Le très attendu rapport de la Cour des comptes sur la lutte contre la fraude fiscale en France a été rendu lundi 2 décembre 2019. Un rapport qui pointe une lutte qui ralentit, des montants récupérés en baisse… mais qui ne réussit toujours pas à évaluer le montant de cette fraude qui coûte cher à l’État. Une estimation impossible à cause… de la Direction générale des finances publiques.
La fraude fiscale : c’est combien d’euros ?
C’est le grand sujet : son estimation est très compliquée et plusieurs montants traînent régulièrement sur Internet et dans les tracts. Deux, en particulier, font office de « référence » : les 80 milliards d’euros estimés par le syndicat Solidaires finances publiques et les 8,5 milliards d’euros estimés par l’Acoss. La Cour des comptes ne croit ni à l’un, ni à l’autre : le premier leur paraît trop élevé et, rappelle les magistrats, « ne peut pas être considéré comme une cagnotte dans laquelle les pouvoirs publics pourraient puiser à leur gré », le deuxième leur paraît sous évalué.
Mais il reste un montant qui pourrait trancher la poire en deux : celui de la DGFiP, la Direction générale des finances publiques. En 2007, il y a donc 12 ans, le Conseil des prélèvements avait recommandé qu’un travail sur le sujet soit effectué… mais il n’a jamais eu lieu. Didier Migaud, président de la Cour des comptes, critique vivement Bercy pour ce manque d’action : « sans estimation du phénomène, il est difficile de mettre en place une stratégie robuste et efficace de lutte contre la fraude ».
La lutte contre la fraude fiscale abandonnée par l’État ?
Bercy sans conteste dans le viseur de ce rapport. La Cour des comptes pointe que la délégation nationale à la lutte contre la fraude fiscale « n’a plus de dirigeant depuis six mois », que les contrôles pourraient être « perfectibles », que l’efficacité de l’Urssaf est « insuffisante » ou, tout simplement, que le plan national de lutte « n’est plus actualisé depuis 2016 ». Comme si le gouvernement avait tout simplement renoncé à endurcir le combat.
« Il n’est pas nécessaire d’avoir de nouvelles mesures législatives, mais il faut mieux organiser les services, mieux professionnaliser, faire en sorte qu’il y ait des échanges d’informations plus importants entre les différentes administrations », préconise Didier Migaud.
Des montants recouvrés en baisse
Les montants recouvrés auprès des fraudeurs, du coup, baissent : de 10,1 milliards d’euros en 2013, ils ont chuté de 13% en 2018, à 8,7 milliards. La faute aux condamnations, qui sont de moins en moins nombreuses : 37% de moins entre 2008 et 2017.
Bercy, de son côté, répond avec les chiffres de 2019 : une hausse de 40% des recouvrements sur les neufs premiers mois de l’année, par rapport à la même période en 2018, pour un montant de 5,6 milliards d’euros. Va-t-on, toutefois, dépasser les 8,7 milliards d’euros de 2018 ?