Pétrole de schiste, gaz de schiste, un trésor enfoui à exploiter ?

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Par Pascal de Lima et Jean-Paul Gomez Modifié le 18 juin 2013 à 4h52

Un des facteurs du redressement économique actuellement en cours aux Etats-Unis est l'exploitation de gaz et de pétrole de schiste. Les USA sont redevenus presque indépendants vis-à-vis du pétrole de l'OPEP.

Comment se fait-il que cette exploitation n'ait pas été faite précédemment ? La technologie n'existait pas et pour avoir du pétrole, il suffisait de creuser entre 500 Mètres et 1500 Mètres pour le voir jaillir sans faire plus d'effort. Alors pourquoi chercher à exploiter un pétrole plus cher et risqué à produire ? La donne a changé, nous avons atteint le point culminant.

Tout d'abord, la technique utilisée nécessite de créer des puits verticaux de 3000 à 5000 mètres pour atteindre la couche sédimentaire dans laquelle sont des micro-bulles de gaz ou de pétroles. Puis, le forage passe à l'horizontale sur une longueur de 1000 Mètres. On injecte alors une eau à très haute pression (600 Bars) à laquelle on ajoute des additifs chimiques pour « fracturer » la roche et maintenir ouvertes les micro fractures. Cela permet le cheminement du liquide ou du gaz à la surface. Les risques de pollution sont très importants.

En France et en Europe, aujourd'hui, on se demande « Avons-nous un trésor enfoui dans notre sous-sol ? Devons nous nous assurer de sa présence ? Et s'il existe, devons nous l'exploiter ? » Les premières estimations feraient passer la France pour un petit Emirats Arabes Unis. L'Allemagne est aussi concernée, ainsi que l'Italie, l'Espagne... Alors quoi, quel est le facteur bloquant de l'exploitation du gaz de schiste en Europe ?

Les risques sont des nappes phréatiques durablement inexploitables, séismes déclenchés par la fracturation. La taille du territoire US, la densité de population dans les lieux d'extraction étant faible, ces deux facteurs ont amené l'Amérique à autoriser l'extraction risquée de ce pétrole. Et le risque s'est avéré. Des zones entières d'habitation se retrouvent dans l'incapacité d'utiliser l'eau qui était à leur disposition ou sont victimes de séismes.

Cette exploitation qui permet aujourd'hui aux Etats-Unis d'envisager sereinement les prochaines années d'approvisionnement en matière première de source d'énergie est dangereuse. Les Américains ont ainsi réacquis la possibilité d'avoir une énergie peu chère leur permettant de rapatrier des industries énergivores telles la sidérurgie.

Fort de ce retour sur expérience, les compagnies pétrolières ont réenvisagé le potentiel de pétrole dans les bassins sédimentaires Européens et ils ont demandé le droit d'explorer ces zones, les pays Européens ont répondu à l'unanimité sauf 2 (la Pologne et le Royaume Uni, dans lesquels la crise économique est très importante faut-il le rappeler): « Non ! »

Pourquoi ce refus en Europe, au moment où nous nous plaignons de désindustrialiser nos pays, à nous lancer ?
La densité de population aux USA est de 31 Habitants au km2, en France, elle est de 112, en Allemagne 231. Si une fuite se produit dans une nappe phréatique, alors les conséquences sont graves car la population impactée sera très nombreuse. Imaginons le déplacement de millions de personnes...

Bien sur, les pays Européens peuvent accepter de lancer des forages d'exploration, mais au stade de la technique, il est improbable de garantir une exploitation de ce pétrole sans risque.

L'ouverture de ce risque potentiel a donc été écartée pour l'instant.
Il faut que deux éléments se mettent en place pour que nos pays Européens acceptent l'idée d'explorer le sous-sol et d'en exploiter le contenu:
- Que la technologie ne présente plus de risques
- Que les premières zones d'exploration soient peu peuplées

Si pétrole de schiste il y a, il y est et il ne s'évaporera pas. Ça peut être pour le futur un avantage énorme que de garder cette réserve potentielle. Comme toutes choses que l'homme a la capacité de faire si cela est impératif, il ira jusqu'au bout. Soyons certain qu'au moment opportun, ce fait s'avérera et permettra de nouvelles perspectives économiques. Attendons l'évolution de la technique ou du besoin.

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Pascal de Lima est économiste et enseignant à Sciences-po. Docteur en Sciences-économiques de l'Institut d'Etudes Politiques de Paris, il y dispense également des cours d'économie. Auteur de nombreux articles parus dans la presse et dans diverses revues académiques, il a également publié Voyage au coeur d'une révolution : la microfinance contre la pauvreté (Editions Jean-Claude Lattès, 2007) et  La stratégie bancaire : entre équité et efficience (Editions Universitaires Européennes, 2010). Il publie en septembre 2012 "Economie bancaire et croissance économique" aux Editions DUNOD. Jean-Paul Gomez est économiste. Il est également auteur de nombreux articles parus dans la presse. 

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