Les CDD facteurs d’intégration et de solidité psychique devant la vie

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Par Daniel Moinier Publié le 24 mars 2016 à 5h00
France Loi Travail Cdd Contrats
@shutter - © Economie Matin
80 %Plus de 80 % des contrats signés en France sont des CDD.

Actuellement, nous sommes en plein délire à propos du type de contrat de travail idéal. La tentation de taxer encore plus les CDD pour obliger à embaucher en majorité en CDI, est une grave erreur. Ou sinon, il faut modifier la teneur du CDI et libérer les contraintes qui freinent les possibilités de se séparer d’un salarié.

Avec plus de 40 années d’expérience en recrutement, j’ai pu constater les ravages que la durée trop longue d’un CDI peut produire et encore plus lorsqu’il y a licenciement. Les cas les plus tragiques que j’ai pu découvrir, ce sont des personnes travaillant depuis le début de leur carrière dans une entreprise à la campagne, dans un coin perdu, qui se retrouvent licenciés vers la cinquantaine. C’est la sidération, l’incompréhension, un choc terrible, un coup de massue qui leurs tombe sur la tête. Le summum, c’est lorsque qu’il s’agit d’un licenciement individuel et non collectif : « j’ai tout donné et c’est comme cela qu’on me remercie » !. La culpabilité peut être encore plus forte, la colère envers l’employeur démesurée, ou alors l’inverse, le repli sur soi allant jusqu’à la déprime. Que n’ai-je vu de voiture, de maison revendues, de divorce, de suicide même et l’extrême difficulté à essayer de rechercher un autre emploi. Surtout lorsque vous savez qu’il n’existe aucune autre entreprise similaire dans le secteur et que le seul moyen de retrouver un emploi équivalant ne peut se trouver qu’à des centaines de kilomètres. Ce qui oblige à déménager. Et le pire, c’est lorsque vous n’avez encore jamais changé d’entreprise, ni de poste, ni de fonction, c’est complètement insurmontable et irréaliste. Dans mon 4ème livre, sorti un peu après la crise de 2009, « Le meilleur parcours pour ne jamais être au chômage », je retrace un nombre de cas souvent similaires, vécus par de très nombreux salariés. Tous les séquestrations de patrons, les dégâts d’entreprises, de sous-préfecture ( rappelez-vous par exemple Continental), les bonbonnes de gaz, proviennent presque toujours de la même frustration : une appartenance très forte à une entreprise et la coupure brutale d’avec celle-ci.

Alors que si vous avez démarré en intérim, en CDD, dans plusieurs entreprises, dans des lieux, régions et même pays différents, le problème ne se pose plus du tout de la même façon, même si vous êtes licenciés. Toutes les contraintes aux entreprises en matière de contrat de travail mises en place, n’ont pas du tout arrangé les choses, bien au contraire.

Un exemple flagrant : A l’origine le contrat intérim (il n’y en avait qu’un) était d’une simplicité remarquable ; une date de début, pas de fin, pas de motif. C’était soit l’employeur, soit l’intérimaire qui pouvait le stopper lorsqu’il le voulait. Il fonctionnait très bien. Il n’y avait presque jamais de problèmes, au contraire, on s’est aperçu que les missions duraient beaucoup plus longtemps que ce qui était envisagé à l’origine. Beaucoup moins de paperasserie, de perte de temps pour trouver le type de motif, d’appels téléphoniques toutes les semaines pour faire des avenants de prolongation ou changer de motif pour prolonger les contrats, pour rester tant bien que mal en règle avec la loi. C’est toujours un casse tête permanent, sans parler des déclarations de tous ces mouvements à l’inspection du travail.

Toutes ces contraintes, et je n’ai parlé que d’un seul cas, n’ont fait que rigidifier la fluidité des emplois, augmenter les coûts, le stress, les possibilités d’être en infraction, d’où recours aux prud’hommes, à la justice, etc… Alors penser de taxer les CDD courts, pour obliger à embaucher de suite en CDI, ne peut que forcer les employeurs à trouver d’autres parades. En premier l’intérim, qui est encore plus précaire que le CDD, passer par des auto entrepreneurs, des vacataires, des sous-traitants,…, ce qui ne résoudra pas le problème de l’embauche.

Si je reviens à mon livre, la conclusion de l’étude qui avait été faite sur plusieurs dizaines d’années, préconisait aux jeunes, pour bien gérer leur carrière et ne pas être géré par elle, de partir avant d’être renvoyé. Plus vous restez dans la même entreprise, plus vous avez des « chances » d’être licencié, individuellement ou collectivement (un exemple, l’usine Peugeot d’Aulnay).

Alors la règle pourrait être (à moduler en fonction du poste): 2 ans maximum dans la première entreprise, 3 ans dans la seconde et ainsi de suite avec une année de plus chaque fois. Ce qui pourrait représenter ; 64 ans en fin de carrière et plus, si vous avez commencé à 20 ans et 69 ans, si vous avez commencé à 25 ans… C’est théorique, mais il est important de rester toujours employable. Vous acquerrez beaucoup plus d’expérience, de connaissances, d’assurance, de confiance, de salaire qu’en restant toujours dans la même entreprise, même si vous avez changé de fonction et même de lieu. Bien avoir toujours en tête ; qu’il faut penser à prévoir son changement quand tout se passe bien, et ne surtout pas attendre que les conditions se dégradent tant pour vous, que celles de l’entreprise. Vous serez en position de « force » si vous n’avez pas de difficulté et la possibilité de refuser un poste ailleurs sans contrainte.

Autre étude qui est un facteur d’augmentation de croissance et de PIB supplémentaire pour le pays : La mobilité. Avec le doublement de notre mobilité professionnelle, la France pourrait gagner jusqu’à 6 points de PIB. (Etude Eurostat) : En frais d’hôtellerie, de transport, de déménagement, d’emménagement et tout ce qui est lié à un changement de lieu, relations familiales et autres. Coté mobilité, la France n’est pas très performante parmi les pays européens

www.livres-daniel-moinier.com

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Daniel Moinier a travaillé 11 années chez Pechiney International, 16 années en recrutement chez BIS en France et Belgique, puis 28 ans comme chasseur de têtes, dont 17 années à son compte, au sein de son Cabinet D.M.C. Il est aussi l'auteur de six ouvrages, dont "En finir avec ce chômage", "La Crise, une Chance pour la Croissance et le Pouvoir d'achat", "L'Europe et surtout la France, malades de leurs "Vieux"". Et le dernier “Pourquoi la France est en déficit depuis 1975, Analyse-Solutions” chez Edilivre.

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