Incapable de faire face à ses créances et prise dans le tourbillon des grandes puissances, cette Grèce moderne a triché et menti notamment nous le savons, sur ses comptes publics, parfois avec l’aide de brillants financiers peu scrupuleux. Pourtant au moment de l’intégration dans la zone euro, cette Grèce avait l’impression d’être riche.
Aujourd’hui, pauvre et surendettée, elle est menacée de relégation économique... elle est prise dans le paradoxe de Zénon d’Achille. Dans le paradoxe d'Achille et de la tortue, il est dit qu'un jour, le héros grec Achille a disputé une course à pied avec un lent reptile. Achille courait très vite et il avait accordé gracieusement à la tortue une avance de cent mètres. Zénon affirme alors que le rapide Achille n'a jamais pu rattraper la tortue. En effet, si chaque concurrent court à vitesse constante, l'un très rapidement, et l'autre très lentement ; au bout d'un certain temps, Achille aura comblé ses cent mètres de retard et atteint le point de départ de la tortue, mais pendant ce temps, la tortue aura parcouru une certaine distance, certes beaucoup plus courte, mais non nulle, disons un mètre.
Voilà ou se trouve la Grèce.
Pourtant on oublie une chose : un pays contrairement à une entreprise est immortel et décréter le défaut d’un Etat est bien plus difficile et lourd de conséquences que de faire faillite lorsqu’il s’agit d’une entreprise qui disparaîtra. Certes, il y a des arbitrages économiques entre d’un coté le coût colossal du maintien de la Grèce dans la zone euro, tel un puits sans fond, et celui d’une sortie de la zone euro, ou relégation économique. Dans ce dernier cas, les coûts sont principalement constitués de la dette exprimée en euro multipliée par le taux de dévaluation du Drachme nouvelle monnaie Grecque. Ici, toute la question en suspend est celle du défaut ou non car un défaut de la Grèce ajouterait des coûts colossaux au scenario de sortie de la zone euro. Mais de toutes façons le défaut existe déjà dans la zone euro puisqu’il y a eu une décote sur la dette publique grecque, c’est ce qu’on appelle le défaut déguisé pour éviter une crise politique européenne.
En réalité, d’un coté comme de l’autre, la situation est peu réjouissante. On maintient la Grèce sous perfusion dans la zone euro pour des raisons principalement politiques et morales et c'est peut-être une bonne chose quand on connait les antécédents historiques des Etats en cessation de paiement, (si ce risque existe en cas de sortie faut-il le rappeler, ce qui n’est pas évident). Ainsi, si l'on veut que l'économique porte un peu plus ce projet politique il faut que le pacte de solidarité pour la Grèce soit suivi d'un pacte de la croissance.
Il faudrait alors attirer des personnes entreprenantes sur son territoire pour créer des entreprises, assurer le paiement des impôts sans exception. Il faut également identifier les avantages spécifiques du pays : son histoire, son patrimoine (exploitables par le tourisme), son potentiel agricole (inexploité aujourd’hui à l’échelle de l’Europe), son potentiel d’énergie renouvelable (éolien, solaire).
La croissance de la Grèce passe donc par l’organisation de l’exploitation de ses différentes ressources, par des investissements réalisés par ses créanciers ou l’Europe, et par la mise en place d’une politique d’honneur et de fierté.
Pascal de Lima avec Jean-Paul Gomez