Le capital humain, vraie force des PME pour une politique d’intelligence économique

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Par Christelle Urvoy Publié le 4 octobre 2018 à 5h00
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2,6 millionsLa France compte 2,6 millions d'entreprises.

Après un premier article, présentant l’intelligence économique et son utilité pour les entreprises, un regard spécifique sur la matière pour les TPE/PME était nécessaire.

En effet, pour la plupart des dirigeants ces structures, l’intelligence économique n’est qu’une vague notion, principalement pratiquée par les grandes entreprises et notamment par les directions stratégiques. Ils en ont une image couteuse, technique et chronophage, les incitant à ne pas aller plus loin. Or l’intelligence économique est une matière riche. En effet, la concurrence est aujourd’hui multiforme et il serait inconscient aujourd’hui pour une entreprise de penser qu’elle n’a aucun concurrent.

En effet, que feront les dirigeants d’auto-école face à la voiture autonome ? Et si cette dernière était finalement la vraie concurrence des chauffeurs de taxis si souvent dans la rue ? Que feront les experts comptables face au logiciel de Business Intelligence ? Et les professions libérales réglementées (avocats, notaires…) résisteront elles face à l’uberisation ? Que feront les professions médicales face au développement de l’intelligence artificielle telle que celle mise en œuvre dans le logiciel Watson ? L’artisan pâtissier a-t-il envisagé qu’Amazon puisse devenir son concurrent dès lors qu’il offrira la capacité de livrer des produits frais en 2h ? Les fournisseurs de l’industrie pourront-ils faire face à l’impression 3D ? Les exemples ne manquent pas sur les nouveaux concurrents et les risques qui peuvent se présenter à la porte des petites entreprises.

Bien sur les PME, et encore plus les TPE ne partagent pas les mêmes moyens que les grands groupes. Cela est d’autant plus vraie que lorsqu’on parle d’Intelligence Economique on parle de veille, d’influence et de sécurité économique. Elles peuvent vite avoir l’impression que tout cela n’est pas pour elles. Pour reprendre l’analogisme automobile utilisé dans l’article « L’intelligence Economique, une pratique utile pour les entreprises », évidemment qu’avec une petite voiture on ne fait pas de la F1, ou le Paris Dakar (ou alors pour d’autres raisons que la première place – souvent basée sur un critère financier). La course se fait sur le circuit (marché) adapté à sa société. Si on a une Twingo on fait la Twincup et on adapte les moyens dédiés à la veille à sa capacité humaine et financière.

Bien que certaines d’entre elles l’appliquent, d’autres ont découvert l’intelligence économique à travers des articles de presse, des conférences dans les chambres de commerce, dans leurs fédérations professionnelles. Mais nombreuses peinent encore à définir les actions et surtout les gains que cette pratique pourrait engendrer. Voici quelques éléments de réponses.

Des TPE/PME, réellement désavantagées par rapport aux grands groupes ?

Les TPE/PME pensent à tort que seuls les grands groupes peuvent développer une politique d’intelligence économique. Elles oublient qu’elles disposent d’atouts importants que n’ont pas les structures plus grandes. Leur taille est bien souvent un atout dans la circulation de l’information. Les grandes entreprises bénéficient certes d’outils pour collecter et partager l’information. Pour autant, le bénéfice reste parfois relatif. En effet, les échanges, les interactions entre les individus est plus aisés. Les synergies sont alors plus faciles à trouver, pour mobiliser derrière la stratégie d’une entreprise, là où les départements des grands groupes peuvent chercher à conserver leur pré-carré. Il reste essentiel pour le dirigeant, le manager, de savoir impliquée et motivée ces équipes, de créer un sentiment d’appartenance propice aux partages d’informations.

Les TPE/PME peuvent également capitaliser sur les forces vives de l’entreprise pour limiter le recours aux outils en profitant de temps d’échanges formalisés pour intégrer des problématiques de veille, d’influence ou de sécurité économique. Puis profiter de ces moments pour poser une question : qui sont mes concurrents ? Qu’attendent mes clients ? Quels problèmes ou avantages avons-nous avec tels fournisseurs/partenaires ? La question peut être plus ou moins ouverte, et les réponses plus ou moins limitées. Les résultats peuvent eux être surprenants. A vous de trouver le rythme propice pour impliquer les équipes. Ne reste plus ensuite qu’à garder traces des échanges par le biais de notes pour conserver la mémoire des propos. Ils seront utiles.

Partant du postulat que 70% des réponses aux questions que se posent un décideur se trouvent dans l’entreprise, les petites entreprises auront plus de facilité à les réunir que dans un groupe de quelques milliers de salariés.

Une stratégie, une vision suffisent à déployer une politique d’intelligence économique

La clé réside dans la définition de sa stratégie et son partage avec les salariés susceptibles de porter la démarche d’intelligence économique. La définition de ses besoins informationnels en corrélation avec la vision stratégique de la PME est essentielle car elle ne dispose en effet pas des moyens humains et financiers pour suivre tous azimuts les informations disponibles. Or, bien souvent, les équipes ne retiennent pas ou ne diffusent pas une information, ignorant la stratégie de l’entreprise, sa vision, et pensant à tort qu’elle n’a pas d’intérêt pour leur direction.

Le capital humain va ainsi compenser en grande partie les moyens financiers. Contrairement aux grandes structures ou des cellules de veille s’organisent pour alimenter un service ou l’ensemble des salariés, dans les petites entreprises, chacun doit prendre en charge une partie de la veille. Le dirigeant est le plus à même d’animer la politique générale et de mobiliser les équipes en fonction de la stratégie de l’entreprise et des besoins informationnels. Les temps de partage permettront ensuite à chacun de faire remontée ses avancées, et d’évoquer ses propres besoins informationnels.

La mobilisation des équipes sera d’autant plus importante que les entreprises plus modestes n’ont pas accès aux mêmes outils que ceux disponibles dans certains grands groupes. En effet, ces derniers peuvent se permettre d’avoir un spectre de recherche plus large car ils sont en capacité de déployer des outils collectant, analysant et diffusant de l’information de manière très automatisée. Or leur coût peut être vite prohibitif. Il existe cependant sur le marché des outils dont les fonctionnalités peuvent suffire à des petites entreprises pour initier des démarches de veille cohérentes et performantes. Voici quelques exemples :

- Les alertes permettent notamment d’être informé lorsqu’un contenu nouveau répondant à une de vos requêtes est référencé. Les alertes Google ou Talkwalker sont des exemples relativement efficaces. Le principe est simple : sur la base d’une requête (mots clés associés dans un moteur de recherche), vous récupérez toutes les nouvelles informations qui pourraient être diffusées. L’efficacité n’est pas totale mais ce sont de bons outils, gratuits. Le premier réflexe est d’y ajouter le nom de son entreprise, son identité, ainsi que ceux de ses concurrents.

- Les agrégateurs de flux RSS (langage informatique permettant de récupérer du contenu issu d’un site web, d’un blog, d’un réseau social). Ils prennent la forme de plateformes gratuites ou payantes (et les prix peuvent grandement variés) et collectent automatiquement toutes les nouveautés sur vos sites web favoris. Les fonctionnalités proposées peuvent être basiques et s’en tenir à la simple collecte d’information, ou être plus approfondies et proposer des solutions d’analyses des informations collectées.

Inoreader, ou le frenchie Netvibes remplissent parfaitement cette mission. Pour quelques euros par an (selon les versions), il met à votre disposition, sur une plateforme unique et personnelle, des sites qui vous intéressent et qui génèrent de l’actualité. Des options de filtrage et de rediffusion de l’information sont également disponibles facilitant le travail de veilleur. Le plus fastidieux avec ces outils réside dans la sélection des sources (ensemble de liens URL) que l’on souhaite intégrer : sites concurrents, presses spécialisées, quelques blogs. Il est essentiel que les entreprises gardent à l’esprit qu’elles ne doivent pas tout suivre.

Il est également primordial de définir un temps à y consacrer. Mieux vaut un peu tous les jours que trop en fin de semaines voir en fin de mois. En effet, l’information s’amassant sur la plateforme, il devient parfois décourageant de s’y atteler. Un temps de formation à ses outils peut être nécessaire pour rendre immédiatement opérationnel la (ou les) personne(s) en charge de la solution. Les plateformes de veille sont plus complètes et couvrent entièrement le cycle de l’information (collecte, traitement, analyse, diffusion, et capitalisation). Proposées par des éditeurs, elles sont disponibles à des prix très différents et peuvent être optimales pour renforcer le dispositif de veille. Elles n’empêchent cependant pas le temps humain. En effet, c’est ce dernier qui va intégrer les sources, valider la pertinence des choix dans le traitement, définir les critères d’analyse….

Faire appel à un cabinet d’intelligence économique peut être une solution. Certains se spécialisent d’ailleurs sur les TPE/PME. Il faut cependant valider la démarche engagée afin que les consultants restent agiles et s’adaptent aux besoins de réactivité des dirigeants de TPE/PME. Pour finir la définition précise de vos besoins sera encore (et toujours) le meilleur moyen de réduire la facture.

Dans les petites entreprises, le capital humain, associé à la définition de sa stratégie, est la clé pour déployer de l’intelligence... économique. Encore faut-il que chacun soit convaincu de l’importance de l’information. Pour les TPE/PME qui hésiteraient encore, demandez-vous simplement : avez-vous eu le sentiment de passer à côté par manque d’informations : une difficulté à convaincre un client ? Une défaite incompréhensible à un appel d’offre ? Un nouveau concurrent sorti de nulle part et qui vous pique un client ? Une envie de se développer sans savoir avec qui y aller ? Si oui, la veille et l’intelligence économique pourrait bien vous être utile.

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Christelle Urvoy – Fondatrice d’Advicie. Juriste de formation, elle est titulaire d’un diplôme de consultante en intelligence économique obtenu auprès de l’EEIE (Versailles). Après une première cocréation d’un cabinet d’intelligence économique, en 2012, elle a décidé de fonder Advicie, un cabinet d’intelligence économique et de veille spécialisé dans les TPE/PME, afin de mieux répondre à leurs attentes et à leurs besoins.

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