ans

En premier les deux chocs pétroliers dus à deux guerres : En 1973, celle du Kipour et en 1979, celle de l’Iran.

-Le premier est devenu une crise mondiale du prix du pétrole avec l’embargo de l’OPEP et l’abandon des accords de Bretton-Woods qui ont fait multiplier son prix par quatre ! Les effets vont se faire sentir jusqu’en 1978.

-Le deuxième choc pétrolier a pris sa source avec la révolution iranienne et la guerre Iran-Irak amplifiée par une demande mondiale grandissante. Le prix a été multiplié par 2,7 entre 1978 et 1981. Tous les pays ont été touchés mais plus encore les pays d’Asie et du tiers monde.

-Les années Mitterrand : le 04 octobre 1981, 1ère dévaluation du franc de 3%. Puis le 12 juin 1982, 2ème dévaluation du franc de 5,75%, suivi d’un fort plan de rigueur et cela ne s’arrangeant pas, une 3ème dévaluation le 21 mars 1983 de 2,75% a été necessaire. Le franc a perdu 8% par rapport au mark.

C’est surtout 4 ordonnances qui ont bousculé complètement notre économie, entrainant la France dans une grave récession, dévaluations et forte augmentation du chômage :

5 ème semaine de congés payées

39 heures payées 40

8 mai redevenu férié (enlevé par VGE)

Retraite passant de 65 à 60 ans : Ce qui a occasionné une perte sur 5 années (65 – 60 ans) de 27 Milliards d’heures travaillées soit 300 Mds d’euros (perte par année depuis 1983 en euros d’aujourd’hui).

Il faut souligner aussi que ces 5 années de retraite supplémentaire n’ont pas été cotisées, soit une perte de 4,7% part salarié et 8,2% part employeur sur chaque heure supprimée. Sur 1800 heures effectuées par année par 23.804.000 salariés, c’est énorme. Si cela était calculé par notre euro d’aujourd’hui et un salaire moyen de 2500€/mois, il y aurait encore 7,67 Milliards perdus.

Les dévalutions et les largesses salariales ont très fortement diminué les rentrées pour l’état et le pouvoir d’achat de nos concitoyens. Le seul recours trouvé : Augmentation des charges et impôts.

-En 1982, la TVA classique passe de 17,6 à 18,6%, 20% aujourd’hui.

-Mitterrand initiateur du moins 3% de déficit autorisé par an.

-30 novembre 1988 : Création du RMI, la « machine » pour faire disparaître des chômeurs et diminuer le nombre de pauvres en France, devenu RSA en 2009.

-La CSG a été créée en 1991 pour diminuer la dette sociale avec un taux de 1,1% et la RDS en 1996 au taux de 0,5%. Les différents gouvernements se sont servis de la CSG pour essayer de réduire les déficits de l’état, des retraites, de la Sécurité Sociale, de l’Assedic... Elle touche avec des taux très variable et modulables,

les revenus professionnels, du patrimoine, les placements, les retraites, les allocations chômage, les préretraites d’invalidité… le total avec le prélèvement de solidarité et la RDS peut atteindre 17,2% !

-Les charges sur salaires qui étaient en 1945 de 6% employé et 6% employeur (pour info 3,5% en 1936 pour les 2) sont passées de 21% à 23% part salariée et de 25 à 42% part patronale, soit multiplié par 3,66 part employé et par 5,5 pour la part moyenne employeur !!! Même si de fortes minorations ont été mises en place par François Fillon au niveau du smic et 1,5 fois le smic pour essayer de sauver nos entreprises.

-Les 35 heures en 2000 ont donné le coup de grâce à notre économie. C’est une baisse des heures travaillées de plus de 10% et un coût employeur de plus de 20% si l’on tient compte de l’investissement pour des employeurs plus industriels. Pendant cinq ans, ces employeurs ont boosté la productivité pour remonter leur marge brute, celle-ci était tombée à 28,6%, alors que les Allemands étaient à 41,2%, les Italiens à 40,4% et les Espagnols à 41,4%. Le CICE de François Hollande l’a fait remonter à 32%. Mais nous avons encore près de 10 points de différence avec l’Allemagne ce qui peut expliquer pour une part, notre mauvais score et déficit à l’export.

-Suite aux différentes hausses d’impositions et la création de nouveaux impôts, la barre était devenue trop haute pour notre tissu industriel qui en partie a rendu l’âme. Les faillites ont été de plus en plus nombreuses augmentant d’autant les licenciements avec auparavant de nombreux blocages d’usine, des saccages, des manifestations…jusqu’à mai 68, trois mois de blocage du pays.

Les délocalisations se sont enchaînées dans beaucoup de secteurs surtout ceux en concurrence directe avec les pays de l’est, du Magrehb et encore plus ceux d’extrême Orient, le premier ayant été le Japon, puis tous les autres, y compris le Bingladesh, l’Indonésie… et aussi avec une concurrence européenne des pays ayant un niveau de vie encore un peu inférieur avec beaucoup moins d’imposition.

-La France est le pays d’Europe où la part de l’industrie dans le PIB est maintenant la plus faible (hors Grèce).

Cette part n’est plus que de 10 %, contre 25 % dans les années 1975, alors que la norme en la matière se situe, au plan européen, à 20,0 %. Et les effectifs de ce secteur d’activité sont passés de 6,2 millions de personnes à la fin des « Trente glorieuses » à 2,7 millions à présent. Notre machine économique se trouve donc amputée de plus de la moitié de son potentiel contributif à la création de richesse du pays.

Le tableau des chiffres ci-dessous publié par la revue suisse IRDEM mérite d’être examiné avec attention :

NOTA : Pourquoi la Suisse est si performante : Elle a toujours gardé la retraite à 65 ans et sans pré-retraite instituée mais aussi 43 heures de travail par semaine, dont 1 heure gratuite instituée par votation suite à la crise de 2008.

-La production industrielle apparaît ainsi comme une variable explicative très sûre de la prospérité des pays. La France est seulement à 4 500 dollars de production industrielle par habitant, alors que l’Allemagne se situe à 7 700, la Suède à 8 300 et la Suisse à 12 400. Avec une production industrielle par habitant relativement faible, notre pays a tout naturellement un revenu per capita qui est loin d’être l’un des plus élevés d’Europe : en 2017, il était seulement selon les statistiques de la BIRD, de 38 476 dollars, contre 48 223 dollars aux Pays Bas, 53 442 dollars en Suède, et 80 189 dollars en Suisse.

Cet affaiblissement considérable du secteur industriel dans notre pays explique parfaitement le taux de chômage très élevé caractérisant l’économie française, le déficit de notre balance commerciale et plus de 8 millions de pauvres malgré les aides sociales les plus élevées du monde : 776 Mds par an (gestion comprise) et des prélèvements à 47,6% du PIB alors que la moyenne de l’UE est de 39,7% et de l’OCDE à 34,1%.

-La contribution du secteur industriel à la formation du PIB est passée, dans notre pays, de 25,0 % dans les années 1975 à 10,0 % aujourd’hui (hors BTP), alors que la norme en la matière se situe, au plan européen, à 20,0 %. Et les effectifs de ce secteur d’activité sont passés de 6,2 millions de personnes à la fin des « Trente glorieuses » à 2,7 millions à présent. Notre machine économique se trouve donc amputée de plus de la moitié de son potentiel contributif à la création de richesse du pays. Aussi, avec ce taux de 10,0 %, qui est le plus faible de tous les pays de l’Union européenne, la Grèce mise à part, notre système économique doit-il être considéré comme sinistré.

-Les cessations anticipées d’activité ou pré-retraites ont commencé très tôt : Création dans les années 60 de l’AS-FNE, puis en 1972 la Garantie de ressources, en 1982 la cessation progressive d’activité, en 1983 la DRE, en 1992 la PRP, en 1994 l’ARPE, en 1995 le CFA, en 1998 la CAATA et la CATS, en 2002 les RACL et les Retraites Anticipées pour Handicap, en 1999 le CS, en 2010 les Retraites Anticipées pour les personnes exposées à l’Amiante et la possibilité de partir à 60 ans si entrée en activité avant 18 ans, en 2012 décret Hollande, départs anticipés pour carrières longues et carrières commencées avant 20 ans et les Retraites Anticipées pour Pénibilité, en 2014 le C3P.

-Le seul décret Hollande de 2012 (préretraite avec démarrage de carrière avant 20 ans) a mis sitôt après 153.000 salariés de plus en préretraite avec un coût 11,5 milliards de plus par année.

-Ce lancement de préretraites ou retraites anticipées est venu de la théorie que plus on mettait des seniors en retraite, plus il y avait d’emplois pour les jeunes. Grave erreur, il a fallu plus de 40 ans pour s’apercevoir que c’était l’inverse. Plus on a mis des seniors en retraite tôt, plus le chômage des jeunes a explosé.

-Le constat est simple : Le taux d’emploi des jeunes qui était à peu de chose près égal à celui des seniors : A moins de 5% dans les années 1969/70 est passé à plus de 28% dans les années 2012/13 !

NOTA : Pour ne pas amputer encore plus les charges du budget français, Il serait nécessaire d’indexer les pré-retraites sur l’augmentation de la durée d’activité et l’idéal sur la durée de vie des retraités.

Explications : Concordance entre emploi seniors et emploi jeunes:

  • 1 personne qui part en retraite = 1 de salaire (de 60 ans environs)

  • = 1 de charges (salariées et employeur)

  • = 0,7 de pension payée

  • Soit : = 2,7 de perdu

  • 1 jeune entre 20/25ans = 0,40 de salaire

  • = 0,40 de charges (S+E)

  • Soit = 0,80

  • 2,7 par rapport à 0,80 = 3,375 c'est à dire plus de 3 jeunes embauchés pour ne pas y perdre en PIB, pouvoir d'achat, charges, impôts…

Si l'on rajoute les pertes de pouvoir d'achat et impôts supplémentaires :

  • + 35% de revenu en moins (différence salaire/pension)

  • + 40% d'impôts en moins (idem)

  • Soit 0,7 en plus, on arrive donc à la valeur de 4 jeunes

  • Si l’on voulait simplement garder le même niveau de PIB, pouvoir d’achat….,il faudrait embaucher 4 jeunes (20 à 25 ans) à chaque départ de retraité pour être simplement à égalité. (Ce qui ne serait même pas suffisant pour ne plus être en dette, avec du chômage)

  • Chaque départ empêche donc, environs 3 jeunes embauchés. (Ou équivalent financier)

Sans parler de la perte de savoir-faire moins mesurable.

Autre constat : A chaque 2 salariés licenciés, 1 autre va pointer au chômage sous les 3 mois.

L’inverse est vrai : Avec l’embauche de 2 chômeurs, c’est un autre qui retrouve un emploi sous trois mois.

Autre perte :

-En 1945, Il y avait 6 salariés pour un retraité, en 2021, il n’y avait plus que 1,4 salarié pour 1. Sans allonger la durée d’activité notre système va « exploser » dans peu d’années !!!

C’est la durée de vie qui augmente encore de 7 heures par jour (soit 23 années depuis 1945) alors que la durée de travail qui a régressé (trop) contribue à presque tous nos déficits/Dettes.

-En conséquence, il manquait avant Covid plus de 25% de PIB, soit 25% d’heures travaillées puisque c’est proportionnel dans presque tous les pays, pour avoir un état avec des comptes au minimum équilibrés. Soit un manque de 11.500 heures travaillées sur la durée de vie de chaque salarié.

Il serait nécessaire pour être pérenne d’établir la durée d’activité proportionnelle à la durée de vie des retraités.

Pour terminer, une comparaison France-Europe

Rien que sur ces 6 postes, le montant de dépassement financier est de : 138 Milliards d’euros soit bien plus que le déficit annuel hors Covid. Malgré cela, les résultats ne sont pas à la hauteur, notamment dans l’enseignement, la santé, le chômage…

Aucun(e) candidat(e) n’a osé mettre dans son programme une augmentation du temps de travail hebdomadaire (certains veulent même le diminuer à 32 h voire 28 h !!!). J’oubliais, si, Valérie Pécresse avait bien mis les 39 heures et au fil de la campagne cela s’est transformé en négociations entre syndicats et entreprises !

www.danielmoinier.com

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Daniel Moinier a travaillé 11 années chez Pechiney International, 16 années en recrutement chez BIS en France et Belgique, puis 28 ans comme chasseur de têtes, dont 17 années à son compte, au sein de son Cabinet D.M.C. Il est aussi l'auteur de six ouvrages, dont "En finir avec ce chômage", "La Crise, une Chance pour la Croissance et le Pouvoir d'achat", "L'Europe et surtout la France, malades de leurs "Vieux"". Et le dernier “Pourquoi la France est en déficit depuis 1975, Analyse-Solutions” chez Edilivre.

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