Chômage et problèmes de banlieues sont-ils liés ?

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Par Daniel Moinier Publié le 3 décembre 2015 à 5h00
France Banlieues Chomage Taux Immigres
@shutter - © Economie Matin
5Pôle Emploi répartit les chômeurs dans cinq catégories aujourd'hui contre une en 1960.

Rappelez-vous (ceux qui peuvent) ces belles années des 30 glorieuses sans chômage. Belles, peut-être pas pour tout le monde, mais certainement plus sereines qu’aujourd’hui.

Plusieurs raisons à cela :

Les banlieues n’existaient pas, le chômage non plus. Je me rappelle toujours alors que je venais de démarrer un nouveau poste dans le recrutement, mon collègue et supérieur, me dit : «  Quand vous verrez un chômeur s’inscrire appelez-moi » ! Ce fût en 1972. Il faut se replacer dans le contexte pour se rappeler ce qu’était à cette époque le fait d’être chômeur. Pour la famille c’était dégradant, il se cachait, n’osait pas facilement aller s’inscrire.

Pendant cette période euphorique d’après guerre, il n’existait que des Bourses du Travail ou de Placement qui géraient l’emploi. C’est le 13 juillet 1967, alors que chômage commençait réellement à pointer son nez, que l’ANPE (Agence Nationale pour l’Emploi) a été créée. A cette date le nombre de chômeurs était d’environ 191.000. A titre indicatif, il était de 130.000 en 1960. Il n’y avait qu’une catégorie contre 5 aujourd’hui (et même 8 dans les années 2000 !)

Pour expliquer en partie cette montée du chômage, il existe un parallèle évident entre le taux de chômage et la durée de travail. Si l’on prend comme exemple l’entreprise où j’ai fait mes débuts, une filiale du groupe Pechiney, l’horaire de base se situait au départ à 52 heures semaine. Et ce n’était que la base, puisque une part non négligeable des salariés demandait à effectuer des heures supplémentaires au-delà de cet horaire. C’est là que l’on constate que l’horaire est bien subjectif, puisque effectuant déjà 12 heures supplémentaires (imposées), ils demandaient à travailler en plus comme s’ils se trouvaient à 40 heures (base légale de l’époque). Avec cet horaire de base, même un salarié au SMIG (SMIC de l’époque) était largement au dessus de celui-ci. Soit 40 % de plus que le SMIG de 40 heures. Dix années après, les horaires sont passés ensuite à 42 heures ½, avec la fermeture du site qui n’était plus suffisamment rentable. Soit 450 personnes qui se sont retrouvées licenciées. Cet exemple reflète bien la dégradation de l’emploi, de la croissance et l’élévation progressive du taux de chômage.

Tableau d’évolution des taux de chômage et de croissance

C’est aussi entre 1959 à 1976 que quelques 300 ZUP ont été le cadre de la construction d'un million de logements collectifs dit HLM (Habitation à Loyer modéré). Les premières sont apparues à Sarcelles conçues par l’architecte Labourdette. A ce moment là, il existait très peu de problèmes de banlieue, une partie importante des habitants venait de la campagne avec la mentalité de travailleurs. En 1963, avec la fin de la guerre d’Algérie, le contexte a quelque peu changé avec l’arrivée massive de pieds noirs, mais aussi des harkis et autres algériens, seuls au départ, puis plus nombreux avec le regroupement familial.

Puis c’est l’arrivée des années 1982/83 qui ont fortement amplifié le processus de dégradation de l’économie. La mise en place des 39 heures, de la 5ème semaine de congés, du 8 mai redevenu férié et surtout le passage de la retraite de 65 à 60 ans. Ces seules mesures ont fait baisser d’un coup la durée d’activité de 8760 heures sur la durée de vie. Le pays étant en déficit depuis 1975, il a fallut augmenter les prestations, impôts, taxes... A titre indicatifs les lignes sur la fiche de paie sont passées de 4/5 en 1960 à 25/30 en 2015. Quand on regarde un bulletin suisse en 2014, un bulletin allemand, un anglais, on voit qu’ils sont de même simplicité qu’un bulletin français de 1960 ! Bravo la France !

En 2000, la mise en place des 35 heures ont compété le tableau, apportant le coup de grâce final. La moyenne annuelle travaillée salariée n’est plus que de 1559 heures, mais sur la durée de vie c’est catastrophique, nous avons perdu globalement 11.500 heures. Depuis la dernière guerre, c’est près de 14 heures de moins par semaine et 14 années de moins sur la durée de vie. Avec la même échelle, les prélèvements pour un salarié non cadre sont passés de moins de 7% à plus de 22%, soit plus de 3 fois plus, pour moins de remboursements de Sécurité Sociale, des niveaux plus faibles de pensions de retraite… Quel gâchis !

En première conclusion, il est possible d’interpréter que le temps de travail n’a pas diminué par manque de demande intérieure et d’activité, mais par la pression constante des revendications syndicales et surtout par l’idéologie politique. Les trente glorieuses sont restées glorieuses tant que les durées de travail et d’activité sont restées élevées.

Pendant cette période, la montée progressive du chômage, la difficulté pour les immigrés et leurs descendants à trouver un emploi, ont transformé la banlieue en zones à fort chômage, de pauvreté et progressivement de non- droit, de trafics en tous genres, les tensions avec l’islam ayant encore un peu plus accentuées le phénomène. Il est plus qu’évident que le chômage, l’inemploi, les regroupements ethniques, ont été des forts vecteurs de déstabilisations sociales et d’implantations de niches de trafic de drogue et de terroristes.

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Daniel Moinier a travaillé 11 années chez Pechiney International, 16 années en recrutement chez BIS en France et Belgique, puis 28 ans comme chasseur de têtes, dont 17 années à son compte, au sein de son Cabinet D.M.C. Il est aussi l'auteur de six ouvrages, dont "En finir avec ce chômage", "La Crise, une Chance pour la Croissance et le Pouvoir d'achat", "L'Europe et surtout la France, malades de leurs "Vieux"". Et le dernier “Pourquoi la France est en déficit depuis 1975, Analyse-Solutions” chez Edilivre.

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