Avantages et inconvénients d’une sortie ou d’un maintien de la Grèce dans l’euro

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Par Pascal de Lima Modifié le 28 octobre 2012 à 17h38

On s’interroge souvent sur les effets de la sortie de Grèce de la zone euro. Est-ce positif ou négatif ?

Ce débat reste assez idéologique en fait. On croit souvent que le fait d’être plutôt favorable à une sortie de la Grèce de la zone euro, cela signifie nécessairement que l’on est contre l’Europe. Très souvent les eurosceptiques ne sont pas contre l’Europe mais pour une autre Europe ainsi qu’une autre monnaie unique avec des institutions social-démocrates. L’euro aurait davantage exacerbé les divergences économiques qu’assuré une quelconque convergence même non homogène.

A partir de là il est possible d’évaluer le coût d’opportunité, c'est-à-dire le coût de renonciation à la zone euro. Il est possible de justifier économiquement une sortie de la zone euro au-delà des aspects politiques et psychologiques. Comparons les gains et les coûts de plusieurs scenarios possibles.

Première situation : le maintien de la Grèce dans la zone euro

Concernant les gains pour la zone euro du maintien de la Grèce dans la zone euro (A) : Il se résume aujourd’hui aux effets bénéfiques d’une politique de change inexistante, mais ces effets bénéfiques ont déjà bien été absorbés par les marchés si l’on peut dire les choses ainsi…ces gains sont forts certes sur le plan symbolique, et dans l’histoire de la construction européenne, et dans le domaine du psychologique élément essentiel au fonctionnement des marchés financiers. On peut ajouter quand même les gains économiques passés liés au rattrapage opéré par les pays du sud en matière de croissance économique pendant les premières années de la décennie 2000, l’amélioration des niveaux de vie, la qualité de beaucoup d’autres aspects de la vie quotidienne. Ces gains d’ailleurs semblent assez indépendants de l’existence de la Grèce dans la zone euro. On peut librement ici ajouter d’autres gains.

Concernant les coûts pour la zone euro du maintien de la Grèce dans la zone euro (B) : Le maintien de la Grèce dans la zone euro a un coût assez visible. Evidemment tous les plans de sauvetage depuis le début de la crise et une situation de puit sans fond où pour la Grèce, les taux d’intérêt à dix ans sont toujours très supérieurs aux taux de croissance. Il faut ajouter à cela les coûts des politiques d’austérité réalisées en même temps et qui ponctionnent la croissance, politiques initialisées par la Grèce en premier lieu faut-il le rappeler avec un effet de contagion politique. Enfin les coûts sociaux bien visibles si l’on considère que le cas de la Grèce a propulsé un certain nombre de choses en Europe… Il faut ajouter un vrai risque systémique facilement compréhensible par la méthode médicale. Comme la « cellule malade » est dans la zone, elle risque de contaminer les autres. D’ailleurs le principe du défaut déguisé entre dans cette catégorie puisque les décotes des créanciers sur la dette grecque ont bien été effectives et mises à exécution.

Concernant les gains pour la Grèce du maintien de la Grèce dans la zone euro (C) :

Appelons les C : Ici, entre le principe de l’aléa moral. Quel est l’intérêt de la Grèce de respecter certains critères si elle considère que de toute façon les autres pays de la zone paieront. Ensuite, elle bénéficie aussi d’un espace commercial de qualité et compétitif qui lui permet de satisfaire l’ensemble des besoins de la population à des conditions intra-branches avantageuses. D’autres gains peuvent être ajoutés. Par exemple étant un pays plus risqué en matière d’investissement, elle a pu réussir à attirer des investisseurs internationaux preneurs de risque.

Concernant les coûts pour la Grèce de son maintien dans la zone euro (D) :

Les coûts représentent la quote-part de la Grèce à l’ensemble des ressources du FESF. On peut ajouter bien sûr le coût économique pour la Grèce des divergences économiques accentuées ces derniers temps notamment par rapport aux pays du Nord. Cette liste non exhaustive peut s’étendre.

Seconde situation hypothétique celle-ci de sortie de la Grèce de la zone euro

Concernant maintenant les gains pour la zone euro sans la Grèce (E) : ici, on retrouve l’arrêt du risque systémique et la possibilité le cas échéant de mobiliser des capitaux vers des pays récupérables, c’est-à-dire lorsque le différentiel « taux d’intérêt à 10 ans – taux de croissance économique » est le plus faible possible pour simplifier.

Concernant maintenant les coûts pour la zone euro sans la Grèce (F) : objectivement il est difficile de dire que l’absence de la Grèce soit une catastrophe pour l’économie européenne. Sur le plan strictement économique et les chiffres ont été donnés, le poids de la Grèce dans la zone euro est très faible et la Grèce n’est pas une plateforme de propulsion de l’économie européenne vers d’autres zones géographiques, les échanges en Zone euro étant essentiellement intra-branches. Ici l’inquiétude est surtout le défaut du coup total et non déguisé de la Grèce vis-à-vis de ses créanciers et le risque d’une décote encore plus élevée.

Concernant les gains pour la Grèce de la sortie de la Grèce de la zone euro (G) :

Ici, il faut raisonner en deux temps et l’on oublie bien volontairement le second temps, en général au bout de six mois (cas de nombreux pays qui ont décroché d’une zone à ancrage monétaire et qui ont dévalué). L’économie est caractérisée par des cycles. Ici, dans les commentaires et pour le cas d’une éventuelle sortie de la Grèce de la zone euro, il n’existerait plus de cycle. Certes une récession encore plus profonde est possible avec exclusion du financement des marchés financiers à cause du défaut probable officiel, mais une récession s’accompagne toujours d’une stabilisation et d’une reprise économique au bout de 6 mois après la sortie de la zone d’ancrage monétaire (reprise de la production, diversification de l’activité, reprise en main des affaires publiques…). Cette reprise économique est permise par des politiques économiques appropriées et non auto suicidaires. Les indépendances monétaire et budgétaire en somme.

Concernant les coûts pour la Grèce de sa sortie de la zone euro (H) : on dit que si la Grèce sort de la zone euro, il existe plusieurs types de coûts : d’abord une inflation importée, une baisse considérable du pouvoir d’achat des grecs, l’explosion de la dette en euro suite à une forte dévaluation du drachme (pas évidente puisque une part importante de la dette publique grecque est de droit privé national). On évoque aussi souvent le risque systémique en oubliant que de toute façon celui-ci existe déjà dans la zone euro. Admettons alors la contagion. Remarquons que la métaphore médicale ne permet pas de valider l’assertion car lorsqu’une « cellule malade » est enlevée on comprend moins l’idée de contagion, et comment celle-ci peut avoir lieu lorsque la dette nationale est détenue par des nationaux. En revanche à l’intérieur de la zone euro, celle-ci existe réellement.

Conclusion : A la différence des coûts et gains du maintien de la Grèce dans la zone euro, les coûts et gains d’une sortie de la Grèce de la zone euro sont des estimations tournées vers le futur et extrêmement aléatoires alors que les coûts et les gains de la Grèce dans la zone euro, eux, peuvent plus facilement être estimés. Du coup, les coûts et gains tirés d’une situation hypothétique de sortie de la Grèce doivent être actualisés par un « discount factor », un taux d’intérêt de référence pour ramener ces montants à leur valeur présente. Cette liste n’est bien évidemment pas exhaustive, libre à chacun d’y intégrer des éléments économiques mais au final une sortie de la Grèce de la zone euro est-elle bénéfique ? Dans l’hypothèse ou il est possible de déterminer un coût du capital, un discount rate en sorte ou encore un taux d’actualisation, alors le maintien de la Grèce est préférable si (A+C) – (B+D) non actualisée > (E+G) – (F+H) actualisées.

Maintien de la Grèce dans la zone euro

Sortie de la Grèce dans la zone euro

GAINS

COÛTS

GAINS

COÛTS

Pour la zone euro

A

B

E

F

Pour la Grèce

C

D

G

H

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Chef économiste, Economiste de l'innovation, knowledge manager des cabinets de conseil en management (20 ans). Essayiste et conférencier français spécialiste de prospective économique, mon travail, fondé sur une veille et une réflexion prospective, porte notamment sur l'exploration des innovations, sur leurs impacts en termes sociétaux, environnementaux et socio-économiques. Responsable de l'offre "FUTURA : Impacts des innovations sur les métiers de demain". Vision, Leadership, Remote of Work, Digital as Platforms...secteurs Banque Finance Assurance, PME TPE, Industrie et Sport du Futur. Après 14 années dans les milieux du conseil en management et systèmes d’information (Consultant et Knowledge manager auprès de Ernst & Young, Cap Gemini, Chef Economiste-KM auprès d'Altran - dont un an auprès d'Arthur D. Little...), je fonde Economic Cell en 2013, laboratoire d’observation des innovations et des marchés. En 2017, je deviens en parallèle Chef Economiste d'Harwell Management. En 2022, je deviens Chef économiste de CGI et Directeur de CGI Business Consulting. Intervenant en économie de l'innovation à Aivancity, Sciences po Paris, ESSEC, HEC, UP13, Telecom-Paris... et Conférenciers dans le secteur privé, DRH, Directions Métiers... J'ai publié plus de 300 tribunes économiques dans toute la presse nationale, 8 livres, 6 articles scientifiques dans des revues classées CNRS et j'interviens régulièrement dans les médias français et internationaux. Publication récente aux éditions FORBES de « Capitalisme et Technologie : les liaisons dangereuses – Vers les métiers de demain ». Livre en cours : "La fin du travail" Site personnel : www.pascal-de-lima.com

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