Je dois vous avouer que ce monde continue de me surprendre et pas dans le bon sens du terme.
Je suis assez ébahi du niveau de stupidité atteint par notre population et par ses journalistes qui enchaînent les directs sur la guerre en Ukraine sans recul historique, sans analyse critique de la situation, sans une revue des forces et des faiblesses, et je ne parle pas de celles des Russes (il est de bon ton d’en parler 24h sur 24) mais des nôtres ce qui est autrement plus utile si l’on veut gagner une guerre.
Comprenez-moi bien.
J’ai une conscience historique aigüe.
Et l’histoire qui est tragique regorge d’exemples de guerres dans lesquelles nous nous sommes lancés la « fleur au fusil » et dans lesquelles nous nous sommes fait rétamer.
Gagner une guerre et mieux, gagner la paix, est un défi d’une immense complexité.
Alors lorsque j’entends tous nos « va-t-en-guerre » qui nous expliquent doctement qu’il faut faire plus pour l’Ukraine et pourquoi pas attaquer directement la Russie pour protéger le pays de Tchernobyl, ce qui me vient à l’esprit ce sont les images des mêmes abrutis qui partaient en 1914, il y a un siècle la fleur au fusil.
C’est le moment de visionner à nouveau ces images d’archives mes amis.
Ils chantaient, ils faisaient la fête, ils trouvaient l’idée chouette d’aller faire la guerre, c’était viril et tellement romantique !
De vous à moi, ils ont drôlement déchanté une fois arrivés dans les tranchées. Les tranchées. Mon arrière grand-père est revenu de celle de Verdun une croix de guerre accrochée à sa poitrine. Mon grand-père est revenu de la seconde guerre mondiale et d’Indochine avec une tripotée de croix de guerre accrochées à la poitrine. Dans tous les cas la guerre c’est moche. C’est dégueulasse. Et en Europe, avec un siècle de recul par rapport à nos anciens de 14, nous savons à quel point les guerres sont longues, terribles, effroyables.
Alors, ne chantons pas les louanges de la guerre. Du haut de l’histoire de l’Europe qui nous contemple, c’est indécent.
Tous ceux qui aujourd’hui travestissent la vérité et la réalité pour exciter des sots porteront une responsabilité historique dans les futurs massacres qui ne manqueront pas de se produire si le conflit devait s’amplifier, se régionaliser et pourquoi pas… se mondialiser.
Nous sommes à deux doigts d’une guerre mondiale.
Ne nous leurrons pas, nous sommes à deux doigts d’une nouvelle guerre mondiale.
L’enjeu ?
Le leadership mondial.
Les acteurs ?
Les Etats-Unis (l’Empire du bien et les « gentils ») avec les chiots Européens d’un côté. De l’autre, l’axe sino-russe dit les méchants, le camps du mal.
Pour le ministre chinois des affaires étrangères, donc pour Pékin, l’alliance avec les Russes est solide comme un roc.
Pour gagner une guerre il faut analyser ses forces et ses faiblesses.
Encore une fois, celles des Russes nous aimons en parler. Moi j’aime parler de ce que les autres veulent éviter. Je veux évoquer les risques que l’on ne veut pas voir. C’est ainsi qu’éventuellement, parfois, on peut sauver l’essentiel. De manière générale on prêche dans le désert, mais cela doit tout de même être fait.
Voici de manière très simplifiée mais pas simpliste la situation.
L’armée russe est une armée globalement mauvaise avec du matériel pas terrible et très ancien. L’armée russe, c’est l’armée rouge qui a changé de nom, mais c’est globalement les mêmes approches. On multiplie le nombre de chars et de tanks, on compense la qualité par le nombre et on rase tout. L’armée russe c’est aussi un peu comme l’Allemagne de 1944 des « armes spéciales » très en avance en termes technologiques comme leurs supers torpilles « squale » ou leurs missiles nucléaires hypersoniques. Mais comme l’Allemagne de 44, pas forcément en nombre suffisant pour gagner un conflit conventionnel avec l’Otan.
Sur le papier, nous sommes sacrément plus forts qu’eux en données corrigées de la fin du monde dans le cas d’un conflit nucléaire.
Le problème, c’est que toute notre supériorité est basée sur les effets multiplicateurs de force apportés par la haute technologie.
Dans le cas d’une extension du conflit, la stratégie russe consistera à réduire nos effets multiplicateurs de forces. Supprimer nos satellites, nos communications, nos ordinateurs. Si la Chine cesse de nous fournir en millions de pièces détachées pensez-vous vraiment que nous pourrons continuer à produire des missiles anti-char, pour avion et des obus pour canon ? Pensez-vous que nous pourrons faire rouler nos chars qui nécessitent des miroirs, des puces, des stabilisateurs de visée et tout le tintamarre d’une logistique impressionnante ?
Pensez vous que nous avons assez de stocks alors que la France ne produit même plus ses fusils et ni même ses munitions ?
On se moque de la Russie qui semble patiner en Ukraine.
Et vous savez-quoi ?
Elle patine !
Et vous savez pourquoi ?
Parce que nous lui savonnons la planche.
Je ne vous dis pas qu’il ne faut pas le faire et ce n’est pas le but de mon propos, je dirais même que d’un point de vue stratégique user au maximum les forces russes en Ukraine en faisant absorber le choc de la poussée russe par les Ukrainiens c’est une excellente idée. Chaque char russe détruit par les Ukrainiens sera un char russe que nous n’aurons pas éventuellement à affronter.
Non, la question est ferions-nous mieux et combien de temps allons -nous pouvoir tenir ?
Si nous avons livré 17 000 missiles anti-char à l’Ukraine et 2 000 stinger- contre les avions, à votre avis, ils nous en restent combien maintenant ?
Je vous pose la question autrement. Si demain l’armée russe pousse vraiment fort en rasant tout sur son passage, et que nos 17 000 missiles sont détruits en Ukraine, on arrêtera les Russes avec quoi ?
Quelle est notre capacité de production ? Combien de temps peut-on tenir un conflit de très haute intensité ?
J’ai un début de réponse à vous fournir.
Nos arsenaux sont aussi vides d’armes, de munitions, et de pièces détachées que nos stocks de masques étaient prêts il y a deux ans lors de la pandémie.
Les Russes se préparent depuis 8 ans.
Ils repèrent les câbles sous-marin, ils dézinguent des satellites ce qui nous fait hurler mais ils peuvent nous couper le son et l’image et ils le feront nous plongeant dans la réalité d’un conflit du début siècle. Ils préparent leur agriculture, ils préparent des abris anti-atomiques, ils rendent leur système aussi résilient et autonome que possible.
A la fin, ce sera char contre char, fantassin contre fantassin, fusil contre fusil.
Et à ce jeu, sans nos « effets multiplicateurs de force », ils nous restera 200 chars Leclerc (et encore je ne prends pas en compte ceux qui sont en panne) à opposer aux vieux chars russes, certes, mais vieux par milliers. Nous aurons des millions de conscrits par rapport à nos trois divisions de « professionnels » et une population qui ne sait même pas tenir un fusil et nos bobos citadins qui considèrent une arme comme un truc de fou furieux et de déséquilibré.
Si le conflit devait durer, si le conflit devait s’élargir, si la Chine rentrait elle aussi dans la partie côté russe, nous nous retrouverions très vite sans rien.
Rien.
Plus rien.
Plus une pièce, plus un ordinateur, plus un téléphone, plus un smartphone, plus une bagnole. Rien.
La Russie possède l’énergie la plus abondante de la planète et des réserves immenses par sa géographie impressionnante. La Chine possède toutes les usines.
Je vais vous le dire autrement, mon analyse m’amène à la conclusion suivante. En cas de conflit conventionnel nous opposant (nous l’Otan) à une alliance Russie/Chine, nous perdons le conflit en quelques semaines. Je pense également que nous préfèrerons l’occupation à l’annihilation nucléaire.
Ne faites pas l’erreur de sous-estimer les Russes, ne croyez pas que Poutine soit fou. Les Russes connaissent nos faiblesses bien mieux que nous, puisque nous n’avons pas le droit d’en parler, de les évoquer comme il se devrait.
Il n’y aura personne pour partir, comme en 14 la fleur au fusil quand le canon russe tonnera.
Nous livrerons la France sans même nous battre.
Nous gagnerions donc à plus d’humilité, de sagesse, de pondération et la négociation reste encore la moins mauvaise des solutions et des options.
En attendant, notre économie va se faire ravager par les prix de l’énergie, notre confort va considérablement diminuer, et n’imaginez pas que cette guerre si proche et si loin à la fois sera indolore. Même Bruno le Maire qui ne voit jamais rien venir vient de demander aux Français de… réduire la température dans leurs maisons. Pauvre mamamouchi. S’il savait seulement. Des millions de Français mettent déjà des pulls et baissent le thermostat et cela depuis plusieurs années déjà.
Il est déjà trop tard, mais tout n’est pas perdu.
Préparez-vous !