Guerres de devises : le temps de la récession

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Par Jim Rickards Publié le 13 novembre 2015 à 5h00
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1,05 $L'euro est passé de 1,30 à 1,05 dollar en janvier 2015.

Pour décrire la dynamique des guerres de devises, j’utilise systématiquement des images de jeu comme le tir à la corde ou la balançoire à bascule. Je veux signifier par là que les guerres de devises ne sont jamais un pari à sens unique. Les taux de change ne cessent d’enchaîner des mouvements d’aller-retour.

La guerre monétaire entre 1921 et 1936 est un bon exemple. En 1921, les Allemands détruisirent leur monnaie avec la célèbre hyperinflation de la République de Weimar. En 1925, la France et la Belgique dévaluèrent leur monnaie, ce qui renforça la livre sterling et le dollar américain. En 1931, en représailles, le Royaume-Uni dévalua la livre sterling, ce qui mit la pression sur la France et les Etats-Unis. Puis, en 1933, les Etats-Unis dévaluèrent le dollar, reportant la pression sur le Royaume-Uni et mettant encore plus de pression sur la France. Finalement, en 1936, la France et le Royaume-Uni dévalèrent à nouveau leur monnaie par rapport au dollar.

Ceci est le tristement célèbre enchaînement de dévaluations "protectionnistes". On peut aussi prendre l’exemple de la guerre monétaire actuelle. A partir de 2008-2010, nous avons un yuan chinois faible et un dollar fort. Puis, en 2011, les Etats-Unis fabriquèrent un dollar faible. L’indice du dollar de la Fed atteint un niveau le plus bas jamais enregistré en août 2011. Au même moment, l’or a atteint un plus haut record — ce qui n’est pas un hasard.

Puis, le yen japonais fut déprécié sous les Abenomics lancés en décembre 2012. Mi-2014, il était temps de déprécier l’euro, qui s’est effondré de 1,30 $ à 1,05 $ en janvier 2015. En conséquence de quoi, mi-2015, le dollar atteint un plus haut depuis 10 ans. Puis la Fed s’est émue et commença à prendre ses distances face à la hausse des taux, ce qui fit baisser le dollar d’un cran. Le fait est qu’il n’y avait pas de paris à sens unique. Le dollar américain est devenu plus fort entre 1921 et 1933. Puis il s’est affaibli entre 1933 et 1936 pour se renforcer à nouveau après 1936. Le dollar était également fort en 2010, faible en 2011 et fort à nouveau en 2015. On peut appliquer la même analyse aux autres principales monnaies. Voilà comment se déroulent les guerres de devises.

Comment y réagir en tant qu’investisseur ? ?

La clé pour investir durant les guerres de devises est de se centrer sur la dynamique sous-jacente et de garder l’esprit alerte. Nous ne considérons jamais rien comme définitif. Nous sommes à l’affût des signaux qui nous diront quand vont arriver les tournants décisifs et ajustons en conséquence nos recommandations. Il semble qu’aujourd’hui nous soyons arrivés à un tournant.

Une grande partie de la nature du mouvement de balancier des taux de change au cours des huit dernières années s’explique facilement par les manipulations des banques centrales. L’impression monétaire de la Réserve Fédérale pendant le QE2 explique la faiblesse du dollar en 2011. La Banque du Japon s’est engagée à la fois dans un QE et dans un soi-disant QE (utilisant de l’argent imprimé pour acheter des actifs autre que des obligations gouvernementales, comme des actions et de la dette d’entreprises) pour affaiblir le yen en 2013. La Banque centrale européenne a utilisé à la fois des taux d’intérêt négatifs et de l’assouplissement quantitatif pour affaiblir l’euro en 2014. La Banque populaire de Chine a utilisé un mix de réduction des taux d’intérêt, de réduction des réserves bancaires et d’interventions directes pour affaiblir le yuan en 2015.?Il est toujours important de garder un oeil sur les banques centrales.

Pourtant, nous recevons des signaux d’une source encore plus puissante que les banques centrales. Cette source est le spectre de la récession mondiale. Que les banques centrales livrent des guerres de devises lorsque le monde connaît la croissance, c’est une chose. Il ne s’agit que de voler la croissance de vos partenaires commerciaux. Mais lorsque le gâteau ne grossit plus assez vite, vous pouvez vous emparer d’une plus grosse part en la volant à la personne assise à côté de vous avec une monnaie bon marché. Voilà ce qu’est une récession. Dans cet environnement, les guerres de devises deviennent plus cruelles et la coordination se brise.

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Jim Rickards est rédacteur en chef d’Intelligence Stratégique et d’Alerte guerre des devises

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